Politique

Rébellion : Soro-IB qui a trahi qui ?

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Avant sa mort, IB a rétablit la vérité.
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Qui était le père de la rébellion et qui a acheté les armes ? Le témoignage d’IB qui met fin au débat.

20 années après la rébellion qui a entraîné la partition du pays en deux, beaucoup de choses ont été entendues et dites sur les origines de cette révolte. S’il n’a pas été suffisamment mis devant les projecteurs pendant les dix années qu’a duré cette rébellion, Ibrahim Coulibaly, un des acteurs clés du coup d’état de 1999 est connu pour en être le cerveau. Ayant repris le maquis à la tête du commando invisible à la faveur de la crise post-électorale de 2011, celui qu’on surnomme IB a fini par livrer des secrets jamais révélés sur cette rébellion. Le 7 avril 2011, recevant une délégation de populations venues connaître ses motivations, IB a alors fait des révélations qui permettent à l’opinion d’être située sur un certain nombre de choses : Qui était le père de la rébellion ? Qui l’a financé ? Comment l’opération a été montée depuis le Burkina ? Comment les auteurs de la rébellion se sont retrouvés en exil ? Comment vivaient-il ? Ci-dessous un large extrait du récit d’IB sur la rébellion de 2002. 

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 « (…) Une semaine après, les Zaga Zaga et autres, Wattao, à commencer par Chérif Ousmane ont été arrêtés. Le général Guéï a fait arrêter toute la Brigade spéciale qui assurait sa sécurité. Je ne vais pas prendre trop le temps pour vous expliquer tout cela. Pendant ce temps, j’apprends que je devais partir au Canada. Quand ça s'est passé, j'ai eu le Général au téléphone. Je lui ai dit : mon Général, qu'est ce qui se passe ? Si c’est une affectation, il n'y a pas de problèmes. Mais qu'est-ce que mes compagnons qui vous ont permis d'être au pouvoir ont fait pour se retrouver en prison ? Le Général a répondu en disant : IB, vous voulez me tuer, j'ai eu l'information et la certitude que vous voulez me tuer. Je lui ai dit : Mon Général, si on voulait vous tuer, il y a longtemps on l'aurait fait. Je pense que ce n'est pas la solution de mettre ces jeunes-là en prison. Démontrez au peuple que vous êtes une icône de la paix (…) Démontrez-le par des preuves en libérant ces jeunes. Puisque je voulais obtenir la libération de mes compagnons, je lui ai dit de dire au peuple : ces jeunes voulaient me tuer et que comme je crois en Dieu, je vais les libérer et les laisser avec leur conscience. Il me dit : oui, j'ai compris.

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Le lendemain, on m'appelle pour m'informer que mon adjoint ''La grenade'' a été tué en prison sur instruction du Général Gueï. Donc, il a commencé à les liquider un à un. J'ai pris mon téléphone pour appeler le Général et je lui ai dit : Mon Général, vous oubliez vite. Vous venez de tuer la grenade, mais sachez que vous allez tous nous tuer. A partir de cet instant, moi, je te déclare la guerre. Je ne suis plus attaché militaire au Canada et considérez moi comme votre adversaire. Voilà comment le Général et moi, nous nous sommes séparés. (...)v J'ai laissé tous mes privilèges et je suis rentré en France. De la France, je suis allé au Burkina et c'est à partir de là que j'ai commencé à appeler mes amis. On avait déjà mis un système en place. Le jour des élections (d'octobre 2000) quand il y a eu cafouillage, nos amis sont allés attaquer la poudrière pour libérer les Wattao et autres. Je me suis arrangé pour les faire tous monter à mes côtés à Ouagadougou. Pendant ce temps, Guillaume Soro, parce qu'il faut dire la vérité aux gens, était à Abidjan. Quand il y a eu accalmie, je pense qu'il candidat (aux élections municipales) à Port-Bouët avec Henriette Diabaté. Il a échoué là-bas. Blaise Compaoré m'a permis de recueillir mes éléments qui étaient dans des situations clandestines à Abidjan. Donc, on a pu les faire sortir un à un : Tuo Fozié, Adams, Wattao, Zaga zaga. Guillaume Soro m'a appelé et m'a dit que c'est dur pour lui et qu'est ce que je peux faire pour l'aider. Je lui ai dit que les journalistes m'appellent à tout instant pour discuter, moi, je n'ai ce temps. Moi, je suis en train de m'organiser pour voir ce qu'on peut faire. Donc, viens, toi, tu vas t'occuper des journalistes. C'est comme ça que j'ai fait venir Soro Guillaume à côté de moi comme porte-parole. Et c'est de là qu'est née toute cette histoire. Nous avons monté le 19 septembre 2002. J'ai préparé mes hommes pendant près de six mois. Nous avons fait deux ans et démi à Ouaga. Mais pour lancer le 19 septembre 2002, nous nous sommes retirés en brousse pour préparer mes hommes pendant près de six mois. On a tout calé. Le jour où je faisais partir mes hommes sur le terrain, un ami m'a aidé financièrement.

