Politique

Dialogue politique : Qui veut bloquer les travaux ?

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Le 16 décembre 2021, la classe politique ivoirienne s’est retrouvée à la Primature, autour du chef du gouvernement Patrick Achi, pour ouvrir la cinquième phase du dialogue politique. Deux semaines après, silence radio sur l’évolution de ces assises censées permettre aux politiques de se mettre d’accord sur le maintien de la paix dans leur pays.

 

Où en sommes-nous avec le dialogue politique ouvert en grande pompe le jeudi 16 décembre 2021 ? Deux semaines après l’ouverture de la cinquième phase, bien d’Ivoiriens s’interrogent sur l’évolution de ces assises. « La plupart des partis politiques ont déposé leurs propositions dans les délais. Certains l’ont fait ce 27 décembre », nous confie un fonctionnaire au ministère de l’Intérieur et de la Sécurité. « Mais, je ne suis pas en mesure de vous dire que tous les partis politiques ont déposé ». Pourtant, tous les partis politiques et groupements de partis politiques participants, saisis par courrier par le Premier ministre, devraient reverser leurs propositions, au comité dirigé par le ministère de l’Intérieur, dès le 17 décembre. Mais la grande majorité des partis politiques de l’opposition n’avait pas respecté ce délai.

 

Des partis politiques qui n’anticipent jamais

Le gouvernement a dû reporter de 10 jours, ce délai pour permettre à tous les participants de déposer leurs contenus respectifs, à la demande de l’opposition, comme l’a attesté le porte-parole adjoint du gouvernement, Mamadou Touré. Un retard qui fait perdre du temps. Deux semaines pour déposer des propositions que l’opposition a ressassées depuis plusieurs mois. « Ne pas déposer les propositions à temps, est une faute. C'est symptomatique du dysfonctionnement des partis politiques de l'opposition. En principe, leurs revendications relatives à la reconstruction nationale, au dialogue national devraient être prêtes avant même l'ouverture du dialogue national. Nos partis politiques ne sont pas dans l’anticipation. C'est dommage ! », regrette Geoffroy Julien Kouao, politologue-essayiste, auteur de « Faut-il désespérer de la Côte d’Ivoire ? ».

L’autre fait qui suscite bien d’interrogations en cette période de dialogue politique, est la dernière sortie du procureur de la République, ce lundi 27 décembre. Sortie au cours de laquelle Adou Richard a rendu public, l’état d’avancement de la procédure judiciaire sur les violences de la présidentielle d’octobre 2020. « En principe, la séparation des pouvoirs exécutif et judiciaire permet de séparer l'agenda du parquet de celui de l'Exécutif », souligne M. Kouao. Mais les résultats des enquêtes sur ces événements graves continuent de susciter beaucoup de réactions. Surtout qu’elles accablent les cadres de l’opposition, le président Henri Konan Bédié en tête, en sa qualité de chef de file de l’opposition ayant appelé à la désobéissance civile. « Les sorties publiques du ministère public vont fragiliser le dialogue national. Les opposants voient derrière le ministère public, la main de l'Exécutif. Ont-ils raison ? La réponse est malaisée. Dans tous les cas, l'Exécutif, à travers le ministre de la justice, est le patron du parquet », soutient le politologue.

 

Les conséquences de la sortie d’Adou Richard

Dans une déclaration lue ce mercredi 29 décembre 2021, par son porte-parole Soumaïla Kouassi, le PDCI, répondant au procureur de la République, accuse le parti au pouvoir d’être le responsable de ces violences. Mais le ‘’micro’’ d’Henri Konan Bédié ne manque pas d’afficher la volonté du PDCI-RDA de rester « engagé dans la dynamique de paix et de réconciliation ». « Le PDCI-RDA prend à témoin, la communauté nationale et internationale sur sa volonté à aller à la table du dialogue, capable d’effacer tous les germes de conflits et de palabres politiques qui minent la tranquillité des Ivoiriens », promet Soumaïla Kouassi. Non sans conclure, en ce qui concerne la cinquième phase du dialogue politique : « Le PDCI s’y rendra, sans crainte, ni peur de quelques procédures judiciaires que ce soit ». Au sein de l’opposition, des voix sont d’accord avec le procureur Adou Richard, pour qui ces enquêtes « n’ont aucun lien avec le dialogue politique ». Interrogé, le procureur de la République a été net : « Le procureur n’est pas un acteur politique, et cela n’a aucune conséquence sur le dialogue politique ».

L’espoir est pourtant permis

Au Front populaire ivoirien (FPI) dont le président Pascal Affi N’Guessan a été porte-parole de l’ex-Conseil national de transition (CNT), on ne s’inquiète pas vraiment de la sortie d’Adou Richard. « Nous n’avons pas de soucis…. Ce sont deux cadres différents : la Justice et le dialogue politique », fait remarquer Kouakou Kra, vice-président du FPI. Mais, cet homme de confiance du porte-parole de l’ex-CNT se réjouit du fait que ce sont « deux cadres qui peuvent être complémentaires. » Ce qui rassure davantage ce cadre de l’opposition ivoirienne, c’est que selon lui, le « cadre du dialogue politique est au-dessus de celui de la justice ». Pour M. Kra, le dialogue politique évoque « l’assainissement de l’environnement politique ». « L’environnement politique, prenant en compte toutes les questions judiciaires, d’indemnisation de victimes et autres, il faut espérer que cela aboutisse à un accord politique solide entre Ivoiriens ». C’est également la position de ce dignitaire du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) qui a bien voulu s’ouvrir à L’Avenir. « Vous savez que l’issue de ce dialogue peut conduire le chef de l’État à prendre des décisions. Mais dans le cas de la justice, il faut que certaines procédures soient menées à leurs termes », souffle-t-il. Faisant allusion à la grâce présidentielle et l’amnistie. « Je crois qu’il faut que les gens aillent à ces discussions avec des propositions claires. Mais également avec l’esprit de compromis. », espère-t-il. Pour lui, le dialogue a commencé. Il faut que les participants y croient, parce que le chef de l’État y accorde de l’importance.

Téin Bè Ousmane

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