Dans cet imbroglio politicio-diplomatique, le Togo propose ses services pour régler ce différend pourtant banal entre voisins historiques. Mais les dernières informations qui proviennent de Lomé portent à croire que la junte malienne a d’autres motivations au-delà de la gestion de l’affaire des 49 soldats. Désormais, la libération des 49 militaires ivoiriens est subordonnée à des excuses publiques d’Abidjan et à l’extradition d’opposants politiques qui ont trouvé refuge en Côte d’Ivoire, après le coup d’État contre le régime d’Ibrahim Boubacar Keita. Et pourtant, la question qui intéresse l’opinion et toutes les chancelleries, c’est la démonstration, preuves à l’appui, que les 49 soldats qui ont été arrêtés, étaient effectivement dans un projet insurrectionnel au Mali. Incapable de le prouver, la junte malienne se sert désormais, de ces ‘‘mercenaires de luxe’’ comme objet d’un chantage honteux. Comme on le dit de façon triviale en Côte d’Ivoire, l’affaire n’est pas simple. Du moins pour les autorités de la transition au Mali. Mais là où le bât blesse, c’est le traitement de ce dossier par une certaine opinion en Côte d’Ivoire. Tout en riant sous cape, une frange de l’opposition, via ses relais médiatiques, s’est transformée en amplificateur des désidératas de la junte au pouvoir au Mali. Chaque fois que la junte malienne passe à une autre phase dans le traitement de ce dossier de ‘‘mercenaires boucantiers’’, des relais médiatiques à Abidjan s’empressent d’amplifier la voix des putschistes de Bamako, en soutenant que l’étau se resserre autour des « mercenaires du régime ».
Incapable de le prouver, la junte malienne se sert désormais, de ces ‘‘mercenaires de luxe’’ comme objet d’un chantage honteux
Et pourtant, nos 49 compatriotes qui sont encore aux arrêts, n’appartiennent à aucune chapelle politique et proviennent de toutes les régions du pays. Ce sont des époux, des pères, des frères et des amis qui sont allés pour soutenir la paix, qui ont été mis aux arrêts. Dans ce dossier, un fait est indéniable et ne peut aucunement être remis en cause : les 49 soldats ivoiriens arrêtés au Mali sont tout, sauf des mercenaires. On peut avoir des réserves sur la gestion de ce dossier. Soit. Mais à partir du moment où il est clairement établi que ces compatriotes ne sont pas des marchands de la mort comme Bamako veut le faire croire, personne en principe, ne devrait se réjouir de leur arrestation et de leur détention. Rien qu’analyser les éléments de langage des autorités maliennes depuis l’éclatement de cette affaire, le bon sens exige à chacun de se poser les bonnes questions pour avoir les bonnes réponses. De quels éléments de preuve dispose l’armée malienne pour soutenir que les soldats ivoiriens étaient dans une logique de déstabilisation ? Quand on a deux millions de ressortissants dans un pays voisin, pourquoi ne pas privilégier un règlement par voie diplomatique, surtout quand l’affaire est mal ficelée, plutôt que de recourir à un marchandage ? Pourquoi n’avoir pas intercepté l’avion qui a transporté les prétendus mercenaires et pourquoi affréter soi-même ce même avion pour aller aux négociations de Lomé ? Pourquoi subordonner la libération des 49 soldats par l’extradition des opposants politiques, sachant très bien qu’Abidjan avait déjà opposé une fin de non-recevoir à cette requête ? Ce sont là, autant de questions qui achèvent de convaincre que la junte malienne est dans un véritable chantage qui ne dit pas son nom. Mais jusqu’à quand Abidjan va continuer d’assister à ce mélodrame à la mise en scène loufoque qui se joue sur les bords du Djoliba ?