Samedi 25 décembre 2021. Jour de Noël. L’ambiance est festive. Déjà, tôt le matin, les sons musicaux discordants provenant de certains bars et maquis de Bingerville situent que la journée qui s’annonce est un jour de fête. Précisément, celle de la commémoration de la nativité.
Bingerville, à l’instar de nombreuses communes du pays, a baigné dans la ferveur festive de Noël. Des animations sonores ont baigné la ville toute la journée. Au cœur de cette ex-capitale de la colonie française (entre 1900 et 1934), se dresse un « Palais » faisant office d’orphelinat de garçons, bâti sur une surface de 4 hectares. À l’occasion de la fête de Noël, les portes de l’établissement sont grandement ouvertes. Il est 9 h 38 mn lorsque nous y arrivons. À première vue, la propreté des lieux ne manque pas de sauter aux yeux. La vaste cour a fière allure. Le gazon est soigneusement tondu, les murs repeints et les palmiers royaux dressés de chaque côté des voies menant au palais, en sentinelles respectueuses, agitent leurs palmes comme pour saluer le visiteur.
Ce samedi, sur l’esplanade du vieux palais du premier gouverneur de la Côte d’Ivoire, se tient une cérémonie de remise de jouets aux enfants. Pas n’importe quels enfants… des orphelins. À pareil grand évènement, nous apprend-on, les responsables des lieux autorisent de tels rassemblements dans le but de permettre aux pensionnaires de fraterniser, le temps de la fête, avec d’autres gamins de leur âge venus de l’extérieur. Et ce 25 décembre, ils sont vraiment nombreux, ces gosses venus de l’extérieur. Au bout de quelques minutes, il est impossible de distinguer les pensionnaires des autres visiteurs. La communion est totale. Dans la joie et la gaieté, les enfants s’amusent en riant.
Préparation psychologique des orphelins à la fête
Depuis des jours, les enfants, de façon générale, attendent impatiemment ce jour de Noël. Il est de tradition de leur accorder une attention particulière ce jour-là, en leur offrant des cadeaux, de nouveaux habits et un copieux repas.
Concernant les orphelins de Bingerville au nombre de 250 personnes dont l’âge varie entre 4 et 22 ans, les encadreurs disent avoir pris des dispositions allant dans ce sens. Déjà, le samedi 4 décembre, ils ont pris part à un « arbre de champêtre » dans la forêt du Banco. Le mercredi 15 décembre, il leur a été consacré tout comme aux pensionnaires des autres orphelinats de Côte d’Ivoire, un arbre de Noël, organisé par la ministre de la Femme, de la Famille et de l’Enfant, Nassénéba Touré. En outre, le chef de l’État, Alassane Ouattara et son épouse Dominique, ont reçu ces enfants de Bingerville parmi leurs invités de marque, au traditionnel arbre de Noël organisé par la présidence de la République. Depuis, les jours qui se sont succédé jusqu’au 25 décembre, ont été des occasions de fête. Généralement, ces périodes intervalles sont choisies par des organisations non gouvernementales (ONG), des ambassades, des entreprises ou des particuliers pour vivre des moments de partage, de convivialité et de fraternité avec les orphelins, bien sûr, dans le strict respect des mesures barrières dans la lutte contre la COVID-19, édictées par le gouvernement.
« Nous les mettons dans la chaleur de la fête. Des gens se disent, comme ce sont des orphelins, il faut penser à eux pendant les périodes de fête. Ce sont des entreprises, des particuliers, des associations, des personnes anonymes. Ces périodes sont des moments de joie pour les enfants », fait savoir Oullé Eliane, chargée du service socioculturel à l’orphelinat de garçons de Bingerville.
Ambiance le jour de la naissance du Christ
Le jour J de la célébration de la nativité, la cour de cet orphelinat a enregistré diverses animations. À l’exception d’un groupe des tout-petits conviés à une autre cérémonie au Plateau, ceux restés sur place ont pleinement profité de la fête.
Ils étaient parfois sollicités par leurs encadreurs pour réceptionner des dons au profit de la communauté. Les donateurs étaient de tout âge, venant de divers horizons. Chacun, guidé dans ses actes par des intentions qui lui sont propres.
Parmi ces bienfaiteurs, figurent trois jeunes gens qui se distinguent par leur l’âge. Ils disent avoir créé une ONG dénommée « Tu comptes pour moi » dont l’objectif est de venir en appui aux enfants malades, ainsi qu’aux orphelins.
« Nous avons mis sur pied, cette ONG pour soutenir les enfants malades et les orphelins. Cette année, nos amis, nos familles ont collecté des fonds pour acheter des jouets que nous sommes venus vous remettre. Nous savons que pendant ces fêtes, des enfants n’ont pas la chance d’avoir les parents à leurs côtés. C’est le sens de notre démarche », soutient Krépi Kriska Livane. Toujours en notre présence, les dons ne faisaient qu’affluer.
Tanoh Edvance Nauris, âgé de 15 ans, en classe de seconde au Lycée Garçons de Bingerville, se confie : « Nous avons mené des activités avec des donateurs qui nous ont remis des cadeaux et ont bien voulu passer des moments agréables avec nous. Je suis heureux quand on se retrouve entre nous frères, nous nous amusons. Nous savons que le Bon Dieu veille sur nous ».
Et le jeune Dafra Salomon, 17 ans, pensionnaire de l’orphelinat de Bingerville et en première année d’université, de renchérir : « Nous sommes très heureux, vu que nos papas et mamans, les éducateurs, font tout ce qui est en leur pouvoir pour nous rendre heureux comme les autres enfants. Il faut les remercier pour cela. Ils ont des familles qu’ils abandonnent pendant les jours de fête pour venir prendre soin de nous. Je suis reconnaissant à cet orphelinat pour ce que je suis aujourd’hui. J’ai reçu trois cadeaux. Nous sommes regroupés à différents niveaux de classe. Donc, quand on retrouve nos petits frères qui viennent à nous vers les 16 h pour jouer au football, c’est la joie. Nous ne faisons pas de distinctions entre nous, parce que nous sommes pareils. Ils sont absents, nous sommes tristes ».
Un esprit de famille perpétué
Lors de notre passage à l’orphelinat de garçons de Bingerville, nous avons été frappé par la politesse des enfants et la convivialité des encadreurs. Tout visiteur est d’office appelé « papa » ou « maman » en fonction du sexe. Ce rapport de père et mère est entretenu entre les pensionnaires et le personnel administratif, mais également entre les collaborateurs de service. Le travail se fait à la chaine, dans une solidarité agissante. D’ailleurs, c’est cet esprit qui guide les encadreurs dans la distribution des jouets. « Nous priorisons les jeux de communauté, les jeux de famille pour préserver l’unité entre les enfants. Ils ont également reçu des voitures, des ballons pour le sport », précise Mme Oullé.
Venance Kokora