Culture

Dossier/ Magic System, Révolution, Les Marabouts…Dans les secrets de ces groupes qui ont traversé le temps

dossier-magic-system-revolution-les-marabouts-dans-les-secrets-de-ces-groupes-qui-ont-traverse-le-temps
Plusieurs groupes n’ont pas pu résister face à la gloire, la célébrité, le succès. Ph DR.
PARTAGEZ
Des Salopards en passant par Aboutou Roots, Les Patrons, Les Youlés, Kiff No Beat ou encore Les Leaders, ces groupes qui ont fait rêver les Ivoiriens, ont tous été victimes des démons de la division. En revanche, certains groupes comme Magic System, Révolution, Les Marabouts d’Afrique et bien d’autres ont traversé le temps. Voici les secrets de leur longévité.  

Ils n’ont pas pu résister à la célébrité. De bons complices qu’ils étaient à l’origine, ils ont fini par prendre chacun son chemin. Confrontés pour la plupart à des problèmes de leadership, d’égo ou de vision, ces groupes adulés ont disparu face au vent de la division ou se sont plutôt restreints. Qui sont-ils ? Qu’est-ce qui est à l’origine de leur dislocation ?

Ces groupes Zouglou qui se sont brisés

Ils sont nombreux ces groupes qui n’ont pas pu résister à l’air du temps. Alors que les mélomanes leur prédisaient un grand destin et une longue et brillante carrière, ces groupes se sont disloqués. Certains membres s’étant lancés dans une carrière solo n’ont pu connaître la gloire. Et tout naturellement, ceux-ci ont dû abandonner la musique. Issus pour la plupart du Zouglou, du couper-décaler, et à un degré moindre du Youssoumba, ces groupes ont pour dénominateur commun le succès. Malheureusement, les démons de la division auront eu raison d’eux. C’est le cas par exemple du groupe Les Patrons qui, à l’origine, était composé de quatre membres, Éric, Clemso, Dodo La  Joie et Vino. Mais à peine ont-ils connu le succès après avoir mis deux albums sur le ma rché, que surgiront les vieux démons de la division. C’est d’abord Vino, le chef du groupe qui part, arguant une profonde mésentente entre le lead vocal Éric et lui. D’accusations en accusations, on ne saura véritablement pas la cause réelle du départ de Vino du groupe qui, entre temps, s’est installé en France. Quelques années après l’épisode de Vino, c’est Dodo La Joie qui sera viré du groupe pour insuffisance de résultats. Même si après la séparation, il tentera de se lancer dans une carrière solo, il ne réussira pas à s’imposer sur la scène. Après une bonne période de disette, Vino viendra à son secours en lui permettant de rentrer sur la France. Une situation bien dommage vécue par le groupe Les Patrons dont la célébration des 20 ans au Zénith de Paris se réduira à Éric et Clemso.

A lire aussiCulture/Nouvel an: Des artistes et célébrités livrent leurs vœux

Bien avant Les Patrons, Les Salopards connaitront le même sort alors qu’ils étaient en pleine ascension. Ce n’est que 21 ans après cette séparation que Soum Bill a véritablement dévoilé les raisons profondes de cette division. A en croire le chanteur, qui s’est lancé dans une carrière solo qui lui a souri, ils n’ont pas su gérer le succès. « On a péché par jeunesse », avait révélé Billy Le Kid, indiquant qu’ils n’étaient pas bien préparés psychologiquement à la gloire et que chacun avait ses ambitions. Et même s’ils ont tenté de ressouder les liens en sortant une œuvre en 2020, ils ne se remettront plus ensemble et cette belle initiative s’assimilera plus à un coup de pub qu’à un retour aux sources.

Les Leaders, l’un des plus jeunes groupes Zouglou, a également connu la séparation. Le trio a fini par se réduire à un duo : Pico ayant claqué la porte. Donnès et Valé, restés sur place à Abidjan, poursuivent l’aventure. Quant à Pico, installé en France, il a du mal à donner les vraies raisons de leur séparation. Tantôt il évoque un problème de leadership tantôt il ne se sentait plus avec ses amis. En clair, le Zouglou où on retrouve le plus de groupes, a connu plusieurs divisions.

Le Rap, le Youssoumba et le couper-décaler dans la danse

Dans ces registres musicaux, il y a moins de groupes. N’empêche, le peu de groupes existants ont fini par se disloquer. C’est le cas par exemple au Rap avec le groupe Kiff No Beat. Ce groupe de cinq garçons n'aura pas franchi la barre des quinze ans de carrière. Au départ, l’argument avancé était que chacun sorte des singles sous son propre label et que le groupe subsisterait. Mais au final, ce n’était que de la poudre de perlimpinpin pour masquer cette division du groupe. Depuis plusieurs années, chaque membre du groupe se concentre sur sa carrière solo. Avec les succès que connaissent Didi B, Black K, Elown, il leur sera difficile, à l’image du groupe de rap Sexion d’assaut, de revenir à Kiff No Beat. Tour 2 Garde, l’un des premiers groupes de rap à succès, constitué au départ de trois membres, s’est réduit à deux avant de s’effriter. Kilheur, qui était le premier membre du groupe à sortir, s’est lancé dans une carrière solo. Restés deux, Jimmy James et Thura, ces amis de Koumassi Prodomo, vont finalement se tracer des voies différentes, abandonnant le groupe qu’ils ont bâti et construit depuis plusieurs années. Même sort pour le duo Force One. Les deux poulains du Gros Bedel vont finir par se séparer, pour des raisons qu’ils s’expliquent difficilement. Non sans s’accuser mutuellement. « Ils se sont séparés sur fond d’incompatibilité d’humeur. Chacun avait son caractère et puis, il y avait un problème d’apport d’énergie en termes de travail. Il y a un qui disait qu’il travaillait plus que l’autre », avait expliqué leur producteur le Gros Bedel.

