Culture

Interview/Caroline et Lionel André Dasylva à cœur ouvert

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Caroline et Lionel André Dasylva se sont ouverts à L’Avenir. (Photo : DR).
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Caroline Dasylva, la présentatrice de l’émission culte C’Midi sur RTI 1 et son époux Lionel André Dasylva, nous ont ouvert les portes de leur jardin secret. De leur vie de couple en passant par leur vie professionnelle et leur initiative, « Drôles de femmes », le couple dit tout.

Pouvez-vous nous présenter votre structure ?

Caroline Dasylva

Lui, il est dans la communication visuelle et moi dans la communication audiovisuelle.

Lionel André Dasylva

A Médiatis, nous faisons de la communication événementielle, audiovisuelle. A la direction, nous sommes deux personnalités qui vivent ensemble et qui sont aussi dans le même secteur d’activité. Je suis le gérant de l’entreprise et caroline la directrice. Du coup, nous nous sommes dit pourquoi ne pas mettre sur pied une structure qui va héberger toutes nos aspirations pour ce même milieu. C’est ainsi qu’est née la structure. Caroline a énormément d’idées et moi, je fais en termes d’innovations. Notre idée de création de notre plateforme « Drôles de femmes » est d’ailleurs née de l’idée de Caroline. Elle recevait à C’Midi les web humoristes et tout est parti de là. L’idée était géniale, puisque notre ambition était de remettre le théâtre dans le cœur des Ivoiriens. Un théâtre qui est mort depuis longtemps, depuis l’époque des Adjé Daniel, Diallo Ticouai Vincent et autres. Pourtant, on continue de former des hommes de théâtre à l’INSAAC. Malheureusement, il n’y a plus de plateformes pour aimer le théâtre. Cela a été notre premier challenge, notre premier cheval de bataille que nous avons essayé de relever au travers de l’idée de Caroline. On a voulu vraiment asseoir un plateau qui allait avoir beaucoup de valeurs. Faire revenir donc le théâtre dans le cœur des Ivoiriens est vraiment quelque chose de très ambitieux, puisque ce n’est pas évident de toujours trouver des oreilles attentives à un tel projet, mais on savait que c’était quelque chose de très important pour nous. Pour y arriver, on a misé d’un côté, sur des doyennes qui ont tenu la scène en Côte d’Ivoire, et d’un autre côté, on a misé sur une nouvelle catégorie de personnes appelées influenceuses qui ont certes, une grande notoriété sur les réseaux sociaux, mais qui n’ont rien comme coffre artistique, parce que n’ayant pas d’expériences le domaine de la scène. Notre tâche a été donc de voir comment mettre les choses ensemble, de manière à ce qu’il y ait un transfert de compétences pour que ces jeunes dames que nous suivons sur les réseaux sociaux, puissent s’asseoir artistiquement parlant et se faire valoir. C’est le cas par exemple d’Eunice Zunon à qui on a donné la chance et qui est aujourd’hui sous tous les Spotlight.

Vous le disiez tantôt, votre ambition est de remettre le théâtre dans le cœur des Ivoiriens à travers votre plateforme. En retour, est-ce que les professionnels du théâtre considèrent-ils vraiment « Drôles de femmes » comme une plateforme contributive au retour de cette discipline ?

Lionel André Dasylva

Effectivement, le théâtre est mort en Côte d’Ivoire non pas qu’il n’y a plus d’hommes et de femmes de théâtre, mais on n’a plus chez nous, des plateformes pour faire aimer cette discipline. Les plateformes pour faire aimer par exemple la musique congolaise, urbaine existent, mais les plateformes pour faire aimer le théâtre sont quasi inexistantes. Alors qu’à côté de nous au Burkina Faso, le théâtre est très bien promu. Pour nous, la plateforme idéale pour faire aimer le théâtre, c’est bien celle que nous avons mise en place.

Pourquoi le théâtre est si important pour vous ?

Lionel André Dasylva

Le théâtre véhicule surtout des valeurs éducatives en dehors de ses autres fonctions connues. Le théâtre nous permet d’avoir un certain savoir-être et un certain équilibre. Il peut montrer avec humour ce qu’il faut et ne faut pas faire dans la vie. D’ailleurs, il n’y a pas meilleur moyen de sensibilisation que le théâtre. On pourrait même à juste titre se demander si ce n’est pas parce qu’on n’a plus ce genre de plateforme que notre société va mal. « Drôles de femmes » est certes, une plateforme de valorisation de talents féminins, mais elle aborde des problématiques très pertinentes et importantes à la fois drôles et éducatives au sein de laquelle on retrouve plusieurs générations.

