En langage populaire ivoirien, on serait tenté de dire « boribana » (fin de partie) pour Assimi Goïta après que les chefs d’État des pays de la CEDEAO lui eurent intimé l’ordre de libérer les 46 soldats ivoiriens retenus à Bamako, depuis un certain 10 juillet 2022. Excédés sans doute par l’entêtement de la junte au pouvoir au Mali, les chefs d’État ont décidé de siffler la fin de la récréation en fixant un ultimatum au-delà duquel ils menacent de faire tomber la foudre sur les putschistes de Bamako. Bluff ou réelle volonté de mettre un terme à la bravade du « Che Guevara » de Bamako ?
À l’évidence, Muhammadu Buhari, Nana Akufo-Addo, Macky Sall, Umaro Sissoko Embalo et leurs pairs de la CEDEAO sont exaspérés par l’intransigeance d’Assimi Goïta, qu’aucune médiation n’a pu faire entendre raison jusque-là. Et pourtant, ce n’est pas faute d’avoir essayé. Mais toutes les initiatives visant à le raisonner, se sont heurtées soit à son intransigeance, soit à son double louvoiement. De la médiation togolaise aux missions de bons offices de ses frères d’armes du Burkina Faso (l’ex-chef de la junte, Paul Henri Sandaogo Damiba) et de la Guinée (l’actuel chef de la junte, le colonel Mamadi Doumbouya), en passant par les incessants va et vient des délégations de chefs d’État de la CEDEAO chez lui à Bamako, tous ont fait pschitt. Par la faute d’un Assimi Goïta, qui se sera montré soit intraitable, soit roublard. Résultat : il a fini par irriter la CEDEAO, laquelle semble décidée à dérouler le rouleau compresseur.
Les jours sombres s’annoncent donc pour la junte au pouvoir à Bamako. Une pluie de sanctions va assurément s’abattre sur elle, si elle ne relâche pas, d’ici là, les 46 soldats ivoiriens qui y sont pris en otage. Même si rien n’a filtré concernant la nature de ces sanctions, il n’y a aucun doute sur l’effet de fouet qu’elles ne manqueront pas de provoquer sur les putschistes au pouvoir et par boule de neige, sur les populations maliennes. La batterie de sanctions devrait viser à frapper au portefeuille de la junte malienne autant que sur le plan diplomatique. L’objectif étant de resserrer l’étau autour des militaires au pouvoir à Bamako, afin de les amener à libérer les 46 soldats ivoiriens injustement détenus sur leur territoire.
En fixant un ultimatum à la junte malienne, la CEDEAO prend le risque de voir cette « mise en demeure » être froissée par Assimi Goïta et ses hommes. Elle joue donc gros. Elle joue sa crédibilité, pour ainsi dire. Se montrera-t-elle laxiste et complaisante à l’égard des putschistes ? Parviendra-t-elle à se donner les moyens pour faire plier le sulfureux Assimi Goïta ? Courra-t-elle le risque de se voir infligée un camouflet par l’homme fort de Bamako ? Le moins qu’on puisse dire, c’est que la CEDEAO est au pied du mur. Elle n’a d’autre alternative que de se donner les moyens de ne pas perdre la face et passer ainsi, pour une femmelette au cas où la junte malienne ne se plierait pas à son ultimatum. Aussi est-on enclin à penser qu’elle aura la main lourde au cas où l’entêtement d’Assimi Goïta le conduirait à mordre la ligne rouge du 1er janvier 2023.
Assane Niada