A lire aussiHommage au Chef de l’État: Les artistes du Grand Ouest vont célébrer Ouattara  

Tout comme au rap, les divisions sont aussi visibles au niveau du Youssoumba où la plupart des groupes qui ont fait les beaux jours de ce registre musical tiré par les lagunaires, n’ont pas pu résister aux travers qu’engendre la gloire. D’Aboutou Roots en passant par Les Youlés, Taboth Cadence, A nous les petits, Nigui Saff K-Dance…tous ont connu le triste sort de la division. Une situation bien triste qui a freiné l’élan de cette musique, qui était pourtant promise à un bel avenir. Au couper-décaler où la tendance est plus en solo, les quelques rares groupes qui se sont créés n’ont pas réussi à aller aussi loin. Même ceux à qui on attribue la paternité de ce mouvement à l’instar du duo Lino Versace-Borosangui ou même la Jet-Set ont fait long feu. A un autre niveau, le beau duo que formaient Debordo Leekunfa et DJ Arafat, qui a accouché de la célèbre chanson ‘’Kpangor’’, s’est vite éteint du fait des interminables mésententes entre ces deux artistes.

Les recettes des groupes qui ont vaincu la division

Mais à côté de ces groupes qui se sont disloqués, il y a ceux qui ont résisté aux démons de la division. Selon les membres de ces groupes, les mésententes et autres dissensions ont jonché leur chemin mais leurs forces de caractère et leurs ambitions leur ont permis de surmonter ces épreuves. Pour Boklay, qui a toujours fait carrière solo, la cupidité, l’égo et le manque de franchise sont à l’origine des divisions. « Un groupe doit avoir un même rêve musical même si les rêves personnels peuvent être différents. On peut être dans un groupe sans pour autant partager les mêmes hobbies ou amis. Il faut dissocier le professionnel et le privé. Être franc pour connaître les forces et faiblesses des autres », recommande le membre du Conseil de gestion et de restructuration du Bureau ivoirien du droit d’auteur (BURIDA). Pour lui, le groupe Magic System « reste le groupe le plus solide justement à cause des vertus que j'ai sus citées. Ils s’en sont imprégnés. Ils ont choisi un leader et respectent leurs propres règles qu’ils se sont édictées », a témoigné l’auteur de la célèbre chanson ‘’Aniaman yako’’.

A lire aussiAboudia, Yeanzi, Armand Boua, Laéticia Ky, Fréderic Bruly Bouabré, Watts…Ces artistes-peintres qui font la fierté de la Côte d’Ivoire !

La franchise, la vérité, le respect des principes et des bases de départ sont pour Prométhée du groupe Révolution les clés pour atteindre la longévité du groupe Magic System qui est, selon lui, l’un de leur modèle. « Il faut développer une attitude d’humilité, se mettre et se fondre dans le moule, se dire la vérité dès le départ, fixer des bases solides sur des détails sensibles tels que l’argent, les femmes et le leadership. Ne pas se cacher des choses encore moins se jouer les plus malins que les autres. La franchise et la vérité sont très importantes donc », conseille Prométhée de Révolution, dont l’un des groupes inspirateurs est Les Patrons.

A lire aussiArt contemporain : Les artistes qui se démarquent

Les crises, il dit en avoir connu depuis qu’ils se sont lancés dans cette aventure musicale il y a plus d’une dizaine d’années. « Nous connaissons des crises régulièrement mais nous nous acceptons avec nos différents caractères. Chacun connaît sa place et aussi l’importance de l’autre mais c’est surtout le fait que chacun connaît les défauts et les qualités de l’autre qui fait notre force et notre base avec le respect de nos principes », fait-il savoir ajoutant que leur diversité est loin d’être un défaut pour eux. « Révolution, c’est quatre personnes d’âge et d’origine différents. On s’est réunis ensemble autour d’un objectif commun. On s’est dit que tant qu’on n’a pas atteint ces objectifs, il n’y a pas de raison qu’on se sépare surtout qu’on sait tous que c’est ensemble qu’on est plus fort. On a connu certes des obstacles et des problèmes mais on arrive toujours à se souvenir de nos objectifs de départ. Il y a beaucoup de respect entre nous. Aucun d’entre nous n’a déjà envisagé se lancer dans une carrière solo », confie-t-il. Modèle de groupe accompli, Magic System, qui totalise plus de 20 ans de carrière, a été à des moments donnés, en proie à des dissensions ou des départs. Mais à en croire Manadja, ils ont toujours mis en avant l’esprit de groupe. Pour le Gaou Magicien, Dieu leur a permis d’avoir un bon leader qui a toujours privilégié le groupe au détriment d’intérêts personnels. Selon A’Salfo, les valeurs de solidarité, de fraternité, acquises depuis Anoumabo, sont pour beaucoup dans la longévité du groupe. « Il y a aussi le fait que j’ai eu la chance d’être le chanteur et l’aîné du groupe, donc je l’ai géré en tant que grand frère », soutient-il non sans confier que le respect des règles qu’ils se sont fixées en leur sein leur a été bénéfique.

Philip Kla

Newsletter
Inscrivez-vous à notre lettre d'information

Inscrivez-vous et recevez chaque jour via email, nos actuaités à ne pas manquer !

Veuillez activer le javascript sur cette page pour pouvoir valider le formulaire