Sacrée huitième lauréate du prix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix 2022, Angela Merkel voit ainsi reconnue son action humanitaire salvatrice ayant consisté à accueillir dans son pays, plus d’un million de réfugiés. Un prix qui vient couronner un parcours politique exceptionnel. Angela Merkel est, en effet, primée pour un acte politique posé l’année même où elle achevait son neuvième et dernier mandat à la tête du gouvernement allemand. Nous sommes en 2015. Poussés par les affres de la crise financière de 2010, des millions de migrants accourent aux portes de l’Europe pour y trouver refuge. Mais ils trouvent des portes closes, presque partout. C’est dans ce contexte qu’Angela Merkel, alors Chancelière allemande, leur ouvre grandement les frontières de son pays à un million d’entre eux, au risque de provoquer l’ire de certains adversaires politiques, notamment des partis d’extrême droite xénophobes et arabophones. Mais, elle fait le dos rond. C’est assurément ce courage politique qui lui vaut d’être sacrée lauréate du prix Félix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix 2022. « On peut dire qu'avec sa politique sur les réfugiés, elle a fait pour la première fois, une politique fondée sur des valeurs. C'était bien qu'elle ait fait preuve d'humanité », avait d’ailleurs, commenté en 2016, son ex-mari, le physicien Ulrich Merkel, interrogé par le quotidien Taz.
Parcours politique particulier
C’est que le parcours politique inspirant d’Angela Merkel lui a forgé un cuir épais. Née le 17 juillet 1954, d’une mère enseignante et d’un père pasteur, Angela Kasner de son nom de jeune fille, a troqué sa carrière d’universitaire, titulaire d’un doctorat en physique chimie, contre celle d’acteur politique, quelques temps après la chute du mur de Berlin en 1989. En effet, elle rejoint, en 1990, le parti de droite, Union Chrétienne-démocrate (CDU). En 1991, elle fait son entrée dans le gouvernement d’Helmut Kohl, où elle hérite du ministère des Femmes et de la Jeunesse. Poste qu’elle occupe jusqu’en 1994. Elle est, par la suite, nommée ministre de l’Environnement, de la Protection de la nature et de la Sécurité nucléaire, jusqu’en 1998. C’est cette année-là qu’elle est élue Secrétaire générale de la CDU, puis présidente de ce parti, deux ans plus tard, soit en 2000. En 2005, elle est élue Chancelière allemande, c’est-à-dire Première ministre et cheffe du gouvernement. Elle devient, à 51 ans, la première femme à occuper ce poste et la plus jeune de ses 7 prédécesseurs. Pour se hisser dans ce fauteuil, elle a triomphé de Gerhard Schröder, son prédécesseur. Elle sera régulièrement réélue jusqu’à effectuer autant de mandats que la Constitution lui permettait de faire : 4 mandats. Au terme du quatrième et dernier mandat, elle quitte le pouvoir en septembre 2021, soit après 16 ans passés au poste de Chancelière.
Son nom Merkel, elle le doit à son premier mariage avec le physicien Ulrich Merkel, avec lequel elle a contracté un premier mariage, en 1977. Une union qui n’aura pas fait long feu, puisqu’ils se sont séparés 5 ans plus tard. Mais elle a choisi de garder le patronyme de ce premier conjoint. Elle a, par la suite, épousé en 1998, un autre physicien du nom de Joachim Sauer, avec qui elle vit une retraite politique tranquille, depuis qu’elle a quitté la scène politique. Pour son engagement politique aussi bien dans son pays qu’à l’échelle internationale, Angela Merkel a été élue 8 fois, femme la plus puissante du monde par le magazine Forbes et était vue comme la personnalité la plus influente de l’Union européenne.
C’est cette femme qui n’a pas d’enfant et qu’on dit fan de football, engagée pour la cause climatique et idole des réfugiés, qui voit sa riche carrière politique couronnée par ce Prix Félix Houphouët-Boigny pour la recherche de la paix ; Prix qui lui sera remis ce mercredi 8 février 2023. « L’ensemble du jury a été touché par sa décision courageuse, prise en 2015, d’accueillir plus de 1,2 million de réfugiés venus notamment de Syrie, d’Irak, d’Afganistan et d’Erythrée. C’est une leçon qu’elle laisse à l’histoire », avait déclaré Denis Mukwege, président du jury, prix Nobel de la paix 2018, pour justifier le choix porté sur Angela Merkel. « La souffrance est universelle, les solutions à apporter à la souffrance doivent être universelles. Construire la paix consiste aussi à ouvrir les portes à ceux qui souffrent. Cette décision du jury vient rappeler que l’accueil des migrants est des réfugiés est un enjeu primordial », renchérit Audrey Azoulay, Directrice générale de l’UNESCO.
Assane Niada
