Malgré son potentiel hydrographique exceptionnel et des politiques incitatives de longue date, la Côte d'Ivoire peine à devenir un acteur de premier plan dans l'aquaculture africaine. Avec des ressources naturelles telles que les fleuves Cavally, Sassandra, Bandama et Comoé, ainsi que plus de 2000 km² de barrages, lagunes et zones humides, le pays est bien équipé pour l'aquaculture, cependant la production halieutique actuelle ne répond que partiellement aux besoins des Ivoiriens, notamment face à une population qui a atteint plus de 29 millions d'habitants en 2021, avec un taux de croissance de 2,6 % par an. Conscient des défis à relever, le gouvernement amplifie les actions. Invité ce mardi 28 novembre 2023 au Plateau, de la tribune « Tout savoir sur », initiée par le Centre d’information et de communication gouvernemental (CICG), Modibo Samaké, coordonnateur général du programme stratégique de transformation de l’aquaculture En Côte d’Ivoire (PSTACI), a dévoilé la stratégie nationale pour le développement halieutique.
400 milliards Fcfa sont dépensés en importation de poissons
Selon lui, depuis 2020, la consommation de poisson par habitant en Côte d'Ivoire est estimée à 24,9 kg par an, l'un des taux les plus élevés au monde.
Cependant, notre production nationale de produits halieutiques, qui s'élève à 105 219 tonnes, dont 6 300 tonnes issues de l'aquaculture, ne satisfait que 17% des besoins, estimés à près de 650 000 tonnes.
Ainsi, environ 400 milliards Fcfa sont dépensés en importation de poissons, mettant en évidence notre dépendance significative aux importations, notamment d'Asie. « Les défis actuels de la production ivoirienne tiennent à plusieurs facteurs, notamment le coût élevé des aliments qui sont importés, la disponibilité insuffisante des alevins, tant en quantité qu'en qualité, le manque de ressources humaines qualifiées, le niveau d'investissement insatisfaisant dans le secteur, et les difficultés de mobilité pour certains acteurs clés de la chaîne de valeur. Face à ce déficit et conscient des enjeux liés à la sécurité alimentaire, le Gouvernement ivoirien a élaboré une Politique Nationale de Développement de l’Elevage, de la Pêche et de l’Aquaculture (PONADEPA 2022-2026). Cette politique contient en son sein, une stratégie nationale (SNDA) orientée exclusivement vers l’aquaculture qui comprend deux axes stratégiques que sont : l’amélioration de la production aquacole et le développement de l’économie aquacole », a-t-il indiqué. A l’en croire, divers « projets et programmes sont en cours d'exécution, tels que le PREPICO, FISH4ACP, PRO-AQUACOLE, PRO-DIVERSIFICATION, et le Programme Stratégique de l’Aquaculture de Côte d’Ivoire (PSTACI) ».
Les missions du PSTACI
Créé février 2022, pour une durée de 5 ans, renouvelable une fois, le PSTACI, a informé le conférencier, « vise à stimuler les investissements dans l'aquaculture et à développer la chaîne de valeur associée en Côte d'Ivoire. Cet instrument aspire à propulser le secteur aquacole, avec des investissements publics conséquents et la création d'un environnement favorable aux investisseurs privés. Il vise à créer un cadre favorable au développement des champions nationaux et des PME capables de répondre non seulement à la demande locale mais aussi à celle de l'export, secteur en pleine expansion. D’ici 2030, grâce au PSTACI et à l'engagement du secteur privé, pilier de notre stratégie économique, notre pays ambitionne de produire plus de 500 000 tonnes de produits halieutiques, générant une valeur globale estimée à 825 milliards Fcfa ». Pour lui, « objectif ultime est l'autosuffisance en produits halieutiques et l'amélioration du niveau de vie des Ivoiriens. Pour réaliser cette vision, nous concentrerons nos efforts sur l'amélioration de la production aquacole, la recherche-développement, la formation, et la mise en valeur des plans d'eau par la création de Zones Économiques Aquacoles Durables (ZEAD). Nous chercherons également à optimiser la chaîne d'approvisionnement et de commercialisation, à promouvoir les produits aquacoles, à améliorer les conditions de conservation et de transformation, et à établir des réseaux de distribution efficaces. Un accent particulier sera mis sur l’opérationnalisation de mécanismes institutionnels et incitatifs pour faciliter les investissements financiers, de créer des systèmes de certifications, et de former et encadrer des entrepreneurs aquacoles ». Soutenu par 4 piliers essentiels à savoir, le plan de transformation de l'aquaculture ; la mise en œuvre de sites de démonstration ; le renforcement institutionnel et la vulgarisation des acquis, le PSTACI est déterminé à attirer les investissements privés et les bailleurs de fonds pour développer une chaîne de valeur aquacole dynamique et durable.
Produire plus de 500 000 tonnes de produits halieutiques
M. Modibo Samaké a laissé entendre que la structure dont il a la charge, intervient à plusieurs niveaux. « La formation technique, le soutien à la recherche et développement, l'amélioration de l'accès aux ressources telles que les aliments pour poissons à travers des partenariats avec les fabricants et les provendiers, l'amélioration de l'accès au matériel génétique et la mise en œuvre de systèmes pour contrôler les pathologies aquacoles, l'encouragement des pratiques aquacoles durables et responsables, la professionnalisation de la gestion technique des exploitations aquacoles, et la facilitation de l'accès au financement pour les entrepreneurs de la chaîne de valeur », a-t-il expliqué. L’aquaculture, se dit-il convaincu, demeure le système de production agricole qui a le taux de croissance le plus élevé au monde, « se présentant ainsi comme un moyen efficace de lutte contre la pauvreté, notamment pour les populations les plus vulnérables que sont les femmes et les jeunes à travers la création d’emplois ». C’est pourquoi le PSTACI, met tout en œuvre pour « attirer les investissements du secteur privé et des bailleurs de fonds afin de développer une chaîne de valeur aquacole qui à terme, devra combler le déficit que connait notre pays dans ce secteur ».
Manuel Zako