« Je n’ai pas de regret de n’avoir pas eu d’enfant »
« Je ne prends pas mes hommes au berceau »
« Je ne crains pas la mort »
« Abidjan est devenue jolie… »
*Son histoire avec Douk Saga et le vieux Ménékré
* Ce qu’elle dit de Ouattara, Gbagbo, Bédié et Houphouët
« Dieu m’a fait la grâce de chanter devant les présidents Félix Houphouët-Boigny, Bédié et Laurent Gbagbo et de manger avec eux aussi »
Après neuf ans d’absence du pays, vous étiez revenue en 2018 pour la présentation de votre album ‘’Sérédo’’. Quatre ans après, vous signez de nouveau, votre retour à Abidjan. Cette fois, êtes-vous de retour définitivement au pays ?
On ne dira pas tout de suite que c’est un retour définitif, mais c’est tout de même en prévision. Je suis effectivement là pour tâter le terrain (rire).
J’imagine que vous êtes revenue avec une nouvelle œuvre. N’est-ce pas ?
Bien sûr ! J’ai un single qui est prêt. Lequel single a été enregistré entre Paris et Washington avec Georges Kouakou et Freddy Assogba. L’œuvre passe déjà en boucle sur la radio Fréquence Vie, en attendant les autres chansons qui vont suivre, parce que j’ai également travaillé avec David Tayorault.
Pourquoi avez-vous fait le choix de la radio chrétienne Fréquence Vie pour la grande première diffusion de ce single ? Est-ce un choix délibéré ou parce que vous vous positionnez désormais comme un chantre ?
Mais non ! Sur l’album ‘’Népata’’, il y avait déjà des chansons à la gloire de Dieu. Sur tous mes albums, il y a toujours au moins, une chanson dédiée au Seigneur. Je n’ai jamais caché mes convictions et mes croyances religieuses. Et cette fois-ci, en lieu et place d’un album, c’est plutôt un single intitulé ‘’Ta gloire’’. Cette chanson est dédiée aux gens qui sont chargées et fatiguées.
C’est votre propre histoire que vous racontez donc dans cette chanson ?
C’est une histoire qui touche tout un chacun de nous. Chacun passe par des moments difficiles. Et comme j’ai l’habitude de le dire, les grandes bénédictions sont précédées souvent par les grandes épreuves. C’est à ces moments-là qu’on implore véritablement la grâce de Dieu. Sinon, ce n’est pas mon histoire personnelle que je chante.
À vous entendre, vous êtes véritablement ancrée dans la foi chrétienne. Est-ce envisageable qu’au soir de votre carrière, vous décidez, à l’instar de Claire Bahi, d’opter pour le ministère de chantre ?
Déjà, dans la première version de la chanson que j’avais dédiée aux Éléphants, ‘’Ayossé’’ était une chanson dédiée à Dieu. À ce titre, je peux dire que j’ai été le premier chantre de Côte d’Ivoire. Je rendais gloire à Dieu dans cette chanson et heureusement, elle a fédéré tous les Ivoiriens et c’est après que je l’ai adaptée à la CAN en soutien à notre équipe nationale. Par la suite, il y a eu toutes les autres chansons. En clair, je me suis toujours imprégnée des paroles et des écritures saintes pour donner des conseils.
« Je n’ai pas encore eu cette grâce de rencontrer le président Alassane Ouattara »
À vous écouter, on pourrait déduire que Chantal Taïba fait toute chose selon les recommandations de Dieu…
(Rire). Je suis bien consciente que la perfection n’est pas de ce monde. On recherche toujours cette perfection et dans cette quête, il peut nous arriver de trébucher, mais l’essentiel est de s’accrocher pour obtenir le salut de son âme. Quand on a compris cela, il y a beaucoup de choses auxquelles on ne prête plus vraiment attention.
Avec tout le potentiel que vous avez, une belle et grande carrière, vous avez décidé d’aller vous installer en Europe. N’est-ce pas un gâchis ?
