Les signaux provenant des principales places financières mondiales sur les cours de l’or noir ne sont pas du tout rassurants. Au regard des tarifs appliqués par les principaux pays producteurs et les stratégies commerciales qui vont avec, l’on peut dire que le monde et principalement les pays africains ne sont plus à l’abri d’une hausse du prix du carburant à la pompe si ce ne l’est déjà. A titre d’exemple, ce mardi 19 septembre 2023, sur les principales bourses mondiales (CAC40, Nasdaq, Dow Jones etc), le prix du baril de pétrole brut Brent se rapprochait du seuil symbolique de 100 dollars. D’autres références telles que le pétrole Qua Iboe nigérian avait déjà dépassé les 100 dollars le baril lundi, quand le brut malaisien Tapis a atteint 101,30 dollars le baril. Des chiffres qui contrastent avec ceux de juin 2023 qui étaient tombés jusqu’à environ 75 dollars. Ces tarifs confirment si besoin en est que les cours du pétrole brut à travers le monde restent en hausse ces dernières semaines. Pour plusieurs analystes économiques, il est même probable que ces cours continuent de grimper jusqu’en fin d’année. Cette situation, il faut le rappeler est en grande partie due à la décision des pays producteurs, avec en tête l’Arabie Saoudite et la Russie de baisser leur production. Pour l’Agence internationale de l’énergie (AIE), « une importante pénurie » de pétrole est à prévoir pour le 4e trimestre 2023. Toujours selon l’AIE, cette situation intervient alors que le monde est plus que jamais en demande de pétrole. L’agence annonçait ainsi en août dernier que la demande mondiale de pétrole devrait atteindre le « niveau le plus élevé jamais enregistré ». A titre comparatif, la demande cette année a déjà atteint le niveau record de 103 millions de barils par jour alors qu’en 2022, elle était aux alentours de 99 millions de barils par jour. Les marchés du pétrole sont donc plus que jamais frileux et la première conséquence de cette volatilité des prix de l’or noir devrait être sans surprise, la hausse des prix du carburant. Dans certains pays, les automobilistes ressentent déjà cette crise à la pompe. En France, les prix n’ont cessé de grimper ces dernières semaines avec des hausses de près de 8% sur certains carburants. Le gouvernement, pour réduire l’impact sur les ménages a ainsi pris une décision historique : demander aux distributeurs de vendre leur carburant à perte à partir de décembre. Cette mesure interdite dans le pays depuis 1963 a pour but de soulager les bourses des Français sans être obligé de passer par la case subvention de l’Etat.
La Côte d’Ivoire pourra-t-elle résister à cette flambée mondiale ?
Dans un pays où le litre de diesel flirte avec 2 euros (environ 1300 FCFA), le gouvernement espère pouvoir faire baisser les prix d’environ 50 centimes d’euros par litre (environ 300 FCFA) quand plusieurs associations de distributeurs estiment cet objectif irréalisable. En Afrique, la question du prix du carburant se pose également avec acuité. Des pays producteurs de pétrole tels que le Nigeria et le Congo ont connu des hausses importantes ces dernières semaines. Ces Etats qui, malgré leur caractère de producteurs importent la plus grande partie de leur consommation en carburant, ne sont pas à l’abri de nouvelles hausses au regard de la situation actuelle. En Côte d’Ivoire, la situation n’est pas très différente. Le pays, on s’en souvient était parvenu au plus fort de l’incertitude avec le conflit russo-ukrainien à contenir la hausse des prix du carburants à coups d’importantes subventions. Entre le premier trimestre 2022 et l’année 2023, ce sont plus de 700 milliards de FCFA que le gouvernement a injecté pour contrer une envolée des prix. Si elle est l’expression de la volonté du gouvernement de protéger le pouvoir d’achat des populations, la subvention ne peut durer sur le long terme. Le Nigeria, premier producteur de pétrole sur le continent qui subventionnait les importations de produits pétroliers à hauteur de 500 millions de dollars (plus de 300 milliards de Francs CFA) par mois, a dû renoncer en mai dernier à cette mesure. Si, contrairement aux autres pays africains, le Gouvernement ivoirien, jusque-là est parvenu à supporter les surcoûts des augmentations mondiales à travers les subventions, pourra-il injecter à nouveau des fonds pour éviter une augmentation du carburant à la pompe ? Rien n’est moins sûr. En tout état de cause, si les tendances actuelles se confirment, les consommateurs devront s’apprêter à faire face à des augmentations sur les produits pétroliers, notamment le carburant dans les jours et semaines à venir.
Kra Bernard