L’opposition va mal. En témoigne cette accumulation de mauvais signaux qui montrent que le mur est couvert de lézardes. La dernière en date, c’est ce couac qui s’est produit à Bonoua, le samedi 21 septembre 2024, quand il s’est agi pour chaque partie prenante d’apposer sa signature au bas du document comportant l’ensemble des réclamations de l’opposition relativement au processus électoral.
Des tensions entre plusieurs partis
Cette fois, le document n’a pas été signé par le parti de Laurent Gbagbo, le PPA-CI, alors que ce parti avait signé le premier jet le 9 juillet dernier au siège du PDCI-RDA. Preuve qu’il y a un malaise entre Simone Gbagbo, initiatrice de ce projet, et son ex-époux Laurent Gbagbo, dont le parti n’entend pas être à la remorque de l’ex-Première dame. Outre le PPA-CI, le camp Soro a été écarté, alors que son mouvement politique avait lui aussi paraphé le document le 9 juillet à la maison du parti septuagénaire. Ce qui avait d’ailleurs valu aux pro-Soro d’être rappelés à l’ordre par la justice, laquelle a estimé que ce mouvement dissous n’était pas légalement fondé à parapher le document.
Le couac du 23 septembre à Bonoua n’est, en réalité, que la face visible de l’iceberg des dissensions entre les partis de l’opposition. C’est, en effet, un truisme de dire qu’entre le PDCI-RDA et le camp Soro, d’une part, et le parti de Gbagbo, d’autre part, il y a sinon une tension, du moins un froid. Et cela, depuis que certains partisans de Soro ont des ennuis avec la justice pour avoir signé le 9 juillet, au siège du PDCI-RDA, le document comportant les réformes électorales réclamées par l’opposition, rassemblée autour de Simone Gbagbo. « En tant que parti de paix et de non-violence, le PDCI-RDA a toujours plaidé pour le respect de la constitution, considérée comme un pilier de la démocratie et condamné fermement l’utilisation de la violence comme moyen d’accès au pouvoir », avait déclaré le parti septuagénaire, laissant sous-entendre que certains des signataires du document du 9 juillet projettent de recourir à la violence pour accéder au pouvoir.
Se sont sentis visés et offensés le camp Soro et même le PPA-CI. Depuis lors, le « téléphone rouge » entre Tidjane Thiam et Gbagbo est coupé, rapportent certaines sources.
Entre le même Gbagbo et son ancien « bon petit », Charles Blé Goudé, les choses ne vont pas mieux. Et c’est peu dire. Celui-ci n’a-t-il poliment refusé de s’associer à l’appel de Bonoua, lancé par celui qui était son mentor hier ? « Si tu marches avec n’importe qui, n’importe quoi t’arrive », avait notamment lancé Blé Goudé pour dire que son parti, le COJEP, décline l’appel de Bonoua. Lequel appel n’a du reste pas rencontré l’adhésion de plusieurs partis de l’opposition, qui ont préféré rallier l’initiative portée par l’ancienne épouse Gbagbo.
Des luttes internes de positionnement
À côté de ces bisbilles entre partis de l’opposition, l’on assiste à des guéguerres internes dans certains partis de l’opposition et non des moindres. Le PPA-CI de Gbagbo est miné par une guerre larvée de positionnement, entre Ahoua Don Mello et d’autres caciques de ce parti, qui le soupçonnent de se préparer pour un scénario à la sénégalaise au cas où, finalement, le président du PPA-CI échouait à représenter le parti à la prochaine présidentielle. « Aussi dans la lutte interne, les initiatives sont en train d’être prises pour le canaliser ou lui briser les ailes en le plaçant sous surveillance », révèle le confrère Ferro Bally, dans un article publié sur Facebook.
La situation n’est guère reluisante au PDCI-RDA où le président dudit parti, Tidjane Thiam, est confronté à l’équation Jean-Louis Billon. À mesure qu’approche la prochaine présidentielle, l’homme d’affaires s’affiche de plus en plus, comme un caillou dans le soulier de Thiam, qui s’imaginait unique candidat du PDCI-RDA à la convention de ce parti. C’est peu dire qu’une telle guerre de positionnement fragilise le parti à l’emblème d’éléphant.
Last but no least : le FPI, à la tête duquel Affi N’guessan semblait couler des jours heureux, est lui aussi en proie à des dissensions internes. Après l’annonce de la rupture du partenariat qu’il avait signé avec le parti au pouvoir, le RHDP, Affi est l’objet d’une bronca de la part de certains poids lourds de son parti.
On le voit donc, en l’état actuel, l’opposition est loin d’être un bloc monolithique. À 12 mois de la prochaine présidentielle, il est fort à parier qu’elle pourrait rester ainsi désagrégée. Dans ces conditions, elle a peu de chance de l’emporter devant le parti d’Alassane Ouattara au prochain scrutin présidentiel.
Assane Niada