Je ne pense pas que la carrière de Chantal Taïba a pu être un gâchis, parce qu’elle est partie en Europe. C’est bien parce que j’avais un problème de mobilité que je suis allée en Europe et non pas en aventure. Ce problème est survenu pendant la crise ivoirienne. Je suis restée trois années à lutter, je ne marchais plus. J’avais donc besoin, dans l’urgence, d’avoir d’autres soins. Tout au long de ma carrière, j’ai parcouru plusieurs pays d’Afrique, d’Europe et même une dizaine d’États aux États-Unis, on ne peut donc pas parler de gâchis. Quand je pense à la petite fille qui est née à la maternité de Tabou, qui est venue à Abidjan et qui a pu réaliser tout ce parcours, je ne peux que rendre grâce à Dieu.
Justement, on a ouï-dire que votre problème de mobilité était une attaque mystique…
Pour dire vrai, je suis tombée dans les escaliers de ma maison que j’ai habitée pendant dix ans. J’ai eu une triple fracture ouverte et lorsque je suis arrivée à l’hôpital, le médecin a eu du mal à croire que j’étais tombée dans les escaliers. Pour lui, c’était un accident de la circulation. Mais c’est Dieu qui l’a permis et toute la gloire lui revient.
Cet accident serait survenu après vos relations tendues avec votre ex-amie Tiane…
Ça, je n’en sais vraiment rien. Je ne peux que dire merci à Dieu qui a permis que tout cela arrive et non essayer de glorifier le nom du diable.
Chantal Taïba aime utiliser beaucoup de proverbes dans ses chansons. Comment expliquez-vous cela ?
Les proverbes, c’est la seule façon de dire des choses qui ne vont pas forcément plaire à des personnes plus âgées sans les blesser, c’est-à-dire qu’on arrive avec les proverbes, à dire des choses crues, sans toutefois blesser ni offenser celui à qui on s’adresse. C’est d’ailleurs, ainsi que les sages s’adressent à leurs contemporains.
On s’imagine que vous admirez bien Blé Goudé qui aime, lui aussi, recourir aux proverbes dans son langage…
(Rire). En tout cas, Blé Goudé dit qu’il m’apprécie. On dira donc qu’on s’apprécie tous les deux. J’aime beaucoup les proverbes.
Pour vous qui étiez absente du pays depuis quatre ans, comment avez-vous trouvé Abidjan à votre descente d’avion ?
Abidjan est devenue jolie en tout cas, il faut le reconnaître. C’est une réalité.
« Je n’ai pas eu la grâce de voir le président Gbagbo depuis une dizaine d’années »
Du président Houphouët-Boigny en passant par Bédié et Laurent Gbagbo, vous aviez de très bonnes relations avec tous ces chefs d’État. Quels sont vos rapports avec le président Alassane Ouattara ?
Effectivement, Dieu m’a fait la grâce de chanter devant les présidents Félix Houphouët-Boigny, Bédié et Laurent Gbagbo et de manger avec eux aussi. Je n’ai pas encore eu la grâce de rencontrer le président Alassane Ouattara, mais j’ai été invitée par son épouse en 2018 à l’occasion d’une journée en l’honneur des femmes des militaires et policiers.
Avec le président Laurent Gbagbo, c’était un attachement beaucoup plus fort, n’est-ce pas ?
Un attachement fort ? Il aimait beaucoup la chanson ‘’Le jour’’ donc à chaque fois que j’avais l’occasion de le voir, je la chantais pour lui.
Avez-vous pu le revoir depuis sa sortie de la CPI ?
Malheureusement non ! J’avais des problèmes de mobilité comme je le disais plus haut. Je n’ai pas donc eu la grâce de voir le président Gbagbo depuis une dizaine d’années.
Et vous comptez le revoir ?
Qui va refuser de voir un président ? (Rire)
Vous célébriez en 2002, vos 20 ans de carrière musicale. Envisagez-vous de célébrer cette année, vos 40 ans de carrière ?
Il y a en vue un concert pour retrouver mes fans et leur dire merci, sans toutefois mettre forcément un accent particulier sur la célébration d’un anniversaire de carrière. Sinon, effectivement, j’avais célébré mes 20 ans de carrière en mars 2002. Ça été une très belle fête !
Vous totalisez 40 ans de carrière, mais vous êtes restée aussi belle et toujours jeune avec une forme bien conservée. Quel est votre secret ?
