
M Thiam et certains de ses collaborateurs crient à l'apatridie. Dans un entretien accordé à un journal, Tidjane Thiam affirme qu'il serait apatride ?
Il n'en est rien. Il ne peut pas être un apatride contrairement à ce qu'il raconte et à ce qui se dit. C'est une stratégie de diversion visant à occulter la réalité de fait. Je vous avais indiqué dans l'une de mes précédentes interventions que M Thiam est né le 29 juillet 1962 d'un père qui a été naturalisé Ivoirien le 06 novembre 1962. Ainsi conformément à l'article 45 du code de la nationalité, M Thiam qui était mineur au moment où son père a été naturalisé est devenu Ivoirien de plein droit. Ensuite M Thiam dont la mère est Ivoirienne d'origine et donc lui-même Ivoirien d'origine ; il a la nationalité d'attribution. En raison de cette filiation qui est immuable, Tidjane Thiam ne peut pas être apatride.
Il estime que les arguments qui justifient sa radiation mettent en cause ses certificats de nationalité donc sa nationalité !
Là encore, ce n'est pas correcte et c'est un raccourci sans fondement. La justice ivoirienne indiquait dans sa décision que les certificats de nationalité de M Thiam obtenus en 2020 et 2022 alors qu'il avait la nationalité française sont devenus inopérants. Si en application de l'article 48, M Thiam avait perdu la nationalité ivoirienne le 24 février 1987, il a recouvré cette nationalité le 19 mars 2025 avec la fin de son allégeance à l'Etat français. Il revient donc à M Thiam de se présenter devant les autorités judiciaires compétentes avec les documents de ses père et mère ainsi qu'une copie de l'acte constatant la fin de son allégeance à l'Etat français en vue d'obtenir un certificat de nationalité ivoirienne. En tout état de cause, la nationalité ivoirienne d'origine n'est pas conférée par le certificat de nationalité qui n'est qu'un acte administratif constatatoire. La nationalité d'attribution en Côte d'Ivoire est conférée par la filiation. Dès lors que les deux parents de M Thiam sont Ivoiriens, il est lui-même Ivoirien. Il faut que les gens arrêtent de jouer avec les questions de nationalité en voulant créer de l'émoi au sein des populations. M Thiam n'est pas un apatride et je mets quiconque au défi de nous prouver le contraire.
si une personne déclare qu'elle est ivoirienne par attribution c'est à dire qu’en raison de sa filiation, elle serait ivoirienne d'origine
Lors du précédent entretien après la décision de radiation de la liste électorale du président du Pdci, vous avez parlé du constat et de la contestation de la nationalité, une expression qui semble n’avoir pas été bien compris
Ce qu'il faut entendre par contestation de la nationalité est très simple. Contester la nationalité signifie contester les conditions d'obtention de la nationalité ivoirienne par un individu. En effet si une personne déclare qu'elle est ivoirienne par attribution c'est à dire qu’en raison de sa filiation, elle serait ivoirienne d'origine. Par exemple cette personne déclare précisément qu’elle née d'au moins un parent ivoirien comme le prévoit l'article 6 du code de la nationalité. La contestation de la nationalité ivoirienne de cette personne va consister ici à remettre en cause l'origine ivoirienne de ce parent ou démontrer que cette personne n'est pas née de ce parent ivoirien.
Et si la personne est ivoirienne par acquisition ?
Lorsqu'il s'agit de la nationalité par acquisition qui s'obtient soit par l'adoption, soit par le mariage, soit par décision de l'autorité (naturalisation ou réintégration). Ici la contestation va porter sur la manière dont vous avez acquis la nationalité ivoirienne. Pour un enfant adopté, c'est la remise en cause de cette adoption ; pour l'acquisition de la nationalité par le mariage, c'est la remise en cause soit du mariage, soit des conséquences attachées à ce mariage. En effet, ce mariage peut bien exister, mais il peut ne pas permettre à l'étranger d'acquérir la nationalité ivoirienne. C'est le cas par exemple d'un étranger qui se marie à une ivoirienne à l'étranger devant les autorités compétentes étrangères. Pour ce qui est de la naturalisation et de la réintégration, la contestation va consister à remettre en cause cette naturalisation ou cette réintégration qui n'a jamais existé. Comme vous le voyez bien, c'est la base même des conditions d'obtention de la nationalité ivoirienne qui est remise en cause.
Qu’en est-il de M Thiam ?
Dans le cas Tidjane Thiam, les requérants n'ont jamais remis en cause sa filiation ivoirienne. Ils n'ont jamais déclaré qu'il n'est pas Ivoirien. Ils se sont contentés de dire et de démontrer qu'au moment où il s'inscrivait sur la liste électorale, il avait la nationalité française exclusive car ayant perdu la nationalité ivoirienne en application de l'article 48 du code de la nationalité ivoirienne.
Revenons au constat de la nationalité. Comment fonctionne-t-il ?
Pour ce qui est du constat de la nationalité, il s'agit d'apprécier à l'instant précis la nationalité dont dispose l'individu en application du droit en vigueur. La question qui se pose est de savoir, à cet instant précis, quelle était la nationalité de l'individu : était-il Français ou Ivoirien ? C'est ce constat qu'a fait le tribunal en disant qu'au moment où M Thiam s'inscrivait sur la liste électorale, il était Français en application de l’article 48 du code de la nationalité parce qu'il avait perdu la nationalité ivoirienne depuis le 24 février 1987.
Entretien réalisé par
Yacouba Doumbia