Le président du PDCI semble avoir perdu sa sérénité devant la vague de défections et à la fronde assumée au sein de son parti, auxquelles il assiste, impuissant. À écouter les menaces à peine voilées proférées contre ceux qui secouent le « cocotier » PDCI de l’intérieur ou qui ont dû prendre le large, faute d’une meilleure perspective, l’on est porté à penser que Bédié joue son va-tout, en attendant 2025. De fait, confronté depuis quelques années et récemment encore à des départs en cascade de cadres et non des moindres, le leader du PDCI semble manquer de solutions pour arrêter la saignée. Pour toute réponse, il choisit de voler dans les plumes des partants tout en brandissant le gourdin contre les empêcheurs de tourner en rond. Il crie à « la cabale », aux « intrigues », avant de mettre en doute, la force de conviction et même la moralité de ceux qui quittent le « navire » PDCI. « À la croisée de chemin, chacun choisit la voie qui répond le mieux, à sa personnalité et à sa conviction », charge-t-il les partants tout en prétendant que « les défections auxquelles nous assistons, ces derniers temps, ne sauraient nous ébranler ».
Impuissant devant la saignée au PDCI
À aucun moment, il ne se remet en cause, encore moins remettre en cause, sa gouvernance, toutes choses qui ont pu expliquer cette vague de départs des personnalités dont les visages évoquaient jusqu’à une date récente, la défense acharnée du PDCI. Tout récemment, l’on assiste à un flot de départs des visages bien connus dans ce parti, comme l’ancien maire de Koumassi, N’dohi Yapi Raymond, le sémillant député Gouali Dodo, l’ex-directeur de cabinet de Bédié lui-même, N’dri Narcisse.
Des personnalités qui, hier, ne juraient que par le parti. Des années auparavant, ce sont des barons du PDCI, qui ont pris leurs distances de la conduite des affaires du parti par Bédié. Patrick Achi, Ahoussou Jeannot, Beugré Mambé, Kobenan Adjoumani, Raymonde Goudou, pour ne citer que ceux-là. N’est-ce pas parce que Bédié a péché dans sa gestion des hommes, que ces figures du PDCI sont allées voir ailleurs ? Au lieu de se livrer à une telle introspection, Bédié, lui, préfère voir en ces « filles et fils du PDCI » qui s’en vont, des gens à la conviction vermoulue et même des gens attirés par l’appât du gain. C’est du moins, ce que le président du PDCI laisse sous-entendre quand il laisse entendre que « le PDCI n’est pas à vendre à l’encan ». Une façon littéraire de dire que ce parti ne saurait se vendre au plus offrant. Le disant, Bédié laisse sous-entendre que ceux qui s’en vont, succombent à l’appât du gain. Ceux-ci pourraient lui rétorquer d’avoir lui aussi, fait preuve de militantisme alimentaire, quand il a lancé l’appel de Daoukro contre l’avis de nombre de ses partisans.
Le fouet brandi
Par ailleurs, Bédié s’en prend à ceux qui entretiennent une fronde interne. Depuis l’élection présidentielle de 2020, jusqu’à tout récemment, certaines personnalités du parti ne cachent plus leur intention de mettre en congé, l’octogénaire président du PDCI ou, à tout le moins, de brouiller les calculs qu’il serait en train de faire secrètement dans la perspective de la présidentielle 2025 et, à un degré moindre, des municipales prévues pour cette année 2023. Des jeunes loups comme Jean-Louis Billon et Tidjane Thiam, ne font plus mystère de leurs ambitions de briguer le fauteuil présidentiel en 2025. Or, sur la question, Bédié entretient encore le flou sur ses intentions réelles. D’autre part, certains cadres comme Yasmina Ouégnin, semblent déterminés à aller contre des choix que pourrait faire le président du PDCI dans la perspective des élections municipales prévues pour se tenir dans une dizaine de mois.
C’est à tous ceux-là que s’adresse Bédié, quand il menace de sévir contre ceux qui froissent la discipline du parti. « Le PDCI-RDA ne peut laisser prospérer le désordre et la division. Je serai désormais intransigeant à l’égard de tous ceux et de toutes celles qui poseront des actes contraires au renforcement de la cohésion de notre parti », tonne-t-il. Et de donner des leçons de respect de la discipline du parti à ses ouailles. « Nous (…) devons-nous tenir sur l’arrêt de la discipline, de la fidélité à nos idéaux, avec l’abnégation que requiert un militantisme résilient qui ne se laisse pas séduire par les impatiences et les satisfactions éphémères ». La fidélité aux idéaux du PDCI, c’est justement ce que lui reprochaient hier, nombre des militants du PDCI, qui ne comprenaient pas le choix unilatéral qu’il avait fait de renoncer à présenter un candidat pour défendre les couleurs de son parti, à l’élection présidentielle de 2015. Huit années plus tard, c’est lui qui vient donner aux autres, des leçons de « fidélité aux idéaux du PDCI ». Preuve qu’il a perdu toute sérénité face à la tourmente dans laquelle se trouve son parti.
Assane Niada