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Interview/ Jules N'Takpé sg SYNAVTC : Des chauffeurs de vtc sont agressés et dépouillés"

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Le Sg du SYNAVTC a signalé au cours de cette interview, les formes d’agressions dont les chauffeurs de VTC sont victimes. (Photo : VK)
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Depuis quelques années, les Abidjanais ont recours à un nouveau mode de transport interurbain appelé VTC, pour Véhicule de transport avec chauffeur. Comment se créent ces entreprises ? Comment sont recrutés et rémunérés les chauffeurs ? Quelles garanties de sécurité pour les clients ? Ce sont là des questions auxquelles répond le secrétaire général du syndicat national des chauffeurs VTC de Côte d’Ivoire(SYNAVTC), Jules N’takpé Boka.

« Les clients doivent refuser d’emprunter un VTC sans passer par les applications »

 Depuis quand êtes-vous présents sur le marché de Côte d’Ivoire ? 

Nous existons depuis 2017. Mais notre récépissé a été signé en 2021 et publié dans le journal officiel quelques années plus tard. Nous avons une base de données de tous les chauffeurs VTC. Avec le mode voiture de transport avec chauffeurs (VTC), nous avons des applications qui nous accompagnent. Dans le VTC, il y a trois compartiments. D’abord, les opérateurs qui sont les entrepreneurs, ce sont eux qui mettent les véhicules à la disposition ; ensuite, les chauffeurs et enfin les applications de mise en relation (Yango, Uber, Heetch…). Dès que le chauffeur s’inscrit dans une plateforme, on lui ouvre un compte et on lui met les références de la voiture à disposition. A ce niveau déjà, pour que le chauffeur puisse avoir un compte, il est impératif pour lui de s’inscrire sur la plateforme de l’application. Les plateformes sont en lien avec les entreprises de transports. Pour avoir un compte, il faut appartenir à une entreprise de transport légalement constituée. Les VTC sont un ensemble d’opération, les entrepreneurs qui achètent des véhicules, les applications de mise en circulation et les chauffeurs qui sont les prestataires.

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Comment se crée une entreprise de VTC ?

Une entreprise de VTC est avant tout une entreprise de transport. Il faut être légalement constitué comme une entreprise de transport. Avoir sa carte d’entreprise de transport. Il n’y a pas une loi à part pour favoriser la création des VTC. La seule chose qui fait la différence, c’est l’intégration de l’application. C’est la même loi qui régit les entreprises de transports et les VTC.

Votre présence sur le marché vous a valu quelques soucis avec les transporteurs déjà installés. Aujourd’hui où en êtes-vous avec cette situation ?

Normalement, quand nous avons commencé cette affaire de VTC, nous avons effectivement eu quelques grincements de dents chez les autres entreprises de transports dont les taxis compteurs d’Abidjan. On faisait croire que les VTC ne payaient aucune taxe, or ce qu’ils ignoraient c’est que nous payions les taxes sur l’exploitation des applications lors de la prestation du chauffeur. Le chauffeur VTC payait la taxe sans que les gens ne le sachent. En 2021, précisément au début du mois de novembre, les chauffeurs de taxis ont observé une grève sous prétexte que nous ne payons aucune taxe. Mais ce qu’ils ont oublié, c’est que nous ne sommes pas de la même corporation. On peut avoir des clients en commun mais nous n’avons pas le même mode opératoire. Chez nous, pour une réservation de transport, le véhicule, la marque, la couleur de la voiture, le numéro d’immatriculation sont connus, l’identité du chauffeur et les prix, la distance sont affichés. Nous espérons qu’ils ont compris.

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Comment vos chauffeurs sont recrutés ?

Selon le décret du 15 décembre 2021 du ministère des Transports, qui est l’autorité de tutelle, signé par le président de République, il est indiqué que les chauffeurs VTC doivent être formés et avoir un certificat d’aptitude de circulation routière (CACR), attesté par le Centre national des Métiers et de l’Artisanat. Par ailleurs, on vérifie le casier judiciaire du chauffeur pour voir s’il n’est pas un repris de justice ; il doit en outre avoir un permis valable pour la conduite. Les chauffeurs sont rémunérés à partir de leur solde. Au début, les choses allaient bien mais avec le prix du carburant en hausse, les embouteillages en à point finir et la défalcation qui a augmenté de 10%, on se retrouve à 18 %. 

Comment sont-ils rémunérés ?

Les chauffeurs sont rémunérés directement sur le terrain. Au niveau de l’application, le montant de la commande est déflaté de 15%. La commission qui revient aux entreprises de transport est de 3%. L’Etat, via les impôts, perçoit 4% dans les 15% qui reviennent aux promoteurs des applications. Il faut nécessairement au chauffeur un solde où sont prélevées les taxes dès qu’il reçoit une commande. Cependant, s’il le désire, il peut être payé par la carte qui est directement reversée sur son solde ou directement payé sur le terrain. Le véhicule que conduit le chauffeur est en location à raison de 20 000 FCFA par jour. Aussi, il remet le carburant à l’état initial. Il y a des contrats verbaux qui lient le chauffeur et les entreprises de transport.

