Blé Goudé arrive, le PPA-CI a chaud, pourrait-on dire trivialement, tant les relations entre le fer de lance de l’ex-galaxie Gbagbo et ses amis d’hier, se sont profondément dégradées. En effet, il n’y a pas si longtemps, le président du Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (COJEP) et des proches collaborateurs de l’ancien président se sont livrés à une passe d’armes, à distance. Depuis La Haye aux Pays-Bas où il séjourne depuis qu’il a été acquitté par la Cour pénale internationale (CPI), Blé Goudé s’est, en effet, fendu de propos allusifs dont on pouvait deviner aisément les destinataires.
Rien ne va plus entre Blé Goudé et Damana Pickas
À l’occasion d’une activité dénommée « face au miroir », il a lancé ces mots : « Je n’accepte pas que quelqu’un me réveille parce qu’il est proche du président Laurent Gbagbo et il va reprendre dans mes oreilles toutes les accusations farfelues de leurs cyber-activistes (…) ». Et l’ex-leader des jeunes patriotes d’ajouter : « Est-ce que tu connais les rapports entre le président Laurent Gbagbo et moi ? Est-ce que tu sais ce que lui et moi, on s’est dit ? Est-ce que tu sais ce que lui et moi, on continue de se dire ? Personne ne m’opposera au président Laurent Gbagbo ». Des propos qui, pour certains observateurs, étaient destinés à Damana Pickass, l’un des hommes forts du camp Gbagbo.
Et comme une réponse du berger à la bergère, celui-ci avait saisi une tribune pour décocher des piques à Blé Goudé, sans le nommer. « Ceux qui étaient avec nous et qui ne cessent d’envoyer des piques au président Gbagbo, à envoyer les attaques au président, regardez seulement ce qui va leur arriver », avait-il lancé d’un ton pour le moins menaçant. Et comme pour lever toute équivoque quant au sentiment d’hostilité qu’il nourrit à l’égard du président du COJEP, il a ajouté : « Attention, attention, on s’est tu parce qu’il avait une situation. Mais on ne va pas toujours se taire. Ce que vous dites là, nous, on a la réponse. La réponse n’est même pas au niveau de Gbagbo. La réponse est à notre niveau. Mais regardez seulement, on va vous faire plaisir. Et ce sera au coup par coup. Quand tu donnes un coup, nous on te donne cinq ». Depuis lors, l’on est passé d’une guerre à fleurets mouchetés à une guerre ouverte entre Blé Goudé et les hommes clés du « gbagboland ». Au point que les deux camps semblent avoir atteint le point de non-retour.
Gbagbo et Blé Goudé, c’est gâté
Avec Laurent Gbagbo non plus, les relations ne sont plus au beau fixe. Du moins, pour ce qu’il nous a été confié. Plusieurs attitudes de l’ex-leader des jeunes patriotes ont fini par le brouiller avec celui qui, hier, était son mentor. D’abord, le fait que Blé Goudé ait choisi son camp quand les querelles de couple entre Simone et Gbagbo ont conduit à la procédure de divorce. L’ex-leader des jeunes patriotes n’a pas voulu se ranger dans le camp de ceux qui s’étaient retournés contre l’ex-Première dame pour mieux affirmer leur dévotion à Gbagbo. Une prise de position qui aurait déplu au président du PPA-CI. L’autre attitude que Gbagbo et son camp reprochent à Blé Goudé, c’est sa propension à remercier le Président Alassane Ouattara pour les actes qu’il pose pour notamment faciliter son retour au pays. À cela, s’ajoute sa tendance à demander pardon pour sa responsabilité supposée dans la guerre postélectorale et plus généralement, les violences qui ont déchiré le pays pendant une décennie. Un comportement qui n’est pas de nature à plaire aux Gbagbo ou Rien (GOR), qui n’ont jamais voulu faire acte de contrition, a fortiori saluer tout geste posé par Ouattara en leur faveur. En témoigne le peu d’égard qu’ils ont accordé à l’annonce faite il y a peu, par le chef de l’État, de dégeler les comptes de Gbagbo, de lui payer ses arriérés de rentes viagères et de lui accorder la grâce présidentielle.
Ce sont-là, autant de raisons pour lesquelles le retour au pays de Blé Goudé ne doit pas vraiment réjouir le PPA-CI de Gbagbo. Qui semble avoir compris l’impérieuse nécessité de le mettre en difficulté dès son retour au pays. Tout porte, en effet, à croire que c’est dans cette stratégie que s’inscrit l’annonce officielle de la candidature de Gbagbo pour la présidentielle de 2025, faite il y a quelques jours par Damana Pickas, le secrétaire général du PPA-CI. Des observateurs avertis y voient une façon de lui couper l’herbe sous le pied. Autrement dit, de lui enlever toute intention d’être candidat à la présidentielle de 2025. Blé Goudé n’a-t-il pas souvent répété qu’il ne sera jamais candidat contre Gbagbo ? Mis devant le fait accompli par l’annonce de la candidature de son mentor d’hier, ira-t-il jusqu’à se lancer, malgré tout, dans la course à la présidentielle de 2025, sans courir le risque d’être accusé de « parricide », par des ultras du camp Gbagbo ? On le voit, le retour annoncé de Blé Goudé risque de mettre sérieusement à mal, le PPA-CI et ses faucons.
Assane Niada
