Éditos

Mercato politique Ivoirien

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Mabri est revenu chez son père Ado.
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La Côte d'Ivoire est un pays particulier. Nous avons un grand président de la République. Notre pays est aujourd'hui cité en exemple comme prometteur avec de grandes opportunités d'investissement. Les Ivoiriens ont une grande joie de vivre. Ils sont friands de buzz.

Comme l'indiquent les artistes comédiens, "tu dors, tu te réveilles, il y a un buzz". Le buzz n'est pas que culturel, économique ou social. Il y a aussi le buzz politique. Et le buzz de la semaine dernière, c'est le retour de Mabri Toikeusse au Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp). À la tête d'une forte délégation, le président de l'Union pour la démocratie et la paix (Udpci) s'est rendu à la résidence présidentielle pour annoncer son retour "auprès de son père". Mabri avait l'air tellement sérieux que les Ivoiriens se sont demandé s'ils ne rêvaient pas.

Au-delà du caractère risible et souvent choquant de ces transferts, il y a lieu d'en tirer des leçons. 

Non, nous ne rêvons pas ! Mabri est bel et bien là. Celui qui, en août 2020, claquait la porte du Rhdp pour rejoindre l'opposition est de retour. Le Mercato politique est intéressant. Les transferts se font et se défont au gré des intérêts du moment. Mabri n'innove pas ! Avant lui, Marcel Amon Tanoh, collaborateur de plusieurs décennies du président Ouattara avait claqué la porte, tambour battant, pour revenir, ensuite, sur la pointe des pieds. Finalement, il a pu obtenir un poste.

Ces va-et-vient au gré des humeurs et des intérêts n'auraient ému personne s'ils se faisaient sans dommage. Malheureusement, les politiciens qui vont et qui viennent oublient, hélas, ce qu'ils ont fait. Quand ils se quittent, ils dressent les Ivoiriens les uns contre les autres. Les mots d'ordre, les appels à la haine et à la destruction sont lancés. Des dizaines de morts plus tard, ils se retrouvent, rient, chantent et festoient. Ceux qui lancent ces appels reviennent, sans mea culpa, à leurs anciennes amours. Au grand dam des morts, qui doivent pleurer dans leur tombe. Au-delà du caractère risible et souvent choquant de ces transferts, il y a lieu d'en tirer des leçons. 

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Le petit peuple doit comprendre une bonne fois pour toute qu'il mène des combats qui le dépassent. Voilà Simone Gbagbo qui a tourné le dos à Gbagbo. Qui l'aurait cru. Voilà Blé Goudé, "le bon petit de Gbagbo" devenu, subitement, "un pestiféré" au sein de la famille Gbagbo. Affi N'guessan, l'homme des excès proche de Gbagbo, a été lâché avec l'enveloppe du Front populaire ivoirien (Fpi). Alcide Djédjé, à l'époque Gbagboiste, devenu Rhdp. La liste des mouvements est longue.

Les hommes politiques qui méritent qu'on se batte pour eux sont pourtant connus.

Konan Bédié, leader du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci) et surnommé pendant la période des amours, Président du conseil d'administration (PCA) du pays, est aujourd'hui un irréductible opposant à son cadet qu'il ne cessait d'ailleurs d'encenser. Guillaume Soro, ancien président de l'Assemblée nationale, qui avait traité Gbagbo de tous les noms d'oiseaux, se surprend amoureux de Gbagbo. Quel paradoxe ! Et les morts laissés sur la route des transferts et autres départs s'accumulent.

Tirons les leçons de ces mouvements. Désormais, quand surgit un contentieux, évitons la passion. Évitons le sacrifice suprême. Personne ne mérite de mourir pour des personnes qui ne sont ni cohérentes, ni conséquentes. La nuit qui sera bonne sait depuis le couché du soleil. Les hommes politiques qui méritent qu'on se batte pour eux sont pourtant connus. Pour le reste, il faut les ramener à leur copie. Souhaitons la bienvenue et bon vent à Mabri. Bonne chance à tous ceux qui partent et qui reviennent. Qu'ils se souviennent des cadavres qu'ils laissent ou qu'ils se taisent à jamais. 

J'ai plaidé.

Yacouba DOUMBIA

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