L’une des leçons que nous aura laissées cette CAN, c’est que le sport et en particulier le football, peut être un puissant levier de consolidation de la cohésion nationale. A l’occasion de cette fête du football africain, l’on a senti une réelle communion entre les filles et les fils de ce pays. Tous étaient mobilisés pour porter la sélection nationale et cela sans distinction d’ethnie, de religion, de région encore moins d’obédiences politiques. Les antagonismes politiques ont été gommés comme par enchantement, faisant place à une union des cœurs.
Ferveur patriotique et fièvre spirituelle !
Autour du onze national, l’on a senti une ferveur patriotique que seul le football sait susciter et entretenir. Il faut espérer que les gouvernants capitalisent cet élan patriotique pour amener dorénavant les Ivoiriens à faire cause commune quand l’intérêt de la nation est en jeu.
Par ailleurs, l’on a senti, durant cette CAN, une propension à recourir à la prière ou à confier le sort des éléphants à Dieu. On a ainsi vu des communautés entières ou des individus dans les rues en appeler au secours divin afin que l’issue des rencontres de l’équipe nationale leur soit favorable. Une ferveur spirituelle qui a fini par faire vaciller les certitudes de ceux pour qui Dieu et la religion n’ont rien à voir au football. On a ainsi entendu des commentateurs de radios comme de télévisions étrangères céder aux spéculations autour des résultats inespérés arrachés par les éléphants au fil du tournoi. « Ils sont habités par quelque chose », « C’est de l’ordre du miracle ce qui se passe autour de cette équipe », « Il y a quelque chose de spirituel dans cette affaire », a-t-on entendu dire. Cette CAN aura donc agi comme un éventail pour raviver l’inclination des populations de ce pays à adorer Dieu. « Merci Dieu ! », a titré à juste titre un confrère en manchette, au lendemain de la finale remportée par les éléphants.
Parcours atypique et inspirant !
Des éléphants, dont le parcours durant cette compétition est en soi toute une leçon de vie. Peu d’Ivoiriens et d’observateurs pariaient sur leur victoire finale au début de la CAN. Des doutes que vont entretenir les résultats calamiteux enregistrés par cette formation au premier tour, lesquels ont manqué de peu de leur fermer les portes du second tour. Mais les voilà sauvés in extremis en étant repêchés comme dernier meilleur troisième grâce à une victoire du Maroc sur leur adversaire de l’ultime rencontre de la phase de poules. Ouf ! « On vaut rien, on est qualifiés ! » ou encore « On est déjà morts, on ne peut plus mourir », raillaient joueurs et supporters à chacune des rencontres qui vont jalonner la phase à élimination directe.
Coup sur coup, l’équipe méconnaissable du premier tour va sortir des adversaires plus joueurs et dont certains avaient les faveurs des pronostics : le champion en titre, le Sénégal ; la pimpante sélection du Mali, l’accrocheuse équipe de la RDC et le coriace Nigeria. « De la tombe au trône », « De Zéro à héros », ont titré des confrères après le sacre des éléphants, résumant si bien ce parcours inspirant de ceux-ci. Un parcours qui n’aura pas laissé indifférents les internautes. « On peut partir de rien et être au sommet », « Tant que le combat n’est pas terminé, ne t’avoue pas vaincu », « Ne jamais baisser les bras quelle que soit la situation », « L’humilité précède la gloire », tels ont les quelques enseignements qu’ils en ont tirés.
Ces messages insolites sur maillots
S’il y a une autre leçon à retenir de cette CAN, c’est l’exhortation à la valorisation des entraîneurs locaux et par-delà eux, des compétences nationales. La victoire des éléphants aura été aussi celle d’Emerse Faé, le fils du terroir, qui jouait les seconds rôles quand le sélectionneur national, le Français Jean-Louis Gasset, était aux commandes de l’équipe. Propulsé au-devant de la scène par la démission de Gasset, il a conduit les éléphants à la victoire finale. Par ses valeurs propres et en s’appuyant sur un collège de locaux. Moralité : au football comme dans bien des domaines, apprenons à valoriser les compétences nationales.
Last but not least : Comment ne pas s’arrêter sur cette propension des populations ivoiriennes à la dérision voire à l’autodérision, ce qui a contribué à donner à cette fête du football une allure de festival et donc lui a donné un cachet tout particulier. Que de messages floqués désopilants n’a-t-on pas lus sur les maillots ! On pouvait notamment lire sur celui d’un supporter : « Si on ne gagne pas, on vole la coupe » ou sur les maillots d’un couple : « Pain »/ « Condiments » ou encore : « Qui a mis huile sur riz de Zaha ? »/ « C’est Gasset ». Autant de messages insolites qui ont donné à cette CAN à l’ivoirienne un note humoristique.
Assane Niada