Société

Portrait : Dr Irié Lou Gohi Brigitte Sur les traces de celle qui fait la ‘’guerre’’ aux fautes de grammaire

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Dr Irié Lou Gohi Brigitte a obtenu le Baccalauréat A2 et entre au Centre d’animation et de formation pédagogique (CAFOP) supérieur de Yamoussoukro en 1989. Elle obtient son Certificat d’Aptitude Pédagogique (CAP) en 1991. Trois années plus tard, elle décroche une Licence en grammaire et entre la même année, à l’Ecole normale Supérieure (ENS) où elle sort avec un CAP-CPL pour être professeure de CAFOP. Désormais, Docteure en grammaire normative et descriptive, elle fait la "guerre" aux fautes.

 

Docteure d’État en grammaire normative et descriptive, Dr Irié Lou Gohi Brigitte se définit comme l’experte qui démontre ce qu’on dit et ce qu’on ne dit pas, ce qu’on écrit et ce qu’on n’écrit pas. Tout cela, dans un ensemble de règles de conjugaison et de grammaire. « Depuis le Cours moyen 1, lorsque j’étais à l’école des sœurs à Treichville à Abidjan, j’ai eu de la passion par cette sous-discipline du français parmi les onze autres. Je considère que cette sous-discipline est celle autour de laquelle les autres gravitent. J’ai eu de la passion pour elle, parce qu’elle donne les règles usuelles de la communication orale et écrite », explique-t-elle.

 

Quand on lui demande comment et pourquoi elle est passée d'institutrice à Dr en grammaire, elle répond simplement : « La grammaire normative, c’est de la maternelle jusqu’à l’agrégation. Si tu ne passes pas par le primaire, tu ne peux pas passer l’agrégation, puisqu’il y a de nombreuses étapes de l’enseignement de la grammaire normative à franchir ».

 

En ce qui concerne les épreuves endurées, la grammairienne avoue avoir eu des grosses difficultés lors de sa formation. « J’ai affronté des épreuves difficiles et douloureuses. Pour une formation qui devrait se faire sur cinq ans, j’y ai passé 14 ans de ma vie. En effet, le premier encadreur qui était linguiste, est décédé pendant la formation (7 ans). Le deuxième qui était censé prendre le relais, était lui, un grammairien. Il a donc décidé que je devais reprendre le travail entièrement. Ce fut 7 ans de plus, c’est-à-dire 14 ans de formation », avoue-t-elle.

 

Se définissant comme une femme qui ne recule devant rien, elle explique avoir continué sa formation en faisant preuve d’abnégation. Pour elle, la communication orale et écrite, comme dans l’Antiquité, est un facteur déterminant pour communiquer et se faire comprendre à travers une langue. « Cette langue de Molière m’a beaucoup fascinée. Ce choix pour la grammaire n’a pas été guidé par un effet du hasard. Avec le temps, les autres matières n’ont pas pu m’influencer. Lorsque je me suis familiarisée avec les fautes des élèves, je me suis formée pour pallier les fautes graves que j’entendais et que je lisais. Je ne supportais plus d’entendre quelqu’un s’exprimer de façon désinvolte, dans un langage qui entorse à la grammaire normative et descriptive. Cette manière de parler n’honore pas les enseignants que nous sommes », fait savoir la grammairienne.

 

Une enseignante chevronnée

 

Selon elle, ce sont 14 ans de recherches ponctuées de trois catégories d’ouvrages de cinq tomes. « J’ai travaillé pendant 14 ans dans mes recherches pour sortir cinq tomes sur l’oral. J’ai privilégié l’oral. Pour moi, l’oral précède l’écrit. Les élèves et étudiants de Côte d’Ivoire parleront normalement le français dans n’importe quel milieu sans tergiverser, sans balbutier », a-t-elle promis.

 

À l’en croire, la raison pour laquelle les élèves et étudiants s’expriment et/ou écrivent moins bien en français, c’est parce que les bases minimales n’ont pas été bien enseignées dès les cours préparatoires. « L’instituteur est un modèle. C’est lui qui inculque les bases du savoir au sujet apprenant dès les cours préparatoires. Après 1980, avec l’avènement de l’enseignement télévisuel, il y a eu certains privilèges. Il fallait associer l’oral et l’écrit. Alors, les bases minimales n’ont pas été procédées de façon escomptée, avec l’enseignement télévisuel. Il faut donc rattraper cette promotion », a-t-elle soutenu.

Au-delà des ouvrages utilisés au programme scolaire qui ont, selon elle, une valeur pédagogique, elle lance un appel à ses collègues enseignants du primaire comme du secondaire à acheter ses ouvrages qui viennent comme un renfort. « L’oral, l’écrit et des exercices corrigés. Ces trois catégories d’ouvrages permettront aux enseignants d’orienter leurs enseignements sur les mots usuels sur lesquels les enfants font assez de fautes. Ils vont pouvoir penser leur enseignement de la grammaire normative et descriptive en réservant une large part aux mots usuels. Je mets ces livres à la disposition de mes amis instituteurs et professeurs de français. Il n’y a que les enseignants qui soient habilités à exploiter ces ouvrages à leur juste valeur », confie-t-elle.

Pour Dr Irié Gohi Lou Brigitte, l’initiation des états généraux par le Prof. Mariatou Koné, ministre de l’Education Nationale et de l’Alphabétisation, est un acte salutaire. « Il faut saluer les actions de la ministre. C’est vraiment un travail de fond qui est en train d’être accompli par le ministère. Nous avons une ministre sur le terrain pour galvaniser ses ‘’troupes’’. À la fin de tout le travail, nous sommes confiants que le système scolaire ivoirien renaîtra », conclut l’experte en grammaire normative et descriptive.

 

Non sans révéler que cette formation universitaire en grammaire normative a changé sa vie. « Aujourd’hui, par amour pour cette discipline, je suis connue à travers le monde entier, en Afrique, en Europe, en Amérique, en Océanie, etc. », exprime-t-elle sa satisfaction.

 

Roxane Ouattara

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