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FDS, GPP, Jeunes patriotes, FESCI…Comment ces bras armés du régime Gbagbo ont semé la terreur à Abidjan

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Entre 2002 et 2010, les mouvements patriotiques et les miliciens ont semé la terreur dans les rues d’Abidjan. (Photo : DR)
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Au tribunal de l’histoire, leur responsabilité est grande dans la commission de certains crimes et les exactions qui ont été enregistrés dans le pays dans les jours et semaines qui ont suivi le déclenchement de la rébellion du 19 septembre 2002 en Côte d’Ivoire. Eux, ce sont des éléments des Forces de défense et de sécurité qui avaient décidé de renier leur serment pour servir une cause politique. Ce sont aussi ces jeunes qui ont été organisés, entretenus et armés par des pontes du régime Gbagbo pour servir de bouclier humain et/ou de supplétifs aux forces régulières.

Dans un autre registre, c’étaient aussi des groupes d’auto-défense formés souvent sur des bases ethno-tribales et qui étaient puissamment armés et agissaient en toute impunité. La dernière catégorie faisait la pluie et le beau temps sur l’espace universitaire. Autrefois syndicat qui a fait de la défense des intérêts moraux et matériels des étudiants son leitmotiv, la FESCI s’est transformée en milice armée et semait la terreur sur les campus.

FDS : Des exactions que l’on n’oubliera pas de sitôt…

Parmi les exactions et crimes de l’ancien régime que l’on n’oubliera pas de sitôt, figurent en bonne place, ceux commis par des éléments des forces régulières. Ces policiers, gendarmes et militaires, censés défendre les populations, se sont transformés en milice à la disposition du régime Gbagbo entre 2002 et 2010. A titre d’exemple, le CECOS qui avait été créé pour combattre le grand banditisme, était devenu une milice surarmée qui dépassait ses prérogatives pour exécuter des missions de sales besognes. Au niveau de la chaîne de commandement, c’était un dysfonctionnement total. Un dispositif parallèle avait été installé au Palais présidentiel et c’est depuis là-bas que des ordres étaient donnés. L’acte le plus ahurissant et ignoble de ces forces régaliennes, avant la crise post-électorale, reste la répression dans le sang de la marche du G7 (Groupement de 7 partis de l’opposition, NDLR) en mars 2004.

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A la veille de la marche, un communiqué cosigné par le commandant du palais, le colonel Dogbo Blé Bruno et le commandant du Groupe de sécurité présidentielle, le lieutenant-colonel Ahouma Brouaha Nathanaël, décrète la commune du Plateau « zone rouge ». Et le jour-J, avant même que cette marche initiée par l’opposition pour exiger l’application des Accords de Marcoussis ne débute, des éléments des FDS se sont invités dans des domiciles de certains militants pour réprimer et étouffer cette marche dans l’œuf. Selon l’enquête diligentée par le Conseil de sécurité et les organisations des droits de l’Homme, cette répression a provoqué 120 morts dans les rangs de l’opposition. Mais ce n’est pas tout. Après les assassinats ciblés des journalistes Jean Hélène et Guy André Kieffer et aussi des affres des escadrons de la mort, entre 2002 et 2010, des éléments des FDS se sont tristement illustrés dans la crise.

