Au regard de l’atmosphère qui s’est instaurée dans la course à sa succession, l’on peut dire que le Prince Nambê devra se retourner encore plusieurs fois dans sa tombe, parce que l’homme qui lui a succédé à la tête de l’ancien parti unique marche sans regarder dans le rétroviseur. Alors que dans l’opinion tout le monde s’attendait que le président intronisé du PDCI-RDA marque d’une pierre blanche la commémoration de la disparition du président Henri Konan Bédié, celui-ci a trouvé mieux à faire. De fait, Tidjane Thiam, qui a été quasiment imposé par la baronnie conservatrice du PDCI-RDA à la tête du parti, a préféré prendre l’avion pour aller loin des nègreries funéraires, pour faire corps avec la jet set parisienne dans le cadre des Jeux Olympiques qui se déroulent sur les bords de la Seine à Paris. Personne n’aurait trouvé à redire si et seulement si ce calendrier ne coïncidait pas avec la commémoration de l’an du président Henri Konan Bédié. Sans que cela ne soit un impératif catégorique pour lui, pour la Côte d’Ivoire et pour le parti qu’il dirige, Tidjane Thiam a choisi les jeux plutôt que de s’associer à la famille Bédié pour prier ensemble afin que le Grand architecte de l’univers accorde un repos éternel à celui qui a marqué d’une pierre blanche, l’histoire du PDCI-RDA après Félix Houphouët-Boigny.
Il ne faut pas avoir peur des mots : Tidjane Thiam a boycotté au sens propre comme au figuré, la commémoration de l’an 1 de la disparition de l’ancien président de la République. Ce boycott a fait que cette commémoration s’est limitée à la famille biologique de l’illustre disparu ainsi qu’à quelques membres de son cabinet. Le président du parti ayant choisi d’aller regarder des athlètes courir, sauter ou nager et se faire des selfies dans les gradins, les cadres et militants, eux aussi, n’ont pas marqué le pas pour prier pour le Sphinx de Daoukro. De fait, l’an 1 de la disparition de Henri Konan Bédié est totalement passé inaperçu, en dehors de quelques tabloïds qui ont fait leur travail mémoriel en revenant sur un pan de l’histoire de cet homme qui a dirigé la Côte d’Ivoire de 1993 à 1999. Aujourd’hui, la question qui est sur toutes les lèvres est la suivante : Pourquoi Thiam a-t-il banalisé de la sorte la commémoration de l’an 1 du président Henri Konan Bédié ? Sur la question, il ne faut pas se méprendre, Thiam n’a d’yeux que pour lui-même et son agenda personnel. Dans une contribution que nous avons d’ailleurs publiée dans nos colonnes la semaine dernière, Christine Blin Dadié, fille de l’écrivain immortel Bernard Dadié, s’était d’ailleurs posée des questions principielles qui achèvent de convaincre sur la vacuité de la présence de l’ancien patron du Crédit suisse aux Jeux Olympiques de Paris 2024.
« Qu’est-ce que Thiam a déjà fait dans le monde du sport et dans son pays en particulier concernant le sport ? Tidjane Thiam a-t-il été grand sportif ivoirien ? A-t-il déjà milité au sein du Comité national olympique ? Comment a-t-il atterri au CIO ? Louis Guirandou N’Diaye a été un grand judoka ivoirien qui a longtemps œuvré pour cette discipline en Côte d’Ivoire. Paix a son âme. A son décès, le Général Lassana Palenfo devient le président du Comité national olympique ivoirien après Guirandou. Le Général Palenfo, lui aussi grand sportif. D’où sort donc Thiam ? ». Voici donc autant de questions auxquelles Tidjane Thiam doit donner des réponses. En prenant l’avion pour aller regarder des athlètes défiler et se faire des selfies, plutôt que de s’associer à la famille Bédié pour prier pour le repos de son âme, Tidjane Thiam, en plus des innombrables bourdes politiques, vient ainsi de tuer pour une seconde fois, le Sphinx. A l’ouverture des JO, il n’y avait donc pas un responsable politique de haut rang dans les gradins des jardins du Trocadéro et de la Tour Eiffel, c’était plutôt ‘‘Monsieur Thôgô-Gnini’’, l’acteur principal fantasque de la pièce de Bernard Dadié qui était au bord de la Seine juste pour se faire voir. Une année après son décès, on peut dire que N’Zuéba est vraiment mort…
Bernard KRA