Pourquoi avoir créé une plateforme exclusivement féminine ?

Caroline Dasylva

C’était un véritable besoin de trouver une plateforme dédiée aux femmes comédiennes, humoristes pour qu’elles puissent s’exprimer. Elles ont certes, le talent en elles, mais on ne les attendait pas forcément sur les planches. On les a vues jouer dans des films, on sait qu’elles ont du potentiel, il y a certaines autres qu’on a vues sur le web, mais qui n’osaient pas. Aujourd’hui, avec l’avènement de « Drôles de femmes », cela encourage encore plus les femmes à se lancer dans l’humour. Les femmes ont de plus en plus pris confiance et ont envie de se lancer dans cette carrière d’humoriste et de comédienne. Notre plateforme appartient à toutes les femmes qui ont du talent, parce que nous avons décidé de valoriser les talents féminins. Notre initiative est une fresque théâtrale à l’intérieur de laquelle on trouve des chorégraphies, on retrouve des instrumentistes, des chanteuses. C’est en gros, véritablement, la plateforme par excellence d’expression et de valorisation de talents féminins. Cette année a été particulière, parce que depuis le début, les populations sont habituées à un double événement annuel, à savoir celui populaire du Palais de la Culture et celui VIP du Sofitel Hôtel Ivoire. Cette année, on a eu une échéance à l’international, ce qui a été une année particulière pour nous. Nous avons eu une pléthore d’actrices et de comédiennes qui sont passées sur la plateforme, certaines évoluent de leurs propres ailes, d’autres sont allées se former à l’étranger et on a aussi nos « vieilles marmites » qui sont là.

Lionel André Dasylva

Je corrobore les propos de Caro. Ce n’est pas seulement ici qu’on a des plateformes culturelles exclusivement masculines. Aujourd’hui, on a un revirement quant à l’approche aux réalités féminines et c’est mondial. C’est important de pouvoir recevoir des messages provenant de cœurs féminins dans tous les domaines de l’art et de la culture. Il faut donc faire la part belle aux deux genres de pouvoir s’exprimer et c’est à ce seul prix qu’on obtient une société équilibrée. Cela, parce que les hommes ont leur façon de penser, les femmes également. Ce n’était pas aussi facile pour nous dans les débuts parce que le public n’a pas tout de suite adopté. Mais à l’issue de la première représentation au Palais de la Culture, les gens ont aimé et se sont rendu compte que le théâtre qui avait été délaissé, était en train de revenir mais sous une autre forme, la plus belle et la plus intéressante. Il y avait une certaine révolution avec un théâtre beaucoup plus proche de nos réalités. C’était un théâtre de proximité qui n’est pas vulgaire, mais en même temps prône certaines valeurs avec de l’humour à l’intérieur. Ce qui a tout de suite accroché les spectateurs. Du coup, de mars 2019 au Palais de la Culture, on s’est retrouvés en juin 2019 au Palais des Congrès du Sofitel Hôtel Ivoire. C’était fabuleux et depuis, on ne s’est plus arrêtés jusqu’à ce qu’on entame l’année 2022 à Londres. Un mois après, c’est-à-dire le 24 décembre 2022, on se retrouve au Palais de la Culture à la demande du public ivoirien.

Est-ce qu’il est aussi aisé de réunir sur une même plateforme, à la fois des influenceuses qui sont très bien suivies sur les réseaux sociaux et des comédiennes de notoriété à l’instar de Gbazé Thérèse, Adrienne Koutouan, Bleu Brigitte… ?

Lionel André Dasylva

Les stars ont des caprices, surtout lorsque celles-ci tombent sur des gens qui les considèrent bien, mais ce sont des choses que nous supportons. Cela, parce que nous voulons que nos doyennes des planches soient valorisées. Dans le cas, par exemple, des influenceuses qui n’ont pas certainement l’expérience et la compétence, mais qu’on est souvent obligés de leur tordre quelquefois le bras devant ces doyennes pour qu’elles puissent leur parler avec respect et déférence. La popularité, d’une manière ou d’une autre, se gère de façon différente. Donc, nous pouvons subir les caprices, mais nous travaillons à ce que cette plateforme soit équilibrée. Ce n’est pas facile, je l’avoue. C’est beaucoup plus difficile avec la jeune génération de comprendre la nécessité d’agir avec humilité. C’est vrai qu’on peut avoir des millions de followers sur les réseaux sociaux, mais quand on se retrouve devant par exemple une Adrienne Koutouan ou Gbazé Thérèse qui ont écrit le théâtre avec des lettres de noblesse, elles gagneraient à faire preuve d’humilité et à apprendre.

