Au risque de surprendre bon nombre d'analystes, je reste persuadé que Affi N'guessan a perdu. Le président légal du Fpi a eu plusieurs occasions pour se démarquer des opposants va-t-en-guerre et se reconstruire un chemin politique plus rationnel, cohérent et conséquent. Qu'en a-t-il fait ? Il a brouillé toutes ses cartes. Il s'est grillé avec ses anciens camarades par son avidité et s'est discrédité aux yeux de la communauté nationale et internationale par son activisme insensé à la veille de la présidentielle d'octobre 2020. Son sort est celui du célèbre beignet du Ramadan, le Gnomi. Grillé des deux côtés.
Revenu de Paris où, dit-il, il aurait été humilié, l'homme a eu la chance de voir son père politique, Laurent Gbagbo, à Bruxelles, il n'y a pas longtemps, pour vider le contentieux et se remettre en selle. Selon Laurent Gbagbo, à cette rencontre, Affi a voulu faire du chantage, en tentant, en sus, de le trucider politiquement. Comment a-t-il osé demander à son parrain d'être le président du Fpi et de faire de lui le vice-président avec rang d'intérminaire sur le terrain ? Gbagbo a beau être vieux, il n'est pas pour autant un gawa pour accepter une telle situation, alors qu'il a poussé de nombreux pions sur la scène politique et qu'il livrait bataille contre Simone Gbagbo. C'est ce jour que Affi s'est tiré une balle dans la tête. Qu'espèrait-il encore ? Qu'une fois à Abidjan, Gbagbo lui accorderait ce qu'il lui a refusé ? Comment a-t-il pu penser un seul instant que Gbagbo puisse lui concéder quelque chose aujourd'hui, alors qu'hier, encore faible, il a refusé de le faire ?
À la vérité, Affi espérait pousser à la faute Gbagbo, le présentant comme le diviseur commun. Après les aveux de Gbagbo, j'ai fini par comprendre que Affi s'est perdu et est perdu. À moins d'un cataclysme, l' upercut qu'il a reçu le laissera K.O un très long moment. Affi a été aux côtés de Gbagbo sans le connaître véritablement. Et Gbagbo a profité de l'occasion en or pour régler ses problèmes. En stratégie, cela s'appelle utiliser la force de l'adversaire contre lui-même. Et Affi ne devra que s'en prendre à lui-même. Il a toujours pris de mauvaises options. Bientôt, s'il n'y prend garde, il se retrouvera seul. Ceux qui l'entourent, pour beaucoup, vont le lâcher. Qui abandonnera le boulanger pour son apprenti. L'ancienne boulangerie aura vécu. Et comme tout ce qui est nouveau attire, la nouvelle boulangerie va attirer les anciens clients. On y fera du bon pain. Car le boulanger en chef sera à la manœuvre. Comme le blé, Laurent Gbagbo va moudre Affi dont la poudre servira à faire du bon pain.
Yacouba DOUMBIA
