
Après la mise à la touche ou la reddition de ceux qui détiennent la mémoire et le disque dur du PDCI- RDA, l’annonce de la candidature de Jean Louis Billon vient à nouveau troubler le ciel déjà orageux au-dessus de la maison du parti à Cocody. Pour des « atteintes à l’unité du parti, insoumission aux décisions prises par les instances dirigeantes et mise en péril des intérêts politiques du PDCI-RDA », ce dernier a été convoqué devant le Conseil de discipline pour s’expliquer. A côté du feuilleton politico-judiciaire qui va s’ouvrir au tour de cette convocation de Billon, la sortie du député Bredoumy Soumaïla Kouassi, porte-parole du PDCI-RDA vient en ra jouter aux supputations qui vont bon train et qui laissent clairement entre voir qu’il y a de l’eau dans le gaz du vieux parti. En affirmant tout de go qu’il « n’y a aucun problème Jean-Louis Billon », Bredoumy confirme la thèse du malaise rampant au sein de cette formation.
Pour qui a suivi le congrès qui a vu l’élection de Thiam qui a été boycotté par Jean-Louis Billon et son refus d’intégrer le Secrétariat exécutif, venir aujourd’hui dire qu’il n’y a aucun problème Billon est un mensonge aussi gros comme le nez en plein visage. Plus grave, le député de Tankéssé, Kokomian et Tienkoikro, dans ses propres propos a soutenu une chose et son contraire en s’interrogeant sur l’opportunité de la campagne que mène Billon sur le terrain. « Pour le président du PDCI-RDA, il n’y a aucun problème Billon. M. Billon est un militant du PDCI-RDA et le parti a des règles de fonctionnement. Pour le président du parti, M. Billon est libre. Mais dans sa volonté d’être candidat, est ce qu’il peut outrepasser les règles internes ? Nous constatons qu’il est sur le terrain pour faire une campagne. Fait-il une campagne pour la présidentielle ou pour la convention ? », s’est interrogé Soumaila Bredoumy avant d’ajouter un peu plus loin que « le président Thiam n’est pas un belligérant ».
En voulant justifier la régularité de l’auto saisine du Conseil de discipline et en feignant d’ignorer l’in fluence de Jean-Louis Billon, Bredoumy s’est dédouané à moindre frais. Si tant est qu’il n’y a aucun problème Billon et que « la convention est ouverte à toute personne qui veut se porter candidat », pourquoi tant de bruits autour de celle de Billon ? A la vérité, une convention fait peur et même très peur au PDCI-RDA à l’état actuelle des choses. A l’évidence, la nouvelle direction semble très frileuse sur la gestion des questions stratégiques. C’est d’ailleurs pourquoi depuis que Tidjane Thiam est à la tête de ce parti, il n’y a jamais eu une seule réunion du Bureau politique. En informant l’opinion de ce qu’une convention sera organisée en 2025, le porte-parole est en train de dire claire ment que la direction actuelle du PDCI-RDA est en train de jouer la montre. L’on sait tous qu’une élection présidentielle mobilise énormément de moyens humains, logis tiques et financiers.
Et tout le monde n’est pas Emmanuel Macron pour préparer une élection et la gagner en moins d’une année. A l’image du génie du football Leo Messi dont les dribles déroutent tous ses adversaires dans les derniers instants d’un match, le ‘‘messie’’ du PDCI-RDA veut prendre au dépourvu ses adversaires internes en jouant la montre. La convention fait donc peur parce que si elle est organisée dans les délais, nul ne peut présager de l’issue de celle-ci parce que des gros bon nets comme Guikahué, Thierry Tanoh, Yasmina Ouegnin et autres sont là, regardent tout ce qui se passe sans parler, du moins pour le moment. Le mieux serait donc d’organiser un simulacre de convention en 2025, à juste quelques mois de la présidentielle pour justifier le passage en force.
Cas Banny, Mady et KKB : Et pour tant Bédié avait montré la voie..
Dans la gestion des ambitions en internes, la direction actuelle du PDCI-RDA manque de beaucoup de tact. Henri Konan Bédié, prédécesseur de Tidjane Thiam à la tête du PDCI-RDA a eu à faire face à des frondes plus grandes et plus graves que ce qui se passe actuellement avec Billon. En 2015, son tout puissant secrétaire général, le Pr Alphonse Djédjé Mady et son très truculent président des jeunes, Kouadio Konan Bertin ont voulu le pousser à la sortie. Son fauteuil était gravement menacé. Mais jamais Bédié n’a actionné le Conseil de discipline contre ses deux plus proches collaborateurs. Bien au contraire, il a invité ces derniers à un congrès et il les a battus proprement et depuis lors, les deux sont rentrés dans leur coquille, parce que la démocratie s’est exprimée.
A côté de Mady et KKB, il y a eu le cas de feu Charles Konan Banny qui voulait également avoir l’investiture du PDCI-RDA pour la présidentielle de 2015. En son temps, l’ancien gouverneur de la BCEAO et ancien Premier ministre avait actionné tous ses ré seaux à l’international pour la cause. Ici encore, Bédié n’a jamais fermé la porte du dialogue. Bien au contraire, il avait invité Banny à une réunion du Bureau politique pour s’exprimer librement. Quand Banny s’est rendu compte qu’il était minoritaire, il n’avait pas d’autre choix que de claquer la porte du Bureau politique. Voici comment un chef règle ses problèmes. Mais dans le cas d’espèce, à peine Billon a dit qu’il est candidat, la machine répressive du PDCI-RDA s’est mise en branle. A la vérité, Tidjane Thiam connait la réalité au sein de son parti. Il sait par quelles contorsions il a été élu après avoir éliminé tous les autres candidats et après avoir marché sur les textes du parti. Dans un tel contexte, mieux vaut continuer le forcing parce que nul ne peut présager l’issue d’un bureau politique et d’une convention convoquée dans les règles de l’art. Pendant ce temps, le blanc de Dabakala est en train de roder son moteur. La météo politique au PDCI-RDA sera très mouvementée dans les semaines et mois à venir
Bernard KRA