Économie

Côte d'Ivoire / Accès aux crédits bancaires des PME ivoiriennes, pourquoi ça coince?

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Lavenir.ci-Comment résoudre l’épineux problème de financement des PME par les institutions de crédit ? Ces structures arriveront-elles un jour à briser le mur de méfiance entre elles? Banquiers et gestionnaires des PME s’accusent. Quelle solution ? Enquête ! Si tous s'accordent à dire que les Petites et moyennes entreprises (PME) représentent l'épine dorsale de l’économie d’un pays, pourquoi est-il si difficile de les financer ? Autrement, pourquoi les Pme ont-elles autant de mal à se faire financer ? Le besoin de finance- ment des PME formelles en Côte d’Ivoire estimé à 3 574 milliards F en 2016. Selon une enquête réalisée en 2016 par le Cabinet Es Partners auprès de 4 212 entreprises, le besoin de financement des PME formelles en Côte d’Ivoire est estimé à 3 574 milliards Fcfa et représente 21% du Produit intérieur brut (PIB) du pays. L'enquête révèle également que plus de 1/4 des entreprises ne sont pas attachées à une institution financière et 3/4 désirent recevoir de l’assistance technique. En effet, à lire les données de ce rapport, il existe un mur de méfiance entre les banques et les autres institutions de crédit d’une part, et les PME, d’autre part. Car sur 90% des entreprises estimant avoir besoin de financement, un tiers seulement dépose une demande auprès d’une institution financière. À en croire ce rapport, près de 90% des sociétés ont recours à des sources de financement, hors du circuit bancaire classique. « Les micro et petites entreprises sont les plus nombreuses à avoir besoin de financement, mais elles sont également les moins nombreuses à déposer une demande de financement », peut-on lire dans cette enquête du Cabinet Es partner. Elles s’appuient plutôt sur la famille, les tontines, les fonds propres, etc… Le constat est donc réel. D’ailleurs, l’étude fait savoir que les entreprises méconnaissent les sources de capital alternatif. « Les sociétés sont très peu informées des réformes mises en place par l’État de Côte d’Ivoire sur l’accès au financement. Seules 6%, 8%, 13% et 16% connaissent respectivement la réforme sur le crédit-bail, le bureau d’information sur le crédit (BIC), l’accès des PME aux marchés publics et la réforme du recouvrement des crédits de TVA », fait observer ESP. Le témoignage du président de la Confédération des PME du BTP, Soro Doté,vient confirmer cette enquête. Avant de donner les détails sur cette question d’accès aux prêts bancaires, il fait savoir que pour les banquiers, la personnalité des entrepreneurs compte quelque fois beaucoup plus que la qualité du business plan qu'ils proposent. « Est-ce que les critères bancaires ont changé ? Il n’y a aucune évolution. Aucune banque ne fait de facilitations aux PME. Même quand on remplit toutes les conditions, il n’est pas évident que tu aies le financement. Il faut des relations personnelles pour pouvoir avoir accès aux financements. Les banques, ce sont des relations. Si tu as une relation particulière avec un banquier, il peut te faire des faveurs. Mais dès l’instant où vos rapports ne sont au beau fixe, rien n’est possible », relate t-il avec amertume, les difficultés auxquelles les PME sont confrontées. Nos PME ont perdu près de 80% de leur chiffre d’affaires. À en croire M. Soro, les PME souffrent le martyr. Pis, les entrepreneurs sont dans le désarroi. « Pourtant, c’est l’argent des clients qu’elles utilisent pour fonctionner. Pourquoi ne pas donc financer les PME qui ont des difficultés ?», s’interroge-t-il. Poursuivant, le président de la Confédération des PME du BTP, confie que sa banque ne lui fait même pas de concession. « En tant que promoteur immobilier, ma banque me demande de mettre en garantie les ACD de mes terrains pour construire les logements sociaux. Ce qui a été fait. Ils ont demandé de nantir le compte séquestre, je l’ai fait, les maisons qu’ils ont prévu financer n’ont pas été financées. » D’ailleurs, les PME du bâtiment et des BTP agréées par l’État dans le cadre du programme présidentiel des logements sociaux, ne savent plus où mettre la tête. « La pandémie du Coronavirus a empiré les choses. Nos PME ont perdu près de 80% de leur chiffre d’affaires. Pourtant, les banques ne nous octroient pas de prêts. Comment allons-nous reprendre nos activités sans accompagnement ?», renchérit-il. Et d’informer que face à cette situation, ces structures sont obligées de se tourner vers l’État. « Nous sommes poursuivis par les souscripteurs. Ceux-ci veulent leur argent, vu les nombreux retards dans le cadre de nos projets. En outre, un grand nombre de nos clients ont perdu leur emploi et ne sont pas en mesure de respecter les échéances ». Les PME n’ont pas toujours une comptabilité suivie Mais, qu’est-ce qui explique les difficultés d’accès aux financements bancaires des PME ivoiriennes ? Selon Kader Touré, chef du service marchés et marketing opérationnel de la