Société

Enquête/Cinéma : Dans l’univers du films X ou films pour adulte en Côte d’Ivoire

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Autrefois réduite aux Occidentaux, l’industrie du porno gagne de plus en plus l’Afrique avec l’arrivée sur le continent des chaines cryptées. Pourtant, considéré comme un sujet tabou, le porno est de plus en plus prisé par les Africains, notamment les Ivoiriens qui se bousculent sur les plateaux de tournage loin des regards indiscrets. Nous avons fait une incursion dans cet univers discret pour mieux cerner tous ses contours.

Comment Abidjan est devenue la capitale du porno continental

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C’est en 2019 que le Français Marc Dorcel lance sur le continent, la première chaîne porno « 100% africaine ». Il acquiert la diffusion sur le bouquet de Canal +. Avec les restrictions de certains pays sur la consommation et la réalisation des films X, la chaine sollicite des producteurs et réalisateurs indépendants, avec en ligne de mire, des acteurs locaux. Une politique qui vise à ‘’africaniser’’ et ‘’tropicaliser’’ ces productions qui ne tarderont pas à être du goût des consommateurs. Au total, 25 pays sur le continent suivent cette nouvelle façon de faire. Si au départ, les contenus diffusés reposaient essentiellement sur des productions de moyenne qualité pour la plupart filmées avec des caméras amateurs, de grands moyens seront finalement déployés pour des rendus beaucoup plus professionnels. « À nos débuts sur le continent, nous avions des productions de très moyenne qualité », reconnait Laura, directrice des chaines télé du groupe 1979 SAS basée à Paris, récemment de passage à Abidjan. Cette première phase expérimentale portera très vite ses fruits. Les pays africains dans lesquels les audiences de la chaine vont grimper, seront ciblés et de grands moyens seront mis à contribution. Ainsi, la Côte d’Ivoire et le Cameroun seront reconnus comme très réceptifs à ces films. Dès lors, plusieurs castings seront organisés dans la toute grande discrétion pour dénicher des acteurs. Comment Abidjan est devenue la capitale des films pour adultes À Abidjan, le projet est confié à des réalisateurs bien connus. Et les sites de tournage seront bien loin de la capitale administrative. Quant aux informations afférentes au casting, elles seront véhiculées pratiquement sur la base du réseautage et du bouche-à-oreille par les producteurs. « C’est une fois dans un bar à Yopougon que le manager m’a vu discrètement pour me demander si cela m’intéressait d’être actrice de film. Lorsque j’ai répondu par l’affirmative, il m’a filé le numéro du producteur et je suis partie au casting. C’est une fois sur place que je me suis rendu compte de ce à quoi j’avais vraiment affaire. J’ai finalement décidé de saisir cette opportunité d’être actrice quoique ce soit dans un film pour adulte », raconte Diva, une actrice aujourd’hui égérie de la chaine ‘’Dorcel TV Africa’’. Au départ donc discrets, ces castings ont fini par être beaucoup plus populaires. Et de plus en plus d’Ivoiriens ont fini par s’y intéresser.

Plus de 2 500 personnes lors des castings

Ce sont plus de 2 500 personnes, selon nos investigations, qui prennent part à chacun des castings de tournage organisés par les producteurs indépendants. Simple curiosité ou envie de se faire de l’argent ? L’un des membres d’une des équipes de production explique que les hommes sont plus nombreux que les femmes. À l’en croire, ceux-ci, convaincus de leurs grandes prouesses sexuelles, n’hésitent pas à répondre favorablement à ces castings. Mais, dit-il, une fois sur place, ils comprennent la réalité des tournages, puisque ne répondant pas à tous les critères. Pour la plupart, pensant au gain facile, ils sont souvent désarçonnés lorsqu’il s’agit même de camper un rôle sans qu’ils ne soient encore retenus pour le tournage. Si la quête du gain appâte certains, d’autres sont plus portés par la popularité, la célébrité et l’envie de vivre leur sexualité en toute liberté. « Il est vrai qu’au départ, ça ne m’intéressait pas d’être actrice pour les films X, mais j’ai fini par m’y faire et c’est devenu une passion pour moi », explique une autre actrice.

Réalités de tournages

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Comme tout film, les tournages pour films X ne sont pas aussi faciles, à en croire des témoignages recueillis. D’abord, dans le cas de Dorcel TV Africa, une pile de tests, quatorze au total, sont réalisés près de quinze jours avant les débuts de chaque tournage. Un accent particulier est mis sur l’hygiène corporelle. Et le feu des projecteurs avec la présence de membres de l’équipe de tournage, n’est pas fait pour arranger les choses. « Certains acteurs n’ont pas pu tenir avec la présence des lumières et des caméras. Ils ont dû abandonner le tournage. D’autres, les hommes notamment, il fallait attendre plusieurs heures avant qu’ils ne reprennent leurs esprits, car tout le système joue contre leur érection. Pour dire que ce n’est pas aussi facile comme certains nouveaux acteurs pourraient le penser », confie un réalisateur indépendant.

Une charte d’éthique imposée

En partenariat avec une ONG locale dans chacun des pays où des tournages doivent se faire, les réalisateurs et producteurs indépendants ont l’obligation de respecter une charte d’éthique. Pour le cas de la Côte d’Ivoire, c’est le représentant de l’ONG ‘’Happy Mum’s’’ qui veille sur les plateaux de tournage au respect de ladite charte. Cette charte stipule entre autres, que l’acteur doit être consentant et « réaliser, aux frais de la production, un test HIV et Hépatite B maximum 14 jours avant le tournage et un test Covid au maximum 72 heures avant le tournage » et surtout n’accepter « aucun acte de pénétration sexuelle sans préservatif ». Pour Sita dont l’ONG a été cooptée pour suivre et certifier les tournages, elle a l’obligation de s’assurer que les acteurs sont « protégés, bien traités et ne sont pas brutalisés ni violés, mais consentants ».

Philip Kla

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