Le samedi dernier, à l’espace Ficgayo de Yopougon, le nouveau parti de Laurent Gbagbo, le PPA-CI, était en meeting. A l’occasion, deux faits ont retenu l’attention : d’une part, des jeunes gens arborant fièrement le drapeau russe aux couleurs blanc-bleu-rouge et d’autre part, une pancarte sur la laquelle il était écrit : « Poutine la porte d’Afrique pour la libération ». Des images qui rappellent celles que les médias ont rapporté lors des récentes manifestations publiques qui ont eu lieu à Bamako au Mali ou au Burkina Faso. Ces pays, dont une bonne frange des populations, autant que les dirigeants semblent sensibles à la propagande pro-russe. Cette image de jeunes gens drapés du drapeau russe et exultant, laisse clairement penser que des partisans de l’ancien président Gbagbo sont, eux aussi, sensibles au narratif tendant à applaudir Vladimir Poutine et la Russie, perçus comme les sauveurs d’une population africaine supposée prise en otage par la France. En témoigne cet appel du pied lancé aux autorités russes à travers le message sans ambiguïté de la pancarte, fièrement brandie sur le lieu du meeting : « Poutine la porte d’Afrique pour la libération ». Joint par téléphone pour savoir les motivations de cette exhibition du drapeau russe, Tra Bi Tah alias « Cœur de Gbagbo », l’un des jeunes gens, y est allé de sa pirouette. « On l’a fait comme ça, sans arrière-pensée, sans savoir que ça allait avoir des conséquences. Parce que nos amis ont été arrêtés », a-t-il
On savait les pro-Gbagbo fascinés par la Russie et autres Etats, censés délivrer l’Afrique du joug français. Durant la décennie qui a suivi la rébellion de 2002 jusqu’à la présidentielle de 2010, ils ont rêvé de voir Poutine s’inviter dans les affaires ivoiriennes en prenant, évidemment, fait et cause pour eux. Aujourd’hui encore, ils ne se sont pas départis de cette fascination pour la Russie. A en juger par leurs prises de position en faveur du pays de Poutine, sur les réseaux sociaux, dans la guerre qui oppose la Russie à l’Ukraine. Il n’est donc pas surprenant qu’ils aient brandi fièrement le drapeau russe à l’occasion du meeting animé par le PPA-CI samedi dernier. Un fait qui est donc loin d’être anodin et que les autorités gouvernementales auraient tort de négliger. En effet, ce geste consistant à arborer le drapeau russe vient rappeler une autre scène, d’il y a quelques semaines, d’un jeune homme à vélo, le torse ceint du drapeau russe, sur le boulevard lagunaire, dans les encablures du stade Félix Houphouët-Boigny.
Il y a donc lieu d’ouvrir les yeux sur cette diffusion du sentiment pro-russe dans le cercle des partisans de l’ancien chef de l’Etat, Gbagbo. Une attitude pour le moins inconséquente de la part de ceux là qui n’ont de cesse de fustiger la France, taxée régulièrement de néo-colonialiste. Comment, en effet, expliquer que ceux qui dénoncent, à gorge déployée, le « colon » français, fassent des appels du pied à une autre puissance dominatrice ? Que cache cette fascination pour la Russie de Poutine, dont la milice Wagner est aujourd’hui le bras séculier en Afrique ? En célébrant les Russes, ces partisans du PPA-CI renvoient, en effet, à l’opinion leur admiration voire leur fascination pour la milice Wagner, dont le nom est de plus en plus associé au régime de Poutine. Ce qui fait dire à
certains que le PPA-CI se comporte comme une sous-section de Wagner
Assane Niada