Plus de 3 décennies après son arrivée en Côte d’Ivoire, la Gymnastique peine à exister. Les nombreuses difficultés structurantes freinent surtout son développement.
Elle tente, tant bien que mal, de sortir du coma profond dans lequel elle était plongée depuis des années. La Gymnastique ivoirienne se cherche. Mais, c’est surtout ses repères qu’elle peine à trouver dans un environnement sportif ivoirien, peu favorable à sa pratique. Plus de 33 ans après ses premiers pas en Côte d’Ivoire, en 1989, la Gymnastique reste aujourd’hui encore, une discipline très peu connue. Si ce sport attire très peu de personnes comparativement au football ou au taekwondo, c’est aussi parce qu’il est empêtré dans ses difficultés structurelles.
La gymnastique (ou dans le langage courant simplement gym) est un terme générique qui regroupe aujourd'hui, des formes très diverses de disciplines sportives, pratiquées pour le loisir ou la compétition. La discipline regroupe à elle seule, 9 spécialités. Il s’agit de la gymnastique artistique ; la gymnastique rythmique ; le trampoline ; la gymnastique acrobatique ; la gymnastique aérobic et le tumbling. Le terme est aussi appliqué à des formes d'activités dites gymniques, plus ou moins liées à la santé ou à la condition physique des personnes la pratiquant, telles que l'aquagym ou le fitness. Nous sommes allés à la rencontre de ce sport, qui s’est vu dans l’obligation de faire quelques réajustements afin de pouvoir faire face aux réalités sous nos tropiques. Suzanne Wolber, actuelle présidente de la Fédération ivoirienne de gymnastique et disciplines associées (FIGYM), depuis plus d’une décennie, consacre sa vie à la Gym. Elle dit y met aussi son énergie et beaucoup de moyens. Visiblement pas suffisant pour une pratique normale de ce sport en Côte d’Ivoire.
Empêtrée dans les difficultés
Le site de l’espace Agora de Koumassi est le lieu utilisé pour les activités de la fédération. La fédération ne dispose pas d’un gymnase où elle peut dérouler tout son programme de promotion. Pour pallier cet état de fait, elle se propose de développer deux autres formes de gymnastiques pour contribuer à une cohésion entre la population par une pratique en tout lieu, ne demandant pas une installation spécifique et sans discrimination d’âge ni de genre. « Au vu de toutes ces difficultés et du choix de notre thème : « Cohésion Sociale par la Gymnastique », nous avons opté pour une gymnastique ne nécessitant pas un matériel spécifique et accessible à tout le monde sans distinction d’âge ni de genre », nous apprend-elle. Ce choix, dit-elle, se justifie par le manque de matériel. La gymnastique est certes, un sport qui met en valeur, le corps dans son entièreté, mais faut-il le souligner, il ne se pratique pas sans outils. Dans notre pays, c’est justement à ce niveau que ça coince. Les agrès, les poutres, les barres asymétriques, les chevaux, les anneaux ou encore les barres parallèles, coûtent une fortune. Il faut débourser entre 600.000 et 1 million Fcfa, et quand on connaît les réalités sous nos cieux, on peut dire que ce n’est pas donné. Pour la présidente, « c’est un handicap » pour une pratique normale de la Gym. Voilà pourquoi elle dit avoir opté pour la pratique de la gymnastique acrobatique. « Elle s’exécute à deux, trois ou quatre sans restriction de genre. Et elle se pratique sur un tapis », informe Mme Suzanne Wolber. Dans les faits, devant le manque de salles appropriées, c’est sur le sol, sur du sable que les athlètes réalisent leurs figures. La conséquence directe, c’est que les gymnases ivoiriens ne sont pas qualifiés pour prendre part à des compétitions internationales qui prennent en compte tous les outils.
Des défis à relever
Autres difficultés freinant le développement de la discipline, l’épineuse question de la formation des formateurs. De presque rien, avec 2 clubs, la fédération de Gym compte aujourd’hui, 14 clubs. Une vulgarisation qui réjouit la présidente Suzanne Wolber. Toutefois, la question de la formation des encadreurs demeure pendante. « Le nombre d’entraineur et de juge est largement insuffisant ; certaines salles privées nous ont sollicités pour avoir des entraîneurs afin d’ouvrir une section de gymnastique en leur sein, mais nous n’avons pas pu répondre positivement à leurs attentes. Il faut que la mise à niveau des entraîneurs se fasse très rapidement », exhorte la présidente qui doit céder son fauteuil à une nouvelle équipe dirigeante d’ici fin juillet 2022. Cette remise à niveau exige de faire appel, à l’en croire, à des experts pour partager leur savoir. Selon Mme Wolber, l’une des priorités de son successeur, sera de rendre la gymnastique ivoirienne assez compétitive au plan international : « c’est un challenge que la nouvelle équipe devra relever ». À tous ces obstacles structurants, il faut ajouter l’absence de siège et d’archives.
Manuel Zako