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Reportage/72H après le drame à l’Université de Cocody: Ce que les étudiants pensent de la thèse du crime par pendaison

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Décédé le samedi dernier, les circonstances de la mort de Diabagaté Ibrahim restent encore inconnues. (Photo : DR)
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Trois jours après le drame, l'Université Félix Houphouët-Boigny est toujours sous le choc. Les étudiants réclament la vérité.  

C'est le sujet qui défraie la chronique en ce moment sur le campus. Trois jours après le drame, suite au décès, le samedi 14 janvier dernier, de Diabagaté Ibrahim, étudiant en Master 1 de Sciences Physiques à l'UFR FAST (Faculté des Sciences et Technique) de l'Université Félix Houphouët-Boigny, la consternation se lit encore sur les visages des enseignants, des étudiants et autres. Les cours n'ont certes, pas été perturbés par le drame, mais ce lundi 16 janvier 2023, une question turlupine les esprits : qu’est-ce qui s’est vraiment passé ce vendredi-là ? Quelle est la cause réelle du décès de Diabagaté Ibrahim ? En attendant d’avoir des réponses claires, à l’issue de l’enquête qui a été ouverte par les services de police, les supputations gagnent du terrain.

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Il est 12h20. L'Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody a retrouvé son ambiance habituelle. Le mouvement des entrées et des sorties sur le campus ne faiblit pas. Sur les lieux du drame, à l’arrière du bâtiment U du nouveau site, là où l’étudiant a été retrouvé mort par pendaison, aucune indication particulière pour marquer la scène du drame. À l’intérieur du bâtiment, au bout du couloir, au niveau de la fenêtre au premier étage, celle qui a servi de point d’attache pour le suicide, on peut apercevoir deux chaises endommagées et une natte de carton disposée au sol. 

Consternation générale

Dans la salle juste à côté, plusieurs étudiants attendent impatiemment leur enseignant pour un cours. Au balcon, deux étudiants papotent pour tuer le temps. « Nous avons appris la nouvelle sur les réseaux le samedi. C’est un gros choc pour nous les étudiants. Moi, je pense que cette affaire de suicide n’est pas claire. Quelqu’un qui se suicide, qui est retrouvé quasiment nu avec des blessures sur le corps », s’interroge Anne N’Guessan, étudiante. Ici, de façon générale, la théorie du suicide est balayée du revers de la main. C’est plutôt celle   de l'assassinat qui plane sur le campus de Cocody. Entre amis, condisciples, par petits groupes, partout au sein de l’Université, chacun y va de ses explications et démonstrations pour justifier cette autre thèse. « Je pense qu’il y a quelque chose qui nous échappe. Il y a beaucoup d’inconnus dans cette affaire. Pour ce que je sais, quand quelqu’un se pend, il a la langue qui sort. Ça n’a pas été observé. Sur le corps, on a vu des marques de blessures. Moi, j’ai l’intime conviction qu’il a été assassiné et qu’on a voulu maquiller le crime par cette scène », se dit persuadé Christian Loua, étudiant.

Accusée, la FESCI se défend   

La thèse de l’assassinat est la plus récurrente et les soupçons pèsent contre la Fédération Estudiantine et Scolaire de Côte d'Ivoire (FESCI), à telle enseigne qu’elle s’en est sentie offusquée dans un communiqué signé de son premier responsable, Saint-Clair Allah. « Ce qui n'est pas normal et totalement inacceptable, ce sont les accusations sans aucun fondement dont elle est victime sur les réseaux sociaux », s’indigne la FESCI. Qui dit attendre impatiemment les résultats de l’enquête « afin que toute la lumière soit faite et que, s'il y a lieu, les responsabilités soient situées. Par ailleurs, elle dit « se réserve (r) le droit, à terme, de saisir la justice contre tous ceux qui se seront rendus coupables de diffamations à son égard ».

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Au département de Sciences Physiques à l'UFR FAST (Faculté des Sciences et Technique), la disparition de Diabagaté Ibrahim, au-delà de la douleur des uns et des autres, suscite beaucoup d’interrogations, surtout que ce décès est le deuxième en l’espace d’une semaine au campus de Cocody. Selon ses responsables pédagogiques, Diabagaté Ibrahim a toujours été un étudiant assez réservé et calme. Il n’a jamais été cité, n’a jamais trempé dans des affaires louches ou répréhensibles. Même s’il reprenait cette année, le Master 1, il est considéré comme un étudiant travailleur, rigoureux avec un rendement acceptable, et ce depuis, la Licence 1.

Un étudiant calme et très réservé  

« C'est une grosse douleur pour nous. Nous l'avons connu depuis la première année. Il a toujours été un étudiant calme et très réservé. C'est une nouvelle très difficile pour tous les étudiants et pour les encadreurs également. Il a repris le Master 1, mais il est difficile d'imaginer ce qui s'est passé et les raisons réelles », déclare une des responsables à la scolarité Sciences Physiques-Chimie. En attendant les résultats de l’enquête, des instructions fermes ont été données aux responsables de l’Université, ainsi qu’aux étudiants proches du défunt, afin qu’ils se gardent de trop en dire sur cette scabreuse affaire. Mais, selon Joël, délégué de niveau (Master 1), ce drame est vécu par lui et ses autres camarades, comme un gros coup de massue sur la tête.

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« Nous avons échangé il y a deux semaines en arrière. Il a voulu savoir un peu plus sur la programmation des examens, parce qu'il voulait se préparer », révèle-t-il. Avec ces révélations, on peut dire que Diabagaté Ibrahim se projetait résolument dans le futur. « Nous sommes sous le choc, nous nous posons tous, mille et une questions. Le vendredi, un jour avant son décès, nous avons eu cours. Il n'y avait rien d'inhabituel dans son comportement. Le même jour, il a dormi sur le campus et le matin, nous avons appris la nouvelle. Nous avons reçu des instructions fermes, de ne pas en dire plus », nous apprend Joël. Interrogé, le Doyen de l’UFR, Pr Grafoute Moussa, n’a pas souhaité réagir, arguant que l’enquête était en cours. Au niveau de la présidence de l’Université, il n’a pas été possible d’échanger sur le sujet avec le secrétaire général. Son secrétariat a laissé entendre qu’il était en réunion.  

Manuel Zako

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