Politique

FACI : La vérité sur l'affaire des soldats ayant perçu leurs soldes de départ volontaire à la retraite

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Depuis quelques mois, des anciens soldats ayant fait valoir volontairement leur droit à la retraite grognent. Sur les réseaux sociaux, leur porte-parole, ex-maréchal des logis, Sylvestre Yavo, dénonce ce qu'il qualifie "d'injustice" à leur égard. Pour comprendre les faits, il faut remonter en 2003. Enquête.

Cette année, la Côte d'Ivoire fait face à une rébellion armée. À l'appel de l'ancien leader de la galaxie patriotique, Charles Blé Goudé, rentré fraîchement de l'Angleterre, des milliers de jeunes se font enrôler dans l'armée en 2003. Au départ, ils ne perçoivent qu'une prime appelée Haut-les-cœurs. En 2007, suite aux accords politiques de Ouagadougou, ils sont intégrés dans l'armée. Selon les textes relatifs aux pensions dans les armées, ils sont pris en compte comme ayant intégré l'armée depuis 2003. La crise prend fin en avril 2012. Dans le cadre de la réforme de l'armée, le gouvernement lance, en 2017, 2018 et 2019, le projet de départ volontaire à la retraite. Ceux qui adhèrent au projet devront percevoir au départ 15 millions de Fcfa. Dans l'armée, la manne attire de nombreux soldats qui décident de partir. Le contingent 2003 s'enregistre et est aussitôt pris en charge par l'Institution de prévoyance sociale Caisse générale des retraités agents de l'Etat (IPS-CGRAE). 

Une partie du contingent recrutée en 2003 fait partie de la première vague de départ volontaire en 2017. 


Selon les règles en vigueur, le militaire totalisant au moins 15 ans de service reçoit une pension de retraite. Quant à celui ayant moins de 15 ans, il perçoit une solde de réforme, soit le reversement de ces cotisations au nombre d’années de service capitalisées. Une partie du contingent recrutée en 2003 fait partie de la première vague de départ volontaire en 2017. Totalisant 14 ans, ils perçoivent, en plus de 15 millions de Fcfa, en moyenne 8,8 millions par personne au titre de la solde de réforme. Cette manne, somme toute importante, aiguise les appétits.

La solde de réforme aiguise les appétits

En 2018, certains éléments du même contingent s’inscrivent au programme de départ volontaire. Après avoir perçu les 15 millions de Fcfa, ils se présentent à la CGRAE où ils sont informés qu’ils sont éligibles à la pension  de retraite parce que totalisant 15 années de service. Ils n'ont donc pas droit aux 8,8 millions de Fcfa de leurs camarades partis en 2017. Ils ne sont pas d'accord. Ils décident alors de faire du bruit afin qu'on mentionne qu'ils ont pris service à partir de 2007, date de leur prise en compte en solde, au lieu de 2003 ; de sorte à totaliser moins de 15 ans de service et être éligibles à la solde de réforme pour percevoir les 8,8 millions de Fcfa en plus des 15 millions de Fcfa déjà perçus. Or, la solde de réforme ne donne droit à aucune pension.

La CGRAE leur demande de s'adresser à leur ministère de tutelle 

La CGRAE leur demande de s'adresser à leur ministère de tutelle qui établit les pièces justificatifs de la carrière et lui transmet les dossiers en vue de leur traitement. Des discussions commencent alors au Ministère de La Défense avec leurs délégués, la sous-direction des pensions s’employant à leur faire comprendre que c’était un avantage accordé aux militaires que soient prises en compte les années de service effectif et non les années de cotisation. Et que cette règle avait été appliquée à leurs prédécesseurs. Le ministre d'Etat, ministre de la Défense d'alors, Ahmed Bakayoko, après les avoir écoutés plaider pour une solde de réforme plus avantageuse pour eux dans le cadre de projets de réinsertion économique qu’ils souhaitaient mettre en œuvre, décide de prendre un arrêté pour leur permettre d'avoir leur argent. Mais avant, indiquant clairement qu'il s'agit d'un renoncement volontaire à la pension au profit de la solde de réforme. Le faisant les autorités de tutelle voulaient se prémunir contre leur mauvaise foi. 

