Politique

Quand les religieux se parlent, le terrorisme se tait

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 Malgré les incursions djihadistes dans certaines parties du Nord ivoirien, la tolérance religieuse demeure une réalité dans plusieurs localités du pays. À Lataha, le dialogue interreligieux s’est même renforcé sur le terrain…

 

Un prêtre à la mosquée ? Une bien banale scène, quand on est en Côte d’Ivoire, surtout dans la région du Poro ! Ce vendredi 25 février 2022, le père Nicolas Adjoumani est bien installé à la tribune réservée aux invités. Il vient de bénir la cérémonie avant de regagner son siège sous les bâches montées sur l’esplanade de la nouvelle mosquée en cours d’inauguration. Nous sommes à Lataha, chef-lieu de sous-préfecture situé à 10 kilomètres de Korhogo… Il est 12 heures 25. Durant son sermon qui précède la prière de 13 h, le nouvel imam, Ouattara Lacina, qui vient de recevoir les attributs de sa nouvelle fonction d’imam, prend l’engagement de contribuer au renforcement de cette cohésion qui a toujours prévalu entre les populations. Ce dialogue interreligieux entre musulmans, chrétiens, animistes… Le guide religieux, le coran dans la main, une canne dans l’autre, ne termine pas son sermon sans dénoncer ceux qui, au nom d’une certaine doctrine, tentent d’opposer les religions. « Que Dieu nous protège de ces criminels qui se font appeler djihadistes… » À Lataha, tout le monde le sait. La Côte d’Ivoire n’est plus à l’abri du terrorisme. Le pays a, en effet, été frappé pour la première fois en mars 2016, dans la ville balnéaire de Grand-Bassam, près d'Abidjan. Les assaillants djihadistes avaient ouvert le feu sur la plage et des hôtels, faisant 19 morts. Cette attaque avait été revendiquée par le groupe djihadiste AlQaïda au Maghreb Islamique (Aqmi). Le communiqué de revendication était écrit en arabe et diffusé via l’application de messagerie instantanée Telegram. « Ceux qui font exploser les bombes parmi les foules, sans se soucier s’il y a des musulmans ou non dans la foule… D’où vient ce djihad ? », s’est interrogé le guide religieux. Ces dernières années, plusieurs localités de la région voisine du Tchologo sont régulièrement l’objet d’attaques similaires, attribuées à « ces fous de Dieu ». La dernière en date remonte au 12 juin 2021, où une patrouille de reconnaissance des Forces armées de Côte d’Ivoire (FACI) a été l’objet d’une attaque sur l’axe Téhini-Togolokaye, une localité frontalière du Burkina-Faso. Le bilan dressé par l’armée ivoirienne été de 3 morts et 4 blessés : deux soldats et un gendarme ! Cette attaque était la deuxième en moins d'une semaine après celle de Tougbô, non loin de la frontière burkinabè, mais aussi, la quatrième en deux mois dans la région. Un an plus tôt, en juin 2020, une attaque contre l'armée ivoirienne avait coûté la vie à 14 soldats ! « Le temps de ce type de djihad est révolu. Toutes les religions doivent maintenant cohabiter. Que Dieu nous préserve contre ces terroristes qui utilisent la religion ! Qu’Allah SWT préserve notre pays, la Côte d’Ivoire contre ces terroristes », a prié le nouvel imam de la Mosquée de Lataha. Pour le père Adjoumani qui a attendu la fin de la prière musulmane de ce vendredi 25 février 2022, avant de rentrer chez lui, a fait savoir que le dialogue interreligieux est un vrai bouclier contre l’expansion de ce phénomène dans plusieurs régions du Nord de la Côte d’Ivoire. « Partout où je suis passé, c’est une tradition. Il y a une très bonne collaboration entre les Eglises, les Mosquées et toutes les croyances. Je crois que c’est un atout contre les intégrismes », se félicité le père Adjoumani. Qui dit avoir pris fonction en septembre 2021 à Lataha. « J’étais à Tengréla et c’est la même ambiance de tolérance qui prévalait dans cette ville », révèle le prélat. Présent à l’inauguration de cet édifice religieux, le porte-parole du gouvernement, Amadou Coulibaly, s’est félicité de la concrétisation du dialogue interreligieux. Un acquis que le gouvernement compte mettre à profit dans son combat contre le terrorisme. Son programme spécial mis en place, fin 2021, pour lutter contre la pauvreté, viendra renforcer cette bonne cohésion sociale

Ténin Bè Ousmane, envoyé spécial à Lataha

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