Jeunes patriotes : organisés, entretenus et armés pour semer la terreur…

Les mouvements patriotiques ont fait leur apparition dans les jours qui ont suivi l’éclatement de la rébellion dans la nuit du18 au 19 septembre 2002. Pris de panique devant la progression fulgurante des hommes de Guillaume Soro, le régime de Laurent Gbagbo a appelé les jeunes à se constituer en bouclier humain pour empêcher les rebelles de progresser. A cette époque, Pascal Affi N’Guessan qui était Premier ministre, a lancé le mot d’ordre de formation des Comités villageois de sécurité (CVS). C’est le point de départ de la naissance des milices ou groupes d’auto-défense. Organisés en cellules isolées, ces structures ont fini par unir leur force, avec à leur tête, Charles Blé Goudé. Jusqu’à la veille de la présidentielle de 2010, les milices et mouvements patriotiques continuaient d’exister d’une manière ou d’une autre avec des dénominations aussi fantasques les unes que les autres. Leurs lieux de prédilection étaient les espaces d’expression publics appelés Agoras et Parlements. La plus célèbre des milices était le Groupement des patriotes pour la paix (GPP) dirigé par Bouazo Yoko Yoko, après le décès de Charles Groguhet.

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Le GPP qui semait la terreur à Adjamé 220 logements, avait plusieurs démembrements parmi lesquels la Force anti-terroriste (FAT) ; la Force de libération du peuple (FLP) ; le MI24 ; l’Unité abeille ; les Nouvelles forces de l’Union pour la libération totale de Côte d’Ivoire, etc. Entretenus par des cadres du FPI et des opérateurs économiques proches du régime, ces jeunes patriotes étaient plus en vue que les forces régulières. C’est d’ailleurs, sous la houlette de Charles Blé Goudé et de ses lieutenants qu’étaient Dacoury Richard, Ahoua Stallone, Serges Kassy, Watchard Kédjébo, Djué Eugène, Idriss Ouattara que toutes les marches en faveur du régime ont été organisées. Au plus fort de la crise post-électorale, ce sont les jeunes patriotes qui avaient initié le sinistre ‘‘Article 125’’ de triste mémoire qui consistait à acheter du pétrole à 100 F et une boîte d’allumettes à 25F pour passer au supplice du feu, tous ceux qui étaient soupçonnés d’appartenir au RHDP et aussi les ressortissants de la sous-région, en représailles à l’offensive de la CEDEAO pour amener Laurent Gbagbo à respecter le verdict des urnes. 20 années après les faits, les stigmates de ces atrocités ont certes, disparu grâce au président Alassane Ouattara, mais le souvenir est encore vivace dans les esprits.

FESCI : Le règne de la terreur sur les campus

Pour mieux cerner les exactions de la FESCI durant la décennie de terreur du régime Laurent Gbagbo, nous nous contenterons de cette introduction d’un rapport dressé par Human Rights Wacth qui couvre cette période. Ce rapport se passe de commentaire. « Après le déclenchement de la rébellion armée en septembre 2002, les changements qui étaient apparus au sein de la FESCI lors de la "guerre des machettes" se sont accélérés, à tel point que des membres de la FESCI du début des années 1990, ont confié à Human Rights Watch qu’ils reconnaissaient à peine l’organisation qu’ils avaient créée.

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Plutôt que pour des grèves d’étudiants en faveur de causes des étudiants, la FESCI est souvent connue aujourd’hui pour sa violence à caractère tant politique que criminel, dirigée principalement contre d’autres étudiants perçus comme des partisans des partis politiques d’opposition ou des rebelles basés dans le Nord, pour les actions menées en vue de paralyser le processus de paix à des moments cruciaux au profit du FPI au pouvoir, et pour l’impunité qui va presque toujours de pair avec les crimes qu’elle perpètre. Par ailleurs, les membres de la FESCI sont couramment associés à des comportements "mafieux" tels que l’extorsion et le racket. Prises dans leur ensemble, les actions que la FESCI mène tant sur les campus qu’à l’extérieur, ont un effet réfrigérant sur la liberté d’expression et d’association des autres étudiants et des professeurs », soutient le rapport de Human Rights Watch qui est disponible via le lien https://www.hrw.org/legacy/french/reports/2008/cdi0508/9.htm. En un mot comme en mille, la Côte d’Ivoire revient de loin. 20 années après ces scènes d’horreur et de terreur, il est bon de rappeler ces faits pour que plus jamais dans ce pays, de telles crimes et exactions ne se reproduisent.

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