Piqué au vif par cette mauvaise nouvelle, le parti de l’ancien président a rué dans les brancards. Après son porte-parole, Koné Katinan, qui est monté sur ses grands chevaux, c’est au tour de la cheffe de cabinet de Gbagbo, Me Habiba Touré, de nier l’existence d’une décision de justice privant celui-ci de ses droits civils et politiques. « On ne l’a jamais vue ! », a-t-elle pratiquement juré la main sur le cœur, sur les plateaux de la télévision Life TV le lundi 22 mai 2023. « Je mets d’ailleurs au défi quiconque se dit détenteur de cette décision de la publier et que les Ivoiriens voient si dans cette décision, on a retiré les droits civils et politiques du Président Gbagbo ! », a-t-elle encore martelé. Il n’en fallait pas plus pour que les réseaux sociaux s’enflamment le lendemain : des partisans de l’ancien chef de l’État agitant comme un épouvantail, ce défi lancé par l’avocate et cheffe de cabinet de Gbagbo.
Comme pour leur clouer le bec, une vidéo a circulé en fin de journée, dans laquelle il est fait état de la décision de justice qui a privé l’ancien Président de ses droits civils et politiques. On y voit, en effet, le président du Conseil constitutionnel, Koné Mamadou, rendre un arrêt relativement à la candidature de Gbagbo à l’élection présidentielle de 2020, que ses partisans avaient déposée à la CEI.
Se prononçant sur la recevabilité de cette candidature, Koné Mamadou estime que cette candidature ne saurait être recevable, vu que l’ancien président ne figure pas sur la liste électorale dont il a été retiré par la CEI. Et le juge des élections de revenir sur la deuxième décision de justice qui a été rendue après que le camp Gbagbo eut fait recours de la première décision privant celui-ci de ses droits civils et politiques, suite à sa condamnation à 20 ans de prison dans l’affaire du casse de la BCEAO.
« Il ressort de l’examen de ce dossier que M. Gbagbo Laurent ne figure pas sur la liste électorale à la suite de son exclusion de la liste ordonnée par la Commission électorale indépendante le 18 août 2020 et confirmée en dernier ressort sur son recours par ordonnance n°01 CE 2020 du 25 août 2020 du président du tribunal de première instance d’Abidjan statuant en matière de contentieux de la liste électorale », a indiqué le président du Conseil constitutionnel. Il en avait alors conclu que la « candidature de M. Gbagbo Laurent n’est pas conforme aux dispositions de l’article 48 du code électoral qui subordonnent la validité de la candidature à la présidence de la République à la possession préalable de la qualité d’électeur, laquelle résulte de l’inscription sur la liste électorale ». On apprend donc qu’une décision de justice avait bien privé Laurent Gbagbo de ses droits civils et politiques. En effet, au terme du procès pour braquage de la BCEAO durant la crise postélectorale, qui s’est tenu le 18 janvier 2020, l’ex-chef de l’État avait été condamné à 20 ans de prison et, dans le même temps, privé de ses droits civils et politiques par décision n°484/2018 du jugement et le n°870/11 du parquet. C’est à ce même procès que les prévenus Koné Katinan, Gilbert Marie Aké N’gbo et Dallo Désiré Noël, ont été condamnés. Si Katinan, lui figure sur la liste électorale, c’est parce qu’il a bénéficié de l’ordonnance d’amnistie n°2018-669 du 18 août 2018.
Par ailleurs, cette vidéo nous apprend que la décision de justice avait été contestée par voie judiciaire par le conseil de l’ex-chef de l’État, lequel avait été débouté, puisque la première décision a été confirmée. Voilà qui devrait éclairer la lanterne de Me Habiba Touré.
Assane Niada