La fin de l’année 2022 sera assurément très mouvementée au sein du plus vieux parti de la Côte d’Ivoire. De fait, la météo politique au PDCI-RDA annonce un grand orage à l’horizon auquel pourrait se mêler un violent vent de mécontentement qui risque de faire voler le parti en éclats. La convocation d’un congrès extraordinaire pour la semaine prochaine, est la goutte d’eau qui est en train de faire déborder le vase des nombreux mécontents qui ont décidé de laver le linge sale de la famille sur la place publique.
De quoi s’agit-il ? Le 29 septembre 2022, le Bureau politique qui s’est tenu dans le fief du « Bouddha de Daoukro », avait décidé de l’organisation d’un bureau politique le 15 décembre 2022 afin de préparer le 13e congrès ordinaire du parti. Au sortir de cette réunion statutaire, une des nombreuses nouvelles structures créées par les bons soins de Bédié était chargée de préparer techniquement ce bureau politique. Il s’agit du Conseil de surveillance, dirigé par N’Dri Pierre Narcisse. Le 29 novembre 2022, revirement à 180 degrés. L’inamovible président du PDCI-RDA décide, en lieu et place d’un bureau politique, de convoquer un congrès extraordinaire le 14 décembre 2022. De plus, N’Dri Pierre Narcisse et le Conseil de surveillance sont dessaisis du dossier, qui échoit à une dream team dirigée par un proche parmi les proches du président du parti : Emmanuel Niamien N’Goran. C’est à partir de là que les choses vont commencer à se gâter entre cadres du doyen des partis politiques en Côte d’Ivoire.
À seulement deux semaines de l’échéance, pourquoi choisir d’organiser un congrès extraordinaire en lieu et place d’un Bureau politique dont la date était arrêtée et connue de tous ? Quelle situation exceptionnelle a pu motiver Bédié à prendre une telle décision ? Pourquoi avoir dessaisi la structure qui était initialement chargée de préparer techniquement la réunion du Bureau politique du 15 décembre ?
Pourquoi un congrès extraordinaire en lieu et place d’un bureau politique ?
Voici autant de questions auxquelles les militants du PDCI attendent des explications de la direction de leur parti. Mais, ils n’attendront pas longtemps. Depuis hier, un document qui circule sur les réseaux sociaux et émanant d’un « Groupe de cadres qui aiment le PDCI-RDA » permet de comprendre la crise structurelle que traverse le parti de Bédié. Disons-le tout net, l’octogénaire de Daoukro est sur des braises ardentes. Et il risque de laisser des plumes dans cette affaire. D’abord, le document qui décrit avec force détails, le malaise qui mine le parti, est un document à charge contre le quarteron à qui Bédié a confié la charge de l’organisation du congrès extraordinaire. Ce groupe accuse le clan Niamien N’Goran et compagnie de fomenter subtilement un coup d’État contre Bédié.
« Par méconnaissance des résolutions prises lors de ce 6e congrès extraordinaire, ils persistent et indiquent dans leurs analyses qu’il faut convoquer une session extraordinaire du congrès pour donner une légitimité statutaire au président Henri Konan Bédié pour lui permettre de régler les problèmes d’urgence au sein du parti. Militants et militantes du PDCI RDA, nous sommes choqués d’entendre de telles aberrations car, jamais Henri Konan Bédié, en tant que président du parti, n’a souffert et ne souffrira d’une quelconque illégitimité ! Comment ces personnes peuvent écrire un tel torchon et le faire circuler dans des canaux officiels du parti ? Contrairement à ce qu’ils veulent faire croire au Président, c’est plutôt eux qui veulent mettre le Président au garage en préparant dans leur laboratoire de mensonges, Niamien N’Goran comme futur « Président » (Président pratique du PDCI-RDA) et dans ce cas de figure, le Président Henri Konan Bédié n’existerait que comme un simple Président d’honneur », dénonce le document du ‘‘Groupe de cadres qui aiment le PDCI RDA’’. Si l’on lit entre les lignes, l’on peut deviner les décisions qui seront arrêtées au 7e congrès extraordinaire prévu le 14 décembre prochain : Il s’agira premièrement de proroger encore le mandat de Bédié à la tête du PDCI. Lequel mandat est arrivé à expiration depuis octobre 2018 et a été prorogé une première fois jusqu’en 2020. Secundo, il sera question de créer un poste de vice-président taillé sur mesure et avec les pleins pouvoirs. Un poste sera confié à Niamien N’Goran. Ainsi donc, Bédié sera un président honoraire et Niamien N’Goran, qui lui est très proche, président opérationnel.
La guerre des clans aura lieu !
À la vérité, c’est ce « complot » que le ‘‘Groupe de cadres qui aiment le PDCI RDA’’ veut éventer. « Conformément aux résolutions du 6e congrès extraordinaire, il n’y a que le congrès ordinaire qui doit procéder au renouvellement du mandat du Président du parti et celui des autres Présidents des structures du parti. Militants et militantes du PDCI-RDA, de tout ce qui précède, quelle est donc l’urgence ou la situation exceptionnelle qui peut amener le parti à convoquer une session extraordinaire du congrès le 14 décembre 2022 ? Non et Non, il n’y a aucune situation exceptionnelle ou situation d’urgence. Pour nous, la seule raison évidente, est que Mr Niamien N’Goran et son groupe veulent contrôler l’appareil du parti, en écartant toutes autres personnes compétentes et honnêtes dans la gestion du parti », ajoute la déclaration du fameux groupe de cadres. Ceux-ci accusent directement ‘‘Les camoraciens’’, le clan dirigé par Niamien N’Goran avec pour élément pivot, l’insubmersible Ehouman Bernard, aidé dans sa tâche par Me Blessy Chrysostome.
Quand on sait que le PDCI-RDA est miné par des clans qui se livrent une guerre sans merci dans la perspective de l’après Bédié, il y a fort à parier qu’il y aura de l’étincelle dans l’air à ce fameux congrès extraordinaire du 14 décembre. Pendant ce temps, les préparatifs vont bon train, malgré les cris d’orfraie qui se font entendre çà et là et tout semble être fait dans une précipitation déconcertante. Les candidatures pour être président du parti sont ouvertes depuis hier, mardi 6 décembre et prennent fin demain jeudi 8. Les délibérations pour juger de la recevabilité des candidatures auront lieu ce même jeudi 8 décembre et les résultats proclamés le lendemain vendredi 9. Pendant ce temps, la caution pour être candidat est fixée à 20 millions de Francs CFA non remboursables. Autant dire que ce qui se passe actuellement au PDCI-RDA est digne d’un film rocambolesque.
Kra Bernard