Politique

Contribution/PPA-CI : Les stigmates du retard historique et politique.

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Président-fondateur du Think-tank et de l’association Initiatives pour la démocratie et le Développement Endogène en Afrique-Côte d’Ivoire (IDDEA-CI)
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Une année et demi après sa création, le Parti des Peuples africains de l’ancien président Laurent Gbagbo peine à gagner du terrain. Dans cette contribution, le philosophe et analyste politique Alexis Dieth fait une radioscopie de cette formation politique qui peine à reformater son disque et sa conception populiste de la démocratie

La représentativité démocratique ne s'évalue pas et ne se proclame pas dans les rues. Elle s'évalue et se compte dans les urnes. La légitimité démocratique d'un parti politique résulte de sa représentativité sociale consacrée, a posteriori, par les urnes. Comme l'on pouvait le craindre, le PPA-CI, semble-t-il, ne s'est pas affranchi de ses démons internes, de son anti-politique de "l'assaut final », inhérent à sa nature de mouvement de guerre de libération. Le parti de Monsieur Laurent Gbagbo n'a pas pu se transformer en parti politique et n'a pas modifié sa vision du pouvoir et de la lutte politique. Ne s'étant livré à aucun aggiornamento critique interne, le PPA-CI de Monsieur Laurent Gbagbo est demeuré figé dans sa nature de mouvement de guerre de libération soi-disant anti-colonialiste. Promus cadres dirigeants du parti, les ex-étudiants ou miliciens remobilisent les stratégies, les discours et les thématiques et les éléments de langage du populisme qui en est le trait saillant. Combattant pour une soi-disant "seconde guerre d'indépendance, la vision de la politique ‘‘gbagoïenne’’ est restée engoncée dans la conscience victimaire d'un mouvement de libération soi-disant anti-colonialiste qui entend renverser un pouvoir illégitime pour réparer l'injustice d'une invasion coloniale.

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La vision du pouvoir et de la lutte politique par le PPA-CI n'est pas celle d'un parti politique national doté d'une représentativité sociale, qui entend prendre le pouvoir d'État en évinçant ses concurrents dans les urnes pour mettre en œuvre son propre programme politique et économique d'intégration nationale. Les échecs électoraux récurrents du PPA-CI qu'il ne parvient pas à interpréter rationnellement et dont il ne parvient pas à tirer les leçons requises, le caractère suranné et anachronique de son discours politique, traduisent un décalage et un retard historique et culturel du PPA-CI. Le parti de Monsieur Laurent Gbagbo est en retard des transformations et des innovations historiques, culturelles, sociologiques et politiques fulgurantes effectuées par la Côte d'Ivoire depuis une décennie. Il en est resté à la vision de la politique autocratique de mobilisation démagogique des masses par des avant-gardes auto-proclamées alors que la Côte d'Ivoire et les Ivoiriens en sont à la politique démocratique de concurrence des programmes et des projets sociétaux partisans.

Quel projet sociétal, quel programme économique, quel programme politique et social et quel discours politique national et rassembleur de gauche le PPA-CI de Monsieur Laurent Gbagbo incarne-t-il aux yeux des Ivoiriens pour rallier la majorité de la population ivoirienne par-delà les partis ?

Le PPA-CI de Monsieur Laurent Gbagbo en est resté à la politique guerrière de l'assaut final alors que les Ivoiriens en sont à l'ère de la politique démocratique de l'élection des programmes et des projets sociétaux dans les urnes.

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La conception populaire de la démocratie et la voie de la rue contre la conception représentative de la démocratie et la voie des urnes. Les Ivoiriens ont culturellement évolué vers une vision parlementaire de la démocratie où le peuple exerce le pouvoir à travers ses représentants élus à la majorité des voix des urnes.

Le PPA-CI est, quant à lui, resté mentalement figé dans une vision populaire de la démocratie (la source de son POPULISME) où le peuple exerce directement le pouvoir dans la rue. Cette conception populaire de la démocratie le conduit à situer le critère et la source de la légitimité démocratique dans la mobilisation des masses et dans l'agitation populaire. D'où son indifférence dangereuse à la légitimité électorale, sa propension à contester le résultat des urnes lorsque ces résultats lui sont défavorables et à sa tendance à s'octroyer le pouvoir d'État par la force et la violence. Cette vision autocratique populaire de la démocratie a toujours conduit le PPA-CI à croire qu'il incarne la totalité du peuple ivoirien et à s'estimer a priori majoritaire en Côte d'Ivoire en dépit du résultat des urnes.

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Jusqu'à preuve du contraire, la représentation parlementaire du PPA-CI à travers EDS son faux nez se compte sur les doigts des deux mains. Le PPA-CI fut électoralement étrillé lors des législatives de mars 2021 en raison de sa vacuité programmatique notoire et des casseroles de sa gouvernance calamiteuse passée. Il est quasi certain que les municipales à venir confirmeront ce déficit abyssal de représentativité sociale et politique qui ne sera jamais comblé par l'agitation, la propagande, la désinformation et les tentatives de manipulation psychologique. Quel projet sociétal, quel programme économique, quel programme politique et social et quel discours politique national et rassembleur de gauche le PPA-CI de Monsieur Laurent Gbagbo incarne-t-il aux yeux des Ivoiriens pour rallier la majorité de la population ivoirienne par-delà les partis ? En quoi la foule des militants du PPA-CI incarnerait-elle la totalité du peuple Ivoirien ? Comment le PPA-CI compte-t-il "arracher le pays des mains des apprentis" dixit Monsieur Koné Katinan, l'un des agitateurs du parti de Monsieur Laurent Gbagbo qui fait l'impasse sur la gouvernance calamiteuse du parti entre les années 2000 et Mars 2011 ?

 Dr Alexis DIETH, Diplômé de l’Université René Descartes de Poitiers (France).

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