(Rire). Merci du compliment. Je pense que c’est la grâce de Dieu. Depuis le début de ma carrière, j’ai opté pour le style juvénile. Cela, parce que chacune des chanteuses de ma génération avait un style particulier. Nayanka Bell, c’était les grandes robes du soir, Antoinette Konan, les pagnes baoulé, Diane Solo, c’était les maxi et donc, il fallait que je me fasse remarquer autrement en adoptant un style propre avec les petites robes et les jupettes. D’où, mes pseudonymes de ‘’la lycéenne’’, ‘’la collégienne’’.
Ce look jeune vous attire l’admiration à la fois des jeunes comme des personnes âgées. Cela s’est vu avec Douk Saga, ainsi que le Vieux Ménékré qui vous ont déclaré leurs flammes. Comment avez-vous vécu tous ces moments ?
(Rire). C’est bien et surtout flatteur quand on sait qu’on peut encore plaire. Malheureusement, dans le cas de Douk Saga, je ne prends pas mes hommes au berceau, mais je les préfère un peu plus mûrs.
« Je n’ai aucun regret dans tout ce que je fais »
Vous avez dû répondre favorablement aux avances de Ménékré qui, lui, est un homme mûr ?
(Elle se met à rire aux éclats). Effectivement, Ménékré est bien mûr, mais ça n’a pas marché. Il m’a déclaré sa flamme, mais ça n’a pas marché. Il m’a même dit que ses génies lui avaient dit que c’était moi sa femme. Le fait même qu’il ait parlé de génie, j’ai été effrayée. Peut-être que s’il n’avait pas parlé de génie, ça pouvait marcher, mais dès lors qu’il a axé son argumentaire sur cela, j’ai pris la tangente aussitôt. (Rire). Depuis cet épisode, on ne s’est plus revus.
Quelles sont vos plus grandes peurs ?
C’est de décevoir les gens qui ont mis beaucoup d’espoir en moi. Des gens qui se sentent soulagés et apaisés par mes paroles, ma façon de faire et de vivre. Je redoute donc qu’un jour, ces gens me disent qu’elles ont perdu leur temps en restant accrochés à moi. Je prie Dieu tous les jours afin qu’il me donne la sagesse de pouvoir continuer à faire du bien aux âmes blessées, en détresse et affamées.
La mort, vous la craignez ?
Non, du tout ! Le but de la vie, c’est le salut de l’âme et non la richesse, la beauté. Quand tu es certain du salut de ton âme, tu n’as peur de rien.
« Toutes les femmes ne sont pas appelées à se marier ou à avoir des enfants »
Comment voulez-vous donc passer à cette phase de la mort ?
Avant que je ne naisse, Dieu avait déjà tout prévu. Il ne revient donc pas à moi de dire comment je veux mourir. Tout est déjà planifié par Dieu.
Pour vous qui croyez tant au destin, avez-vous déjà fait votre testament ?
Mais vous avez des idées lugubres et macabres, qu’est-ce qui se passe ? (Elle se met à rire). La vie est égale à la mort. On ne doit donc pas s’y apitoyer, mais vivre à fond, l’instant présent.
Quel est votre plus grand regret ?
Je n’en ai pas et c’est pour cela que je pose des actes à retardement, parce que j’essaie de prévoir le résultat et lorsqu’il arrive, je l’assume. Il faut toujours prendre son temps avant de poser un acte pour ne pas avoir à le regretter. Je n’ai aucun regret dans tout ce que je fais.
Même de ne pas avoir eu d’enfant ?
Non, pas du tout ! On est aussi bien l’enfant de son géniteur que de son éducateur, comme on le dit. J’ai été éduquée par mon éducatrice et non par mes parents et donc, en retour, les enfants que j’ai éduqués à mon tour, sont les miens. D’ailleurs, toutes les femmes qui étaient avec Jésus-Christ, n’ont pas forcément été mères ou dans des foyers. En clair, toutes les femmes ne sont pas appelées à se marier ou à avoir des enfants. J’ai des enfants adoptifs et cela se passe très bien.
C’est donc ce qui justifie votre engagement dans les œuvres caritatives ?
Je suis engagée dans ces œuvres depuis 1985. Pendant la crise de 2002, j’ai créé une cellule pour accueillir les enfants qui venaient des zones sinistrées. J’ai aussi créé une ONG qui collabore avec la mairie de Rouen en France. C’est de ma nature de partager le peu que j’ai et cela fait du bien de sentir que nos actions rendent heureuses, des personnes dans le besoin.