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Comment s’assurer de leur probité morale ?

C’est vrai que nous n’avons pas de moyens conséquents pour attester la probité des chauffeurs mais il existe un minimum de moyens pouvant attester de la bonne foi des chauffeurs. Il y a une traçabilité au niveau de la commande qui permet aux chauffeurs de ne pas commettre des erreurs. Au niveau de la sécurité, nous pouvons dire que toutes les conditions sont garanties.

Sont-ils formés à la maîtrise du PFS après leur recrutement ou on leur exige une bonne connaissance du GPS avant qu’ils soient recrutés ?

Effectivement, lors du processus de recrutement, on donne des séances de formation à l’utilisation du GPS, à la maîtrise de la commande. Comment accepter une commande ? Comment valider et interrompre la commande ? Comment gérer le temps d’attente d’une commande ? Comment appeler le client ? Comment gérer le GPS au niveau de sécurité ? Il y a forcément une petite formation qui est faite au chauffeur. C’est vrai qu’au départ, ce n’est pas facile de s’adapter mais ils ont une base de données avant de commencer. Cela permet une traçabilité des mouvements du chauffeur. 

Le client peut-il entrer en contact directement avec le chauffeur de VTC sans passer par l’application ?

Ce serait un délit ! Normalement, avec le mode de fonctionnement du VTC, ce sont des réservations (commandes) qui sont faites. Si le chauffeur prend un client par voie détournée comme le font les taxis compteurs, il s’engage dans un délit. Ce n’est pas normal et le chauffeur VTC ne doit pas se prêter à ce jeu. Il doit attendre une commande. C’est interdit de prendre le client de façon successive. Dans la location des véhicules VTC, la loi qui régit le secteur dit que si le chauffeur s’obstine à cela et qu’il y a problème, il assume. Les chauffeurs sont bien conscients de ce fait. Et nous demandons aux clients de ne plus le faire parce que ce n’est pas sécurisé. 

Quels sont les horaires de travail journalier ?

Nous pouvons le dire avec le VTC, il n’y a pas d’heures précises. Nous circulons à toutes les heures. L’application est continuelle, il dépend maintenant de l’entreprise qui a des chauffeurs. Dans le contrat, que ce soit verbal ou écrit, sur lequel le chauffeur et l’entreprise se sont entendus, les heures de prestations sont définies. Sinon, pour toute personne qui veut travailler 24 h / 24 h, il n’y a pas d’heure parce qu’à tout moment il y a des commandes. C’est surtout pendant les nuits que les VTC travaillent le plus vu la sécurité dans le secteur.

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Est-ce que des particuliers peuvent s’inviter dans votre secteur d’activité ?

 Cela n’est pas normal. Selon la loi de 2003 sur le transport, une voiture de plus de 7 ans ne doit pas être introduite dans le système. Pour intégrer le milieu des VTC, il faut être un transporteur.

On constate que depuis un moment, les petits véhicules sont retirés au profit d’autres plus grands. Comment expliquez-vous cela ?

Comme le recommande la loi du 15 décembre 2021, signée par le président de la République, pour les VTC, il faut une voiture de 114 chevaux. Les prix chez les concessionnaires ont grimpé et varie entre 12 à 14 millions FCFA donc c’est un peu plus cher pour le transport, pour les entreprises et les entrepreneurs. Cela permet aux entrepreneurs de constater qu’il y a des échelons de commandes. Nous avons réussi à inscrire les petites voitures dans le système économique. Notamment la commande économique, confort et confort plus. Donc les petites voitures qui font la commande économique sont des voitures qui ne peuvent aller au-delà de 100 KM/H, au-delà d’Abidjan. Nous avons discuté avec le ministère des Transports parce qu’on trouve beaucoup de véhicules de ce genre et on y trouve beaucoup de jeunes qui, par le passé, n’avaient pas d’emploi, donc si nous voulons être regardants, beaucoup de famille seront au chômage.

Un même chauffeur peut-il travailler pour deux ou trois sociétés de VTC en même temps ?

Normalement le secteur est libéral et les chauffeurs ne sont pas embauchés. À tout moment, les entreprises peuvent les libérer. Un chauffeur peut avoir plusieurs comptes en effet : Uber, Yango, Heetch… S’il constate que sur telle application, il n’y a pas trop de commandes, il peut aller sur les autres applications.

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Rencontrez-vous des difficultés particulières sur le terrain ?

Oui, beaucoup. Des personnes prennent des puces qui ne sont pas identifiées pour passer des commandes et une fois le chauffeur est à leur niveau, elles l’agressent. Les agressions sont fréquentes dans les secteurs comme les environs du 16e arrondissement de Yopougon, Wiliamsville et Abobo. Ces malfrats utilisent les puces n’ont identifiées pour télécharger les applications, passent des commandes et agressent les chauffeurs. Nous avons enregistré dans le mois de décembre 2022 plus de 18 cas d’agressions dont des cas graves. Des chauffeurs ont été poignardés, tailladés à la machette, dépouillés de tous leurs biens, enlevés... Nous sommes en train de réfléchir à d’autres mesures pour que les chauffeurs soient en sécurité.

Réalisée par Venance Kokora                                               

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