Banque nationale d’investissements, (BNI) avec qui nous avons eu un entretien, le problème de financement des banques se situe à plusieurs ni veaux, notamment le volet structurel et fonctionnel. À en croire ce banquier, au niveau du volet structurel, bon nombre de PME ne sont pas constituées, conformément aux textes liés à la création d’entreprise. « Elles n’ont pas toujours la documentation qui atteste l’activité qu’elles font. S’agissant du fonctionnel, elles n’ont pas toujours une comptabilité suivie. Très peu sont celles qui se font suivre par des Centres de gestions agrées (CGA), du coup, elles ne sont pas en mesure de nous fournir une bonne visibilité de leur activité. Elles ne peuvent donc pas faire les états financiers », confie-t-il. M. Touré fait savoir que, quand une telle structure vient solliciter un financement ou un accompagnement auprès d’une banque, « On ne sait pas lire ou dire qu’on peut lui accorder tel financement qu’elle va rembourser au bout de tel nombre de temps, avec une échéance de tel montant, parce qu’il n’y a pas de comptabilité claire et des fois, le promoteur de l’activité confond ses fonds propres et les fonds de l’activité ». Chaque prêt doit être contre- balancé par une garantie. Pour lui, dans un tel schéma, « Il est difficile pour la banque de s’engager d’autant plus qu’elle est astreinte à certaines règles. Et, en suivant ces règles, chaque prêt doit être contrebalancé par une garantie, une garantie que les PME ne savent pas proposer. Et, si on n’a pas la garantie qui contrebalance le prêt ou l’accompagnement qui est fait, on n’a pas également une visibilité sur la capacité d’endettement de la structure qui nous demande un accompagnement. En plus, il n’y a même pas un fonds en tant que tel qui constitue une garantie ». En outre, Kader Touré fait remarquer que l’union ne règne au sein des PME. Ce qui fait qu’elles ne peuvent pas se constituer en association de manière convenable pour avoir plus de crédibilité auprès des banques, afin de pouvoir bénéficier de certains financements ou accompagnements. «Déjà, il faut que les PME fassent leur constitution comme il se doit. Aujourd’hui, avec le Cepici, ce sont des choses qu’on peut faire assez vite et assez bien. Il faut que les PME formalisent cela », préconise-t-il. Ce cadre de banque exhorte également ces structures à se faire suivre par des Centres de gestion agrées, de sorte à pouvoir sortir une comptabilité fiable,à faire des états financiers. « C’est le document universel qui permet à toute personne qui n’est pas à l’intérieur de l’entreprise de pouvoir lire et comprendre l’entreprise et son fonctionnement. Mais, s’il n’y a pas d’informations permettant de lire l’activité, il est difficile de dire à quelqu’un qui n’y est pas, de te faire confiance, ça ne va marcher »,prévient-il. Fatou Sylla Un processus d’identification des PME en cours Le ministre de la Promotion des PME, Félix Anoblé, exhorte les gestionnaires des PME à être courageux, tout en les invitant à s’inscrire sur le site de l’Agence Côte d’Ivoire PME pour se faire enregistrer, afin de bénéficier des avantages prévus par le statut de l’entreprenant que l’État a mis en place pour eux, suite à l’avènement de la Covid-19. Selon lui, ce fonds de soutien va permettre de faire des prêts aux entreprises de 5 à 100 millions de Fcfa pour leur permettre de relancer leurs activités. Cet appui vise deux objectifs majeurs, à savoir préserver l’outil de production et pérenniser les emplois. Une opportunité saisie par la Plate-forme unique des Petites et moyennes entreprises de Côte d’Ivoire (Pupme-CI). Selon son Secrétaire général adjoint, Kaba Mohamed Lamine, le processus d’identification des PME est une vaste opération qui nécessite la mise en place de processus et de mécanismes bien structurés pour obtenir le profilage des PME. Cette action va permettre de constituer une base de données statistiques qui intègre la géolocalisation, la numérisation objective et optimisée de l’ensemble des PME sur l’étendue du territoire. Pour lui, cette recommandation du ministère de la Promotion des PME, de l’artisanat et de la transformation de l’informel fait partie du plan d’orientation stratégique et du plan d’actions 2021- 2023 de la Pupme-CI. « La Pupme-CI rencontrera les partenaires techniques et au développement pour ensemble permettre à la Côte d’Ivoire de ressortir la cartographie réelle des PME et PMI de la Côte d’Ivoire à travers un système intégré, intelligent et "géolocalisé" des PME de Côte d’Ivoire », annonce-t-il. Poursuivant, M. Kaba informe que le plan stratégique 2021-2023 de la Pupme apportera une transformation structurelle du fonctionnement des PME. Car, révèle-t-il, « Le Présidiumde la Pupme-CI a décidé avec les autres composantes, de la réorganisation de l’écosystème des PME en filière pour promouvoir et élever le niveau qualitatif des produits et services locaux et impacter plus le quotidien des PME ivoiriennes. FS
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