Caroline Dasylva

Il y en a qui sont très faciles à gérer, par contre, d’autres non. En conclusion, ce n’est pas facile de les gérer, mais comme nous sommes toutes des stars (rire), on arrive à les gérer tout de même.

Dans le même sens, est-il aussi facile de travailler dans la même entreprise avec son époux ou son épouse ?

Caroline Dasylva

(Elle rit à haute voix). Sommes-nous obligés de répondre à cette question ? (Elle cherche ses mots). C’est facile et à la fois difficile. Ce n’est jamais facile de pouvoir collaborer avec son époux, parce que c’est là qu’on se rend compte qu’on a des perceptions différentes. On regarde certes, dans le même sens, mais ce n’est pas toujours facile, parce qu’il y a des choses sur lesquelles on n’est jamais d’accord. C’est un homme de caractère. Il nous arrive parfois de nous disputer dans le cadre du travail, mais on finit toujours par s’entendre parce que derrière ce caractère, c’est un homme qui est très généreux et très aimant. On n’a d’ailleurs pas le choix, vu que nous sommes très complices et aussi que nous sommes de la même confession religieuse, ce qui nous aide énormément. Quand la difficulté et l’obstacle surviennent, notre premier réflexe, c’est la prière.

Lionel André Dasylva

Sans nous jeter des fleurs, c’est nous qui avons envoyé le fait de nous exposer sur les réseaux sociaux en tant que couple. Au début, les gens n’acceptaient pas notre trop grande exposition, mais Dieu merci, aujourd’hui, beaucoup nous emboîtent le pas. Il y a de plus en plus de couples qui s’affichent. J’ai été le premier à débarquer sur un plateau de la RTI, embrasser son épouse en direct. Ce qui m’a valu d’être appelé quelque part pour des remontrances. C’était de l’audace, car cela a valu de décrisper l’image qu’on pourrait se faire d’un couple. Effectivement, travailler avec son épouse, c’est à la fois facile et difficile. Lorsque vous avez quelqu’un avec qui vous êtes non seulement chargé émotionnellement et sentimentalement, ce n’est pas facile d’exercer dans le même cadre professionnel, surtout qu’on doit avoir des résultats. Je lui dis déjà merci d’avoir accepté qu’on travaille ensemble, parce qu’il y a beaucoup de couples qui ne veulent pas mélanger travail et vie de couple, car quelquefois, les désaccords professionnels peuvent se transporter sur le cadre familial. Pour dire que les photos qu’on voit, ce ne sont pas des mises en scène. Franchement, elle a de belles idées, parce que moi, je suis beaucoup plus pratique et opérationnel.

Pouvons-nous avoir une idée des influenceuses et comédiennes qui se sont prêtées à votre plateforme ?

Lionel André Dasylva

Il y a la première génération avec Jennifer Kissi qui est actuellement aux États-Unis dans une école de cinéma. On a Alisar Zenar, Gisèle Kouakou et bien d’autres artistes.

Quelles sont les perspectives pour l’année 2023 ?

Lionel André Dasylva

Il y a de belles surprises à venir. L’aventure dure maintenant quatre ans et ce spectacle a secoué beaucoup de choses dans le milieu culturel ivoirien. Lorsqu’on se produisait pour la première fois au Palais des Congrès du Sofitel Hôtel Ivoire, cela faisait trente ans que les femmes ne s’y étaient plus produites sur une planche dans ce lieu. On arrive en 2023 avec beaucoup plus d’innovations, notre leitmotiv étant de ramener le théâtre aux Ivoiriens. Il est aussi fort probable qu’en 2023, on associe à la plateforme, des talents de la sous-région. Nous comptons également faire une tournée dans les principales villes de l’intérieur et aussi à l’international. Il n’est pas aussi exclu que nous convergions vers une série télévisée.

Avez-vous des points de satisfaction, quatre ans après avoir lancé cette initiative de regrouper sur une même plateforme des comédiennes et des influenceuses pour contribuer au retour du théâtre en Côte d’Ivoire ?

Caroline Dasylva

Bien sûr que nous avons beaucoup de points de satisfaction. Le théâtre était en agonie et notre plateforme a contribué à sa relance. Nous avons aussi permis à ces femmes de s’exprimer, de croire en elles, croire en leurs talents, de s’affirmer et de participer à leur évolution artistique.

Philip KLA

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