Le Cameroun toujours sous pression
Après les lumières, les strass et les paillettes de l’ouverture de la Coupe d’Afrique des Nations, retour à la réalité.
Au lendemain de l’ouverture de la compétition, le Cameroun doit faire face à des questions d’insécurité. Même si on sait que le pays de Samuel Eto’o a pris toutes les dispositions pour offrir à l’Afrique une CAN sans accroc, l’agression lundi soir, des journalistes algériens, laisse entrevoir quelques inquiétudes. Le risque zéro n’existe pas certes, mais cette agression n’est pas anodine. Le pays des Lions Indomptables, après tout ce qu’il a pu supporter comme pression avant la compétition, se doit de garantir aux milliers de visiteurs qui ont fait le déplacement, le minimum de sécurité aussi bien dans les stades qu’en dehors, dans les rues. Dimanche 9 janvier, vers 22 heures en effet, trois journalistes algériens ont été violemment agressés à quelques mètres de leur hôtel, le Y, à Douala.
Des journalistes pris pour cibles
« Je pense qu’on a dû nous repérer. On l’a remarqué après, mais le lampadaire habituellement allumé près de notre hôtel était éteint. C’était un guet-apens », a affirmé Mehdi Amazigh Dahak, l’une des victimes, fondateur du journal en ligne DZfoot. Après avoir couvert l’ambiance du match d’ouverture entre le Cameroun et le Burkina Faso (2-1), lui et ses deux confrères d’infortune, prévoyaient de se rendre au restaurant, quand plusieurs personnes leur sont tombées dessus. « Ils étaient entre trois et cinq. Nous nous sommes retrouvés au sol, ils nous ont agressés à l’arme blanche. Un confrère a reçu un coup de couteau au dos et à la jambe, mais sans grande gravité. Ils nous ont demandé de leur donner tout ce que nous avions », raconte Mehdi Amazigh Dahak. Les quidams ont pu subtiliser, entre autres, un passeport et les trois téléphones de leurs victimes. Selon le récit du journaliste, la police locale aurait mis plus d’une heure avant d’arriver à l’hôtel et de les escorter par la suite jusqu’à l’hôpital. « Et elle est venue parce que nous avons joint le responsable de la presse de l’équipe algérienne, qui a lui-même averti les autorités, et que l’affaire a commencé à être médiatisée sur les réseaux sociaux », regrette Mehdi Amazigh Dahak. « Mais à part nous entendre, elle n’a pas fait grand-chose », déplore l’infortuné.
Ne pas gâcher la belle fête
La Confédération africaine de football (CAF) a condamné « avec force, cet acte indigne et exprime sa solidarité et ses vœux de bon rétablissement aux victimes », tout en demandant aux autorités camerounaises, « l’ouverture d’une enquête ». Dans son communiqué publié hier lundi 10 janvier, l’institution en charge de la CAN « invite les Camerounais et tous les intervenants à s’abstenir de tout acte de provocation et de violence pour ne pas gâcher la belle fête du football qu’est la CAN. Les pouvoirs publics et les organisateurs ont besoin de la contribution de tous pour assurer à tous les participants et aux représentants des médias de tous les pays, une sécurité optimale ». En conférence de presse ce même lundi, Djamel Belmadi, le sélectionneur de l’Algérie a apporté son soutien aux trois journalistes : « Que justice soit faite, je n’ai pas de doute là-dessus. On espère que ces choses ne se répéteront plus, on a envie de parler de football, on est tous venus ici pour la grande fête du football africain ». Outre l’insécurité qui peut régner dans les rues de Douala et autres, un parfum de crainte embaume aussi le tournoi. Plusieurs analystes le redoutaient. C’est désormais confirmé. Les groupes séparatistes entendent profiter de la CAN pour exiger la libération de leurs membres. Certains groupes armés ont promis de perturber la compétition et ont envoyé des lettres de menaces aux équipes qui vont jouer à Limbé et s’entraîner à Buea, dans le Sud-Ouest du pays. Il faut rappeler que le Cameroun est confronté à une guerre civile opposant depuis 2017, l’armée et les séparatistes des régions anglophones.
Les séparatistes veulent profiter de la CAN
À cela, il faut ajouter les risques d’attaques des djihadistes de Boko Haram et du groupe Etat islamique. Toutes ces réalités mettent davantage au goût du jour, la question de la sécurité des milliers de visiteurs présents à la CAN. Selon des médias locaux, Ces groupes séparatistes qui avaient pour habitude de circonscrire leurs actions dans les régions du Nord-Ouest, Sud-Ouest, annoncent avoir déjà positionné leurs membres dans les principales villes du pays, dont Douala et Yaoundé. Spécialistes dans les objets explosifs improvisés, ces groupes armés séparatistes constituent une véritable menace pour la CAN 2022. Pour parer à toutes éventualités, l’armée et les forces de sécurité camerounaises ont été déployées dans les différentes régions pour éviter de nouvelles attaques. La sécurité a aussi été renforcée au niveau des aéroports comme dans les principales artères de la ville.
Manuel Zako