Société

Adja Assana Bakayoko, présidente de l’Ong ‘‘Albinos j’assume’’ : « L’État a beaucoup fait pour les albinos, mais… »

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Ce dimanche 13 juin a marqué la Journée internationale de sensibilisation à l’albinisme. A l’occasion de cette édition, L’Avenir a accordé une interview à la présidente de l’association « Albinos, j’assume ». Assana Bakayoko se félicite de l’évolution des mentalités à propos de la stigmatisation des albinos en Côte d’Ivoire. Non sans inviter les pouvoirs publics à faire davantage d’efforts pour intégrer cette population vulnérable.

Le 13 juin de chaque année, le monde entier célèbre la Journée internationale de sensibilisation à l’albinisme. Que représente cette journée pour vous en Côte d’Ivoire ?

La célébration de cette journée est quelque chose d’énorme pour nous. Énorme, parce que c’est une journée qui a été décrétée par les Nations Unies.  Ce qui veut dire que le monde entier est conscient de nos difficultés et de la discrimination qui est faite à l’endroit des personnes albinos. Les Nations Unies sont conscientes de cela, c’est pour cela qu’elles ont décidé de décréter une journée pour ces personnes-là, pour qu’on puisse se souvenir d’elles, en faisant leur promotion, leur valorisation. Cela nous rend heureux parce que le monde entier se soucie de nous. Cela nous donne de l’importance.

 

Quelle sera la particularité de l’édition de cette année ?

La particularité de cette journée, nous avons fait un défilé de mode dénommé ‘‘Défilé de talent’’. Cette dénomination ‘‘Défilé de talent’’ pour montrer que les personnes albinos peuvent être un modèle. ‘‘Défilé de talent’’ pour dire que les albinos peuvent être chanteurs, mannequins, comédiens, couturiers… C’est une manière pour nous de faire la promotion des personnes albinos qui exercent déjà, notamment dans les métiers de l’art, de la main, de la culture… Nous avons aussi fait une série d’allocutions et des prestations artistiques. Il y a eu une communication sur les droits des personnes albinos. Cela a été fait par la section Côte d’Ivoire d’Amnistie international. Il y a eu également une communication sur le volet dermatologique de l’albinisme.

 

Il est de notoriété que vous êtes souvent victimes de pratiques inhumaines comme les sacrifices humains... Quelle est la situation actuelle ?

Les choses ont beaucoup évolué et il faut féliciter l’État ivoirien qui a beaucoup fait, mais les efforts doivent continuer. C’est d’ailleurs, le sens de la célébration de cette journée qui vient pour sensibiliser sur le fait que les personnes albinos sont des personnes normales comme tout le monde. Les gens nous voient maintenant autrement. Il y a eu un film qui a été réalisé sur les albinos et à travers ce film, les gens ont compris que les albinos sont comme tous les autres hommes. Cela veut dire qu’en termes de discrimination, en termes de sacrifice, nous sommes tout de même protégés, parce que notre situation n’est pas comme celle des pays de l’Afrique de l’Est où les cas de sacrifice humains sont plus importants.

 

Pouvez-vous citer les problèmes que les albinos rencontrent le plus en Côte d’Ivoire ?

Les problèmes que rencontrent les albinos en Côte d’Ivoire sont de plusieurs ordres. Au niveau de la santé, précisément au niveau de la peau, nous avons une peau vraiment fragile. Plus tu es exposé au soleil, plus tu es susceptible d’avoir le cancer de la peau. Un autre problème que nous rencontrons, est celui de l’emploi. Les albinos font partie des personnes handicapées. Or, lorsqu’on est une personne handicapée, il est difficile d’avoir un emploi. Nous avons un problème d’yeux et les gens hésitent à nous confier des responsabilités. À ce niveau donc, nous souhaitons que l’État fasse quelque chose en signant un décret qui nous permettra de bénéficier d’un recrutement dérogatoire.

 

Voulez-vous dire que cette dérogation accordée par le gouvernement n’est pas suffisante ?

Nous saluons cette faveur du gouvernement. Certains en ont bénéficié. C’est mon cas. C’est à travers cette dérogation que j’ai intégré la Fonction publique en 2020. Mais lorsque nous intégrons la Fonction publique par ce moyen, nous ne sommes pas considérés pour le diplôme que vous avons obtenu. On nous diminue en quelques sorte. C’est un peu frustrant.

Un autre point que nous attendons, c’est la convention sur les droits des personnes handicapées. La Côte d’Ivoire a, certes, ratifié cette convention, mais elle ne l’applique pas encore.

Nous souhaitons qu’au-delà du recrutement dérogatoire, on tienne compte de nos diplômes quand nous sommes recrutés. Souvent, nous sommes sous-évalués par ces recrutements dérogatoires. Il faut aussi que l’État fasse en sorte que les entreprises privées puissent recruter les personnes handicapées. Il y a une loi qui l’autorise, mais elle n’est pas appliquée. Il faudrait que cela soit appliqué. Du point de vue de la santé, nous plaidons pour que la Couverture maladie universelle puisse prendre en compte, les besoins dermatologiques et ophtalmologiques des personnes albinos. Cette assurance ne prend pas en compte ce besoin des personnes albinos qui sont en général pauvres.

 

Réalisée par Ernest FAMIN

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