Économie

Qualité du carburant en Afrique : Ne pas se tromper de fond débat

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La question de la qualité des carburants dans le monde est assez pertinente et mérite, quand il le faut, que des éclaircis soient apportés pour ne pas laisser prospérer une certaine désinformation, mais plutôt, recentrer le fond du débat.

La question de la qualité des carburants dans le monde est assez pertinente et mérite, quand il le faut, que des éclaircis soient apportés pour ne pas laisser prospérer une certaine désinformation, mais plutôt, recentrer le fond du débat.

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Et en l'occurrence, la question fondamentale ici, n'est pas tant l’origine du carburant importé ou qui le produit en local, etc. Une chose à savoir, est que le carburant (gasoil, essence, fioul, etc.) est produit conformément aux spécifications requises par le marché local du pays ou de la sous-région en question. Et ce, à l'exception du kérosène, car les avions volent de pays en pays et il n'est pas envisageable qu'à chaque escale dans un pays donné, ils soient ravitaillés en kérosène de qualités diverses. En d'autres termes alors, l'on n'est pas tenu de produire du carburant aux spécifications nationales européennes, américaines ou asiatiques, etc. quand il est destiné à l'Afrique subsaharienne où les conditions atmosphériques ne sont pas les mêmes. Mieux, dans certains pays, le carburant vendu en été, quand il fait chaud, est différent de celui mis sur le marché en hiver. Il n'y a donc pas d'office de carburant universel si je puis m'exprimer ainsi. Au demeurant, un carburant déclassé ailleurs, peut bien être vendu en d'autres lieux, pourvu qu'il soit conforme aux spécifications desdits lieux et tous les traders sont sensibilisés au fait qu'il y a une ligne rouge à ne pas franchir pour le carburant régulièrement importé. Sauf que parallèlement, si des raffineries clandestines infiltrent les marchés locaux, c'est aussi un autre débat qui n'est pas l'apanage d'un groupe sous-régional, en particulier.  Dans ce cas, il y a lieu de le mentionner et d’aller aux sources de l'information pour exposer l'activité des raffineries clandestines identifiées.

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Il s'agira en effet, de combattre ce trafic tout en sensibilisant les consommateurs à se servir uniquement dans les stations-services sous contrôle officiel. Car d'ailleurs, nul ne cautionne la contrebande. Et concernant donc le cas du gasoil, somme toute, vu que c'est de lui qu'il s'agit, quelle que soit la région du monde où il est produit, les spécifications en vigueur contiennent des exigences de base quasiment communes à tous les pays comme l’indice de cétane, les points de coupe, etc. Les raffineries veillent toutes à les respecter, car il s'agit d’exigences universelles qui, en termes thermodynamiques et mécaniques, ont une incidence sur la bonne marche, les performances et la longévité des moteurs automobiles entre autres. Sur ce point donc, nul ne peut dire que le gasoil africain est spécifiquement de mauvaise qualité et d'ailleurs, le reportage télévisé en question, ne le dit pas, car il n'y a effectivement rien à dire sur ce fait. Quant aux exigences relatives à l’environnement, au climat, à la santé publique, etc., nous comprenons que lesdites exigences ne peuvent être actuellement les mêmes pour tous les pays. Insinuer que le gasoil africain serait de mauvaise qualité, parce qu’il contiendrait plus de soufre qu'ailleurs, ne tient donc pas la route. Car, en matière de pollution atmosphérique, deux paramètres sont à prendre en compte : la matière première (le carburant) et l’engin motorisé (le véhicule utilisateur).

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Quelle pollution notable y a-t-il dans certaines bourgades subsahariennes où passent peut-être une centaine de véhicules diesel tout au plus par heure, contre plus d'un millier sur un périphérique routier européen ou américain ? Tout est donc une question de densité automobile, c'est-à-dire combien de véhicules utilisent ce carburant. En clair, quand un pays a, par exemple, une densité automobile de 1000 et qu'il s'alimente en gasoil contenant de 10 ppm de soufre, il n'est pas d'office mieux en termes d'éco-responsabilité qu'un autre pays doté d'une densité automobile de 10 et disposant de carburant à 1000 ppm de soufre.

Qui pollue le plus donc ?

Le gasoil consommé en Afrique correspond à notre densité automobile et en d'autres termes, à nos réalités locales. Combien de voitures passent sur les routes africaines par heure ? Et combien ailleurs ? Voici ce qu'aurait dû être le fond du débat quand on sait que le continent entier a une incidence contributive de moins de 5% lorsque l'on parle de pollution mondiale. Toutefois, en prévision de la hausse de la densité automobile de la sous-région ouest-africaine, la Côte d‘Ivoire anticipe déjà, car elle ambitionne d'être un hub énergétique de référence. Ses deux raffineries que sont la Société Ivoirienne de Raffinage (SIR) et la Société Multinationale de Bitumes (SMB) ont par avance, initié des projets de modernisation actuellement en cours. L'un d'eux justement, vise à réduire la teneur en soufre du gasoil, pas parce qu'il est non conforme, mais juste par anticipation et pour garantir notre assise géo-stratégique. Car, il ne faut pas attendre qu'augmente la densité automobile de la sous-région pour se mettre à niveau. Pour ce faire, le carburant vendu en Côte d’Ivoire est de qualité conforme aux spécifications africaines AFRI-4 et AFRI-5 actuellement en vigueur. Voici ce que certaines chaînes étrangères doivent préciser, plutôt qu'annoncer des chiffres sans se référer aux experts du domaine. D'ailleurs, aucun expert européen ne s'est exprimé dans ce reportage, et ce, en connaissance de cause. Dans tous les cas, nous restons disponibles à tout débat contradictoire sur cette question.

Serge DIOMAN

Expert International en Industries Pétrolières et Énergies

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