Politique

19 septembre 2002-19 septembre 2024 : Il y a 22 ans Soro prenait les armes contre Gbagbo

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Les éléments de la rébellion qui ont attaqué le régime Gbagbo le 19 septembre 2002
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Acteur clé du transfèrement de Laurent Gbagbo à la Cour pénale Internationale (CPI), Guillaume Soro et l'ex-chef de l'État font pourtant aujourd'hui ami-ami. Et pourtant, il y a 22 ans, le même Soro prenait déjà les armes contre le régime Gbagbo.

Près de deux ans après son accession au pouvoir, dans des conditions calamiteuses, Laurent Gbagbo est confronté à une rébellion dirigée par Guillaume Soro, alors âgée de 30 ans. Abidjan s'est en effet réveillée le 19 septembre 2002 avec des crissements d'armes de guerre. On apprendra plus tard, dans le courant de la journée, que c'est une tentative de coup d'État qui a fini par se muer en rébellion. Ayant subi une vigoureuse riposte de la part des forces loyalistes, les assaillants ont replié sur Bouaké et le Nord du pays. Au fil des jours, les populations découvriront que cette insurrection armée est le fait d'anciens soldats ivoiriens en rupture de ban et qui ont créé un mouvement armé, baptisé Mouvement patriotique de Côte d'Ivoire (MPCI), avec pour leader un certain... Guillaume Soro.

Un combat contre l’ivoirité

Dans une œuvre qu'il a écrite et qui est intitulée "Pourquoi je suis devenu un rebelle", l'ex-leader syndical a justifié le recours aux armes par la lutte contre la ségrégation instaurée entre Ivoiriens par la fumeuse idéologie de l'ivoirité. En 2021, à l'occasion du 19 anniversaire de l'éclatement de la rébellion, Soro justifiait ainsi cette insurrection armée: « Il y a 19 ans, de jeunes Ivoiriens, innocents, avaient rêvé de la liberté à la Che Guevara. Nous avions soif de voir une Côte d’Ivoire unie où il fait bon vivre », écrivait-il sur Facebook. Bien que précédée de quelques faits qui apparaissaient comme des signes avant- coureurs, cette brutale rupture de l'ordre alors établi, a surpris les tenants du pouvoir à l'époque des faits. La preuve, le chef de l'État d'alors, Laurent Gbagbo, était en visite à Rome en Italie quand son pouvoir a été attaqué. Passé l'effet de surprise, le régime Gbagbo va organiser la résistance. A ses côtés, des jeunes gens et des femmes de la société civile qui s'engagent à défendre la République.

La résistance avec les jeunes patriotes

Ainsi voit le jour l'alliance des jeunes patriotes, dirigée par Charles Blé Goudé, ancien leader syndical comme son adversaire qui dirigeait la rébellion. Les rassemblements successifs des jeunes patriotes, dont celui mémorable du 2 octobre 2002, vont permettre de maintenir à flot le pouvoir de Gbagbo, flingué par les hommes de Soro. Outre les jeunes patriotes, le pouvoir en place à l'époque était soutenu par une kyrielle de milices au nombre desquelles le Groupement des patriotes pour la paix (GPP) de Charles Groguhet; l’Union des patriotes pour la libération totale de la Côte d’Ivoire (UPLTCI) d'Eugène Djué. Durant, près d'une décennie, les rebelles du Nord et les milices du Sud vont écrire les pages sombres de l'histoire contemporaine de la Côte d'Ivoire. Ce fut une période de vives tensions qui aura fait des centaines de morts, plusieurs blessés et occasionné d'importants dégâts matériels. Avec pour conséquence des vies brisées à jamais.

De la rébellion à la guerre postélectorale

La situation de ni paix ni guerre qui a suivi le déclenchement de cette rébellion a été rythmée par de multiples initiatives de la communauté internationale en vue de ramener la paix sur les terres ensanglantées de Félix Houphouët-Boigny.Des missions de paix de la CEDEAO aux casques bleus de l’Opération des Nations-Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI), dont les forces françaises de la Licorne constituaient la colonne vertébrale, en passant par des résolutions des Nations-Unies, les accords de Lomé, d'Accra, de Pretoria. Finalement, cette crise ivoirienne au long cours a connu son épilogue en 2010 avec l'organisation de l'élection présidentielle, laquelle va conduire à nouveau à une autre tragédie, qui s'est soldée officiellement par 3000 morts. Une guerre postélectorale qui était comme un ultime avatar du processus déclenché par la rébellion du 19 septembre 2002. Cette fois encore, Guillaume Soro était au cœur de la machine militaire qui a fini par casser l'entêtement de Laurent Gbagbo à se maintenir au pouvoir après avoir été battu à plate couture dans les urnes. 10 ans après cette guerre postélectorale et 22 ans après l'éclatement de la rébellion, Soro et Gbagbo semblent avoir passé l'éponge sur ce tragique passé qui a vu le premier prendre, par deux fois, les armes contre le second. Que nous réserve l'avenir quant aux relations entre les deux hommes ? Bien malin qui pourra le dire.

Assane NIADA

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