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Prétendant avoir été jugé à Abidjan après son acquittement par la CPI: Le gros mensonge de Gbagbo

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Laurent Gbagbo a-t-il sciemment mélangé les dates du procès d’Abidjan et celle de son acquittement par la CPI ?
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L’ex-chef de l’État, Laurent Gbagbo, est sorti de son silence pour se prononcer publiquement sur sa radiation de la liste électorale, qui défraie la chronique depuis le 20 mai 2023. À l’occasion, il a distillé, au mieux, une mésinformation, au pire, une fake news.

Le dossier de la radiation de l’ex-Président Gbagbo a connu un autre avatar hier, jeudi 8 juin 2023. C’est que l’ex-chef de l’État s’est rendu au siège de la Commission électorale indépendante (CEI) pour porter réclamation, suite à la décision prise par cet organe électoral de le radier de la liste électorale en raison de sa condamnation à 20 ans de prison pour braquage de la BCEAO, au plus fort de la crise postélectorale de 2010-2011. Bien avant, Laurent Gbagbo s’était muré dans un bruyant silence, préférant laisser le soin à ses lieutenants de protester vigoureusement contre cette décision prise par la CEI et qui a été portée à la connaissance d’une délégation de son parti le 20 mai dernier, à l’occasion d’une rencontre entre la CEI et les partis politiques. Au sortir des locaux de l’organe électoral, l’ex-chef de l’État, par ailleurs, président d’un jeune parti, le Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI), a fait une adresse à la presse.

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À l’occasion, il s’est employé à exposer aux médias, les arguments qu’il a avancés pour soutenir sa requête de se voir réintégrer sur la liste électorale. Il a notamment insisté sur le procès à l’issue duquel il a été condamné à 20 ans de prison pour braquage de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), condamnation sur laquelle s’est fondée la CEI pour l’expurger de la liste électorale, conformément aux dispositions du code électoral. L’ex-chef de l’État a énergiquement rejeté les accusations portées contre lui et qui lui ont valu ce procès. C’est alors qu’il a laissé entendre que si procès il y a eu, ça ne peut qu’être un « procès politicien ». Il a, en effet, soutenu que ce procès est intervenu après qu’il a été acquitté par la Cour pénale internationale (CPI) devant laquelle il a été traduit suite à la guerre post-électorale, pour, entre autres, crimes de guerre et crimes contre l’humanité. « On m’a emmené à la CPI avec des tonnes de chefs d’accusations : crimes contre l’humanité, crime de guerre, viol (…) Je me suis défendu et j’ai gagné ! J’ai été acquitté. Quand on apprend que je suis acquitté à la CPI, clandestinement, on se cache et on met sur mon dos, une accusation. Non ! C’est trop politicien, ce n’est pas digne d’être appelé un procès ! », a protesté l’ex-chef de l’État. En disant cela, Laurent Gbagbo ne dit pas vrai. Et c’est peu dire. Car, il laisse entendre que le procès qui a abouti à sa condamnation à 20 ans de prison, a été suscité par le pouvoir juste après que celui-ci a été informé de son acquittement par la CPI et cela, pour le griller politiquement.

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À la vérité, le procès en question n’est pas intervenu après la décision d’acquittement de l’ex-chef de l’État : ni avant la première décision d’acquittement prise par la Chambre de première instance de la CPI, le 15 janvier 2019, ni après l’acquittement définitif prononcé par la Chambre d’appel de ce tribunal international, tombé le 31 mars 2021. En effet, le procès s’est tenu bien avant et le verdict a été rendu le 18 janvier 2018. Sur la question, il est aussi de préciser que ce procès au bout duquel Laurent Gbagbo a été déchu de ses droits civils a été appelé pour la première fois le 7 juillet 2015. En 2016, l’affaire a été renvoyée à plusieurs reprises avant que le verdict ne tombe en janvier 2018.

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Soit un an avant que la CPI ne prononce sa première décision d’acquittement et 3 ans avant qu’elle ne prononce l’acquittement définitif. Laurent Gbagbo a donc tout faux de dire haut que « quand on apprend que je suis acquitté à la CPI, clandestinement, on se cache et on met sur mon dos, une accusation » et donc, que ce « procès (est) trop politicien ». Mieux, ceux qui parlent d’amnistie ciblée se foutent aussi un doigt dans l’œil. Pour rappel, l’ordonnance portant amnistie en faveur des détenus et personnes poursuivies pour des faits liés à la crise post-électorale a été signée le 6 août 2018. C’est bien longtemps avant même que la CPI ne donne son verdict dans le procès de l’ancien président. Dans un cas dans l’autre, le procès pour lequel Laurent Gbagbo a été condamné encore moins la loi portant amnistie sont intervenus bien longtemps avant la décision d’acquittement. D’où vient-il que Laurent Gbagbo vienne faire cette affirmation aussi rocambolesque et ubuesque sur une affaire qui a été suivie par tout le monde ? C’est au moins une mésinformation, au plus une infox. Sans doute a-t-il été induit en erreur par un trou de mémoire compréhensible pour une personne de son âge ou une volonté manifeste de rouler encore l’opinion dans sa légendaire farine.

Assane Niada

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