Économie

ACD, permis de construire : Une enquête révèle de graves défaillances

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Les effondrements récurrents de bâtiments déjà construits ou en construction, ont conduit le Conseil national des droits de l'Homme à mener une enquête dans le milieu du bâtiment. Il en ressort que le secteur est miné par bien des dysfonctionnements auxquels il conviendrait d'apporter des solutions.

Conduite par le CNDH, cette enquête a été menée du 03 mai au 21 juin 2021 dans les communes d'Abobo, Bingerville, Bouaké, Yamoussoukro, Korhogo, Daloa, Man et Agboville. Il en ressort que le défaut de permis de construire est l'une des causes des effondrements d'immeubles. « Le défaut de permis de construire (est) dû au coût onéreux des frais annexes liés à son établissement et à la difficulté d'obtention de l'ACD », relèvent les auteurs de l'enquête. Selon eux, il y a un rapport étroit entre les difficultés rencontrées dans la délivrance de l'ACD (Arrêté de concession définitive) et le fait que bien des personnes construisent sans permis de construire. Le ministre de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme, Bruno Koné, ne disait-il pas que 80% des constructions ont été réalisées sans permis de construire ? « Le défaut de permis de construire est la conséquence de la durée d'établissement de l'ACD d'une part, et des frais annexes jugés trop élevés par les maîtres d'ouvrage rapport.

 Les acteurs dénoncent le coût onéreux du permis de construire

Au dire des auteurs de l'enquête, la lourdeur dans la délivrance de l'ACD explique, en grande partie, le fait que les gens construisent sans attendre le permis de construire. À ce sujet, voici ce qu'ils avancent dans leur rapport : « Il ressort de l'enquête, ainsi que l’ont relevé plusieurs acteurs rencontrés, notamment les maîtres d'ouvrage, que, dans la réalité, l'ACD, qui est un élément constitutif du dossier de demande de permis de construire, s'obtient difficilement. Les plus chan[1]ceux l'obtiennent rarement dans un délai minimum d'un an, sinon, plusieurs années après l'introduction des dossiers de demande ». Et de citer les propos d'un acteur pour étayer leurs dires.

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« Moi-même, je suis du domaine, mais ça fait plusieurs années que j'ai fait la demande de mon ACD sur l'un de mes terrains, jusque-là, je ne l'ai pas encore obtenu », dit l'enquêté. Au regard du retard que prend la délivrance de l'ACD, en raison du coût onéreux, nombre de citoyens ont confié aux enquêteurs du CNDH, qu'ils ont dû construire sans permis de construire « pour éviter que l'argent destiné à la réalisation de l'ouvrage soit utilisé à d'autres fins ». À en croire les enquêteurs, la détention de l'ACD ne garantit pas l'obtention du permis de construire. « Les détenteurs de l'ACD ont du mal à obtenir le permis de construire à cause de la lourdeur administrative qui entraîne la durée excessive de son établissement », révèlent-ils.

Des fers à béton de mauvaise qualité

S'agissant du coût du permis de construire, il est fixé en fonction de plusieurs paramètres, qui tendent à le rendre difficilement accessible. Au coût fixe, « s’ajoutent les taxes des mairies et du district, le coût de l’étude de sol, les frais de cession, le coût d’établissement de l’ACD, qui varient en fonction de la superficie et de la situation géographique de la parcelle ». En ce qui concerne l’ACD, son coût minimum est de 101 000 FCFA. Ce coût s’accroît en fonction de la superficie du terrain sur lequel sera réalisé l’ouvrage, mais surtout, en fonction de la situation géographique du terrain. Un enquêté cité par le rapport, témoigne des déboires qu’il a rencontrés pour se faire établir un permis de construire : « Il y a la taxe de la mairie et la taxe du district qu’il faut payer. Pour mon chantier de Yopougon, la mairie m’a demandé 160 000 F, pour motif d’occupation du domaine public, car, selon elle, l’espace sur lequel sont le sable et le gravier, relève du domaine public. Le district demande 100 000 F CFA pour le rez-de-chaussée, et 50 000 F CFA par étage. À ces taxes, l’honoraire de l’architecte. Pour mettre son cachet sur mon dossier pour confirmer sa conformité aux normes, il m’a demandé 1 200 000 F CFA. Si je veux évaluer, pour obtenir le permis, ce n’est pas moins de 5 000 000 F CFA.

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Ce montant peut me faire avancer dans la construction ». À ces défaillances liées aux difficultés pour se faire délivrer l’ACD et le permis de construire, s’ajoute la mauvaise qualité des matériaux ou leur non conformité aux normes de construction. Ce qui constitue une des causes des effondrements d’immeubles. « Les enquêtés révèlent la présence du fer à béton de mauvaise qualité sur le marché. Les fers sur le marché ne respectent pas les dimensions normales. Les fers des dimensions 6 ; 8 ; 10 ; 11 ; 12 et 14 sont ceux qui sont autorisés pour la construction. Toutefois, plusieurs usines de fabrication de fer réduisent de quelques centimètres, les dimensions et les vendent au prix de la dimension réelle. Cette réduction est difficilement perceptible à l’œil par les maîtres d’ouvrage. Comme nous le dit un enquêté, ancien responsable d’usine de fer », rapportent les enquêteurs du CNDH. Autre dysfonctionnement pointé par ceux-ci : la faible capacité de contrôle des agents de l’État. « L’absence de contrôle technique par le ministère en charge de la construction et sa faible capacité à assurer le contrôle administratif, favorisent la persistance du non-respect des normes de construction qui est à l’origine des effondrements des bâtiments construits ou en cours de construction », font observer les auteurs du rapport. « Il ressort de l’enquête que plusieurs constructions réalisées ne font l’objet ni de contrôle administratif régulier pour cause d’insuffisance de ressources humaines, ni de contrôle technique en raison de la faible sollicitation des bureaux de contrôle par les maîtres d’ouvrage », renchérissent-ils. Reste à espérer que tous ces dysfonctionnements constatés par le CNDH seront corrigés à l’avenir.

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