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Je veux préciser quelque chose. Je n'ai jamais reçu 5Fcfa d'un homme politique pendant mes presque trois ans au Burkina Faso. Je vous le dit sincèrement devant Dieu, je n'ai pas reçu 5 Fcfa d'un homme politique de Côte d'Ivoire. Donc, je ne dis pas de nom, je dis bien de Côte d'Ivoire, ni de la part d'hommes d'affaire, ni de la part d'homme politique pour entretenir ces hommes. Qu'est ce que je gagne à mentir. Si quelqu'un m'a aidé, pourquoi dirais-je que personne ne m'a aidé ? Qu'est ce que je gagne là-dedans. C'est Dieu qui nous a aidé et l’État burkinabé qui nous a donné des villas, c'est cela, la vérité. Après la formation, un ami Libanais m'a envoyé 60 millions de Fcfa. J'ai fait des enveloppes de 300.000 Fcfa. L'intendant était Gaoussou, il a fait la rébellion et c'est lui qu'on appelait Jah Gao, le com-zone de Boundiali. Je lui ai dit de faire des enveloppes de 300.000 Fcfa pour tous les éléments qui devaient rentrer. Je les avais repartis en trois groupes parce qu'il devait y avoir trois attaques simultanées : Abidjan, Bouaké et Korhogo. A la tête de chaque groupe, il y avait un chef. Pour Abidjan, c'était Kobo, à Bouaké, c'était Zaga zaga, et à Korhogo, c'était Messamba. Jusqu'en 2003, avant mon arrestation en France, tout le monde avait une bonne image de la rébellion. Nous sommes rentrés, les choses ont fonctionné par la grâce de Dieu, nous avons coupé le pays en deux (…) ».

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Cet extrait montre clairement le mode de financement de la rébellion et les hommes qui l'ont animée. IB n'a nullement cité le nom d'Alassane Ouattara. Lors de l'un de nos échanges à Paris, alors qu'il y était qu'il ne pouvait sortir, il me l'a confirmé, avant de m'indiquer qu'il en avait gros sur le coeur contre Alassane Ouattara qui a toujours refusé de les aider. Voici ce qu'il me confia à ce sujet : « Quand j'étais au Burkina-Faso, j'ai appelé le président pour lui dire que les militaires qui ont fait le coup d’État de 1999 sont avec moi et que nous avons besoin d'aide pour une opération en préparation contre le régime de Laurent Gbagbo. Alassane Ouattara m'a rétorqué qu'il n'avait pas 5 Fcfa pour nous et qu'il était engagé dans un processus politique avec Laurent Gbagbo devant aboutir à l'entrée au gouvernement de ministres RDR. Et depuis lors, lui et moi, nous ne nous sommes plus appelés ».

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Alassane Ouattara, au regard du témoignage de la cheville ouvrière de la rébellion, n'a participé, ni de près, ni de loin, à la mise en place d'une quelconque rébellion. S'il y avait la moindre preuve à ce sujet, nous l'aurions su. Les partisans de Laurent Gbagbo ont fait des déductions, à partir des éléments qui faisaient partie de la garde rapprochée du président Ouattara à l'époque où il était dans l'opposition. On pourrait aussi leur rétorquer que Louis Henri Dacoury Tabley, militant du Fpi à l'époque a rejoint la rébellion et que par conséquent, le Fpi y était impliqué. Mais l'attitude du Fpi se justifie par le fait qu'ayant échoué à discréditer Ouattara concernant sa nationalité, il a mis en avant cet argument, à travers divers montage, pour susciter la haine contre le président du Rdr. Cet argument a fait flores auprès des esprits faibles, surtout, au sein de l'armée contrôlé, à l'époque, par le régime de Laurent Gbagbo. C'est au nom de la haine contre la rébellion et tous ceux qui ont été accusés d'avoir pactisé avec elle que d'autres crimes ont été perpétrés, dont les tueries des 25 et 26 mars 2004. 

 

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