 

Ils ont sacrifié des années de service pour de l'argent

Après les échanges concluants au ministère de la Défense, les soldats retournent à l'IPS-CGRAE avec l'arrêté ministériel obtenu. Le directeur de l'institution fait signer, à son tour, à chaque soldat, à titre préventif, un document manuscrit d'engagement individuel relatif à leur consentement à percevoir une solde de réforme au lieu de la pension de retraite. Ce qui fut fait. Les soldats perçoivent en moyenne 6,6 millions de Fcfa par personne. Ayant constaté qu’ils percevaient moins que leurs camarades partis l’année précédente, les intéressés formulent des réclamations, oubliant qu’ayant exigé comme date d’entrée en service 2007, au lieu de 2003 comme ceux-ci. Dans la logique, ils avaient donc moins d’années de service prises en compte dans le calcul de la solde de réforme. Ils vont alors saisir le tribunal de première instance du plateau et le grand médiateur de la République. Après présentation des justificatifs par la CGRAE, ils seront déboutés devant ces deux instances.

Le début du chantage

De façon épisodique, ils continueront de venir manifester à la CGRAE contre ce qu’ils considèrent comme une injustice. Excédée par leur présence bruyante dans ses locaux et alentours, et conformément à sa politique sociale, la CGRAE décide d’entamer des discussions avec eux. Plusieurs réunions sanctionnées par des PV seront organisées. Un terrain d’entente est trouvé : ils perçoivent en plus des 15 millions et 6,6 millions de Fcfa de la CGRAE : une aide de trois millions (3.000.000) de francs CFA pour l’ex- militaire ayant le grade de sergent-chef ; une aide de deux millions huit cent mille (2.800.000) francs CFA pour l’ex-militaire ayant le grade de sergent ; une aide de deux millions deux cent mille (2.200.000) francs CFA pour l’ex-militaire du rang et s'engagent à renoncer à toute contestation future.

Le chantage de trop

Deux ans plus tard, après avoir dépensé tout cet argent, les revoilà encore devant l'IPS-CGRAE pour réclamer une pension, au motif qu'ils ont intégré l'armée en 2003 et qu'un décret le prouve. Cette fois, ils n'obtiennent pas gain de cause, vu que leur attitude frise la mauvaise foi et le chantage. Sachant qu'ils n'ont aucune voie de recours et après avoir épuisé toutes les procédures judiciaires, le collectif décide d'attaquer les autorités ivoiriennes sur les réseaux sociaux.

 𝗦𝗼𝗶𝘁 𝘂𝗻 𝘁𝗼𝘁𝗮𝗹 𝗱𝗲 𝟮𝟴.𝟮𝟬𝟬.𝟬𝟬𝟬 𝗲𝗻 𝗺𝗼𝘆𝗲𝗻𝗻𝗲 𝗽𝗼𝘂𝗿 𝗰𝗵𝗮𝗰𝘂𝗻 𝗱𝗲𝘀 é𝗹é𝗺𝗲𝗻𝘁𝘀 𝗱𝗲 𝗰𝗲 𝗰𝗼𝗻𝘁𝗶𝗻𝗴𝗲𝗻𝘁.

L'ex-maréchal des logis, Sylvestre Yavo, multiplie vidéos sur vidéos pour attirer la compassion des populations. Oubliant de préciser que chacun des membres de ce contingent, et lui particulièrement, a perçu au titre du départ volontaire : une prime d’incitation au départ volontaire de 15.000.000 de Fcfa, d'un paiement Cgrae de 8.700.000 Fcfa, une solde de réforme de 6.700.000 Fcfa, d'une aide sociale de l'Etat de 2.000.000 de Fcfa et du "reversement entraide de fin de carrière du Fonds de prévoyance militaire de 4.500.000". Soit un total de 28.200.000 Fcfa en moyenne pour chacun des éléments de ce contingent. 

Comment peut-il donc parler d’abandon? Où sont les projets à financer dont ils parlaient, pour refuser la pension proportionnelle ? D'ailleurs, selon une source au sein du collectif, leur souhait est de réintégrer l'armée ou à tout le moins, réintégrer un autre corps paramilitaire. Ce qui est impossible au regard du fait qu'ils ont perçu près de 30 millions de Fcfa à l'issue du choix qu'ils ont délibérément opéré. Certains pensaient pouvoir tromper la vigilance des autorités militaires en allant s'inscrire pour le projet de recrutement dans l'armée. Malheureusement pour eux, organisation mise en place les a épinglés. Que leur reste-t-il ? Quasiment plus rien ! Sauf les réseaux sociaux, pour susciter une fausse compassion.

 Yacouba DOUMBIA

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