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Côte d'Ivoire / retour de Gbagbo, et si les victimes avaient vu juste ?

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Abidjan, le lundi 28 juin 2021 (lavenir.ci)-Elles seront criées à la face de la nation, leur opposition au retour triomphal de Laurent Gbagbo . Plus d'une fois, des victimes qui tiennent l'ancien chef de l'État pour responsable des exactions subies durant la crise post-électorale de 2010-2011 , ont signalé leur mécontentement dans les rues.

Regroupées au sein du Collectif des victimes en Côte d’Ivoire (Cvci), elles ont exprimé leurs frustrations de n'avoir pas obtenu satisfaction à la Cour pénale internationale (Cpi) et émis le vœu de voir Gbagbo purger la peine qui lui a été infligée par la justice nationale dans l’affaire dite du casse de la Bceao. « On veut lutter contre l’impunité en Côte d’Ivoire. Laurent Gbagbo a été jugé et condamné comme tout citoyen de ce pays. On a coutume de dire que nul n’est au-dessus de la loi. La décision de condamnation doit être exécutée », avait alors soutenu Issiaka Diaby, figure de proue de ces manifestants.

Et le porte-voix des victimes de renchér : « On a cherché la vérité et la repentance, on ne les a pas eues ; on n'a pas non plus obtenu totalement l'indemnisation. On ne veut pas lâcher la question de la justice. C'est non négociable !  ». Selon lui, cette exigence des victimes était une étape indispensable pour la réconciliation. «  Pour nous, c'est l'impunité qui nourrit les actes de violence. C'est pourquoi, nous appelons la justice à agir, sinon il n'y aura pas de réconciliation  », avait encore martelé Issiaka Diaby, au nom des victimes qui tiennent l'ex-chef de l'État pour responsable de leurs malheurs. Malgré leur activisme, elles n'ont pas pu empêcher le retour de Gbagbo au pays, le jeudi 17 juin 2021.

Des faits qui donnent raison aux victimes

Depuis son retour, les déclarations de l'ex-chef de l'État ne semblent guère s'inscrire dans la dynamique de la réconciliation, au nom de laquelle ses partisans estimaient les victimes, conduites par Issiaka Diaby, mal fondées à manifester leur hostilité à son retour au pays. De fait, dénonçaient les pro-Gbagbo, Issiaka Diaby et ses camarades devraient ravaler leurs frustrations de n'avoir pas obtenu satisfaction à la Cpi, au nom de la réconciliation. Ils ne doivent pas payer le couteau dans la plaie, en revenant sur les exactions et crimes supposés, qu'ils peuvent avoir à imputer au camp de l'ancien chef de l'État.

Et pourtant, les premières déclarations de Gbagbo, depuis son retour au pays, tendent à rouvrir les blessures causées par la tragédie de 2010-2011, consécutivement à son refus de céder l'élection présidentielle. Plutôt que de faire amende honorable ou, à tout le moins, preuve de contrition, l'ex-chef de l'État nargue, au contraire, les personnes censées avoir subi des préjudices, du fait de son entêtement à conserver un pouvoir qu' il avait encore perdu dans les urnes. «  Je n'ai rien à dire aux victimes  », at-il lâché dans un reportage sur les coulisses de son retour au pays, diffusé sur France 24. Des propos qui sonnent comme un mépris pour celles et ceux qui estiment que l'infirmité qu'ils portent depuis 10, est la conséquence du refus de Gbagbo de céder le pouvoir à Alassane Ouattara, déclaré vainqueur de la présidentielle de 2010, par tous ceux qui ont eu à abriter le conflit post-électoral qui s'en est suivi.

Par ailleurs, l'ex-chef de l'État a réclamé que la lumière soit faite sur les 3000 morts de la guerre post-électorale. Estimant avoir été acquitté par la Cpi, il a exhorté la justice à rechercher l'auteur ou les auteurs de ces morts. «  Qu'on cherche qui a tué ! », at-il lancé dans un autre reportage diffusé sur la chaîne ARTE . Le disant, il rejoint incidemment la position d'Issiaka Diaby et ses camarades, qui invitent la justice nationale à faire exécuter la peinee à Gbagbo dans l'affaire du braquage de la Beceao , au plus fort de la crise post-électorale .

Autre fait : le fait que l'ex-chef de l'État revienne sur la polémique autour du vainqueur de ce contrôle, polémique que l'on croyait désormais derrière nous. «  Certains ont décidé de mettre Ouattara au pouvoir. Mais pour le mettre au pouvoir, il