Économie

2 ans après l’adoption de la loi sur le plafonnement des loyers / Rien n’a changé

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Abidjan-14 juin 2021 (Lavenir)- L’adoption de la loi relative au plafonnement des loyers et cautions, intervenue en juin 2019, est toujours à la traine. Une mesure encore piétinée.  

C’est vrai que les populations ont salué la décision du gouvernement, mais la réalité sur le terrain, fait grincer les dents. 2 ans après l’adoption de la loi relative au plafonnement des loyers et cautions, les lignes n’ont pas bougé. Le témoignage de Marlyne Kouamé vient confirmer les faits. Informaticienne de profession, cette jeune dame résidant à Cocody-Angré 7è tranche, estime que rien ne changera. « Je n’y ai jamais cru. C’est vrai que la loi a été votée, mais nous subissons toujours le diktat des propriétaires de maison. Les coûts des loyers ne font que grimper. Pis, le plafonnement des loyers est une vue de l’esprit », déplore-t-elle.

C’est dommage que nos lois ne soient pas appliquées

Selon Mme Kouamé, pour un petit studio qu’elle loue, elle a dû débourser 600 000F. Soit 3 mois de caution, 2 mois d’avance et un mois destiné à l’agence. « Rien n’a changé. D’ailleurs, nous assistons à une flambée des prix. Les propriétaires de maison fixent le prix des logements, selon leur gré. C’est dommage que nos lois ne soient pas appliquées. Il faut que les décideurs soient regardants sur la question », préconise-t-elle.

Comme Mme Kouamé, Dorothée Nassoua estime que l’avènement de cette loi n’a eu aucun impact sur la population. À l’en croire, des propriétaires ne se sentent pas concernés par ce projet de loi. « Les locataires n’ont pas le choix. La demande est forte. Si on te fait la proposition que tu n’es pas intéressé, il y aura toujours un client qui versera le montant demandé. Le coût de mon loyer a connu une hausse de 20 000F, il y a 2 mois. J’ai voulu déménager, mais impossible. Pour une maison de 2 pièces, on me réclame 3 mois de caution et 2 mois d’avance, en raison de  90 000 F le coût du loyer. Qu’est-ce que la loi votée en 2019 a apporté ? », s’interroge-t-elle.

En effet, selon Hamed Bakayoko, gérant d’un immeuble à Angré, il n’est pas évident que cette loi puisse prospérer. Pour lui, cette loi est inique et injuste envers les propriétaires de logements. « Cette décision n’est pas à notre avantage. 2 ans après, qu’est-ce qui a changé ? Les propriétaires sont souvent obligés de faire de grands travaux dans les maisons, après le départ de certains locataires qui laissent les appartements dans un état de délabrement, avant de les libérer. Ces réparations nécessitent parfois d’énormes investissements », fait-il remarquer.

Le coût des matériaux de construction reste élevé

Autre chose, ajoute-t-il, le coût des matériaux de construction reste élevé. À savoir, la tonne de ciment dont le prix est fixé aujourd’hui, en fonction de la demande sur le marché, du fait de la crise énergétique. « Le Gouvernement a dit de vendre le ciment à 90 000 Fcfa la tonne, mais à l’usine, le prix a augmenté. Chaque distributeur fait donc son prix. Il y a également le fer à béton, la tuyauterie, le carrelage... Pour M. Bakayoko, l’application de cette loi n’est pas à l’ordre du jour.

Le bilan est mitigé

Selon le président de l’Union nationale des locataires de Côte d’Ivoire (Unaloci), Yaya Sanogo, avec qui nous avons eu un entretien, la mesure prise par l’État pour plafonner la caution et l’avance du loyer, est toujours piétinée par la majorité des bailleurs. Pour lui, le bilan de cette mesure est mitigé. « Je suis quelqu’un de pragmatique, j’avais dit à l’État que la peur de représailles, c’est-à-dire, l’expulsion des locataires et l’augmentation du prix du loyer, liées à la vengeance, ne peut leur permettre de dénoncer un bailleur qui est en porte-à-faux avec la loi », soutient-il.

Non sans rappeler que la mise en œuvre du certificat de conformité locatif ou du permis locatif, s’impose pour empêcher la mise en location de tout logement insalubre ou comportant des risques d’insécurité pour la protection des biens et des personnes vivant dans des logements locatifs.

Prendre en compte les insuffisances constatées

« Il faut contraindre les bailleurs à réhabiliter leur logement insalubre avant leur mise en location. En outre, la mise en place du certificat de conformité locatif ou du permis locatif s’impose également pour empêcher les bailleurs de surévaluer le prix de leurs loyers, de façon vertigineuse, conformément à l’effort de la lutte contre la vie chère et au système libéral à visage humain », suggère M. Sanogo. Ajoutant que, le ministère de la Construction doit respecter sa parole, quant à la mise en place d’un comité paritaire pour encadrer le loyer, étant donné que les locataires ne vont jamais à la justice pour un quelconque règlement de litige locatif. « Il faut faire en sorte que la loi oblige les bailleurs à utiliser le nouveau contrat de bail d’habitation sécurisé. Aussi, le ministère de la Construction doit prendre en compte les insuffisances constatées dans le nouveau contrat de bail d’habitation sécurisé », préconise-t-il.

 

Fatou Sylla

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