Onze jours après le processus, l’initiative citoyenne des élections apaisées en Côte d’Ivoire (ICEA-CI) dresse un bilan satisfaisant de l’opération et « invite les acteurs politiques et les partenaires de la société civile ivoirienne à maintenir le dialogue avec le Gouvernement et la CEI pour aplanir toutes les autres difficultés qui pourraient entraver la bonne organisation de la présidentielle d’octobre 2025 ». Ci-après l’intégralité de la déclaration.
I- Les faits
La Commission électorale indépendante (CEI) vient d’accomplir, au titre de l’année 2024, l’opération annuelle de Révision de la Liste électorale (RLE) telle que prescrite par la loi portant Code électoral en Côte d’Ivoire. Cet exercice prévu du 19 octobre au 10 novembre a été prorogé au 17 novembre 2024.
Au terme de l’opération qui aura duré un mois, le bilan communiqué par la CEI fait état de 1 461 081 requérants enregistrés dont 943 157 nouveaux électeurs ou primo-votants inscrits. Selon l’opérateur, ce chiffre provisoire de « primo-votants » enregistrés cette année marque « une progression encourageante » par rapport au chiffre du même exercice opéré en novembre 2022 et qui n’avait enregistré que « 575 489 nouveaux électeurs ». L’accroissement est donc de 367 668 primo-votants, soit environ 64% par rapport à 2022.
II- Nos constats
Malgré ces chiffres notables, les appréciations divergent sur le succès de l’opération parce que l’objectif affiché était un potentiel de « 4,5 millions de nouveaux majeurs ». Aussi, des organisations réclament-elles « un autre délai de prorogation» auquel le Gouvernement semble marquer son refus.
En effet, le Parti des Peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI), par la voix de son Président exécutif, le ministre Sébastien Danon Djédjé, a réitéré, au cours d’une conférence de presse tenue le 21 novembre 2024, sa demande « d’une opération de RLE sur trois (3) mois », estimant que « des milliers de requérants ont été laissés pour compte ». De leur côté, des cadres du Parti démocratique de Côte d’Ivoire, Section du Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA) révélaient le 15 novembre 2024 à Yamoussoukro, capitale politique du pays, que « 877 demandes d’extraits de naissances qui devraient aboutir à des certificats de nationalité étaient bloquées jusqu’à la date de clôture de la RLE ».
A ces demandes de prorogation exprimées par l’opposition ivoirienne, le Gouvernement, par la voix de son Porte-parole, le ministre Amadou Coulibaly, a opposé une fin de non-recevoir : « La RLE ne peut être prolongée éternellement », a déclaré le ministre au sortir du Conseil des ministres du jeudi 21 novembre 2024. Ces déclarations ne sont pas les signes d’un futur environnement électoral rassurant.
III- Nos analyses
Au terme de cette RLE 2024, Initiatives pour des Elections apaisées en Côte d’Ivoire (ICEA-CI) note que ni la CEI, ni le Gouvernement ne proclament avoir résolu les difficultés éprouvées par les citoyens pour acquérir les pièces nécessaires à leur enrôlement sur la liste électorale, à savoir les extraits de naissance, certificats de résidence, certificats de nationalité, cartes nationales d’identité, etc. En amont, ces difficultés ont eu pour noms, entre autres entraves, « l’engorgement de demandes dans les services administratifs des mairies, sous-préfectures, commissariats de police et tribunaux » ; en aval, elles ont rendu « le délai de recensement trop court », soulignent les acteurs et observateurs.
De toute évidence, la CEI a pris elle-même la juste mesure de ces difficultés puisqu’elle a prorogé le délai de la RLE d’une semaine. Ce délai de sept jours a certes permis l’engouement constaté dans les centres d’enrôlement, lors des derniers jours de cette opération, mais il tend à justifier qu’il existerait effectivement une quantité non négligeable de demandeurs non satisfaits.
IV- Notre position
De tout ce qui précède, et conformément à sa déclaration du 13 juin 2024 appelant à des actes pour une élection présidentielle apaisée en 2025, ICEA-CI, ONG fermement engagée pour des élections sans conflits dans notre pays :
1- Se réjouit de noter avec la CEI que la RLE 2024 a connu un accroissement de près de 64% par rapport à la RLE 2022, du fait de la mobilisation de tous les acteurs autour de cette opération, et sûrement en raison de l’approche de la présidentielle de 2025 ;
2- Note les efforts déployés par la CEI pour l’accomplissement de la RLE 2024, en vue d’aboutir à la confection d’une liste électorale consensuelle ;
3- Encourage la CEI à reconnaitre que de nombreux pétitionnaires n’ont sûrement pas pu se faire enrôler en raison des difficultés administratives relevées ;
4- Recommande à la CEI de proposer au Gouvernement, pour un délai raisonnable et consensuel à convenir avec les acteurs, un plan de rattrapage pour les demandeurs laissés pour compte de la RLE 2024 ;
5- Invite les Acteurs politiques et les partenaires de la Société civile ivoirienne à maintenir le dialogue avec le Gouvernement et la CEI pour aplanir toutes les autres difficultés qui pourraient entraver la bonne organisation de la présidentielle d’octobre 2025.
6- Demande respectueusement au président de la République, SEM Alassane Ouattara, garant de la stabilité nationale, d'utiliser les pouvoirs que lui confère la Constitution pour permettre au maximum de citoyens ivoiriens de prendre part à la prochaine élection présidentielle, pour une paix durable dans le pays ;
Feu le Président Félix Houphouët-Boigny, premier président de la Côte d’Ivoire indépendante, disait : « La paix, ce n'est pas un vain mot, c'est un comportement ». En ce moment charnière de la vie de notre pays, le triste souvenir des joutes politiques passées doit nous incliner à plus d'humilité, d'entente et de dialogue. Aucun sacrifice n’est de trop si nous voulons véritablement faire de notre pays un creuset de paix et un modèle de démocratie.
Fait à Abidjan, le 27 novembre 2024
Pour l’ONG ICEA-CI
Honorable Massany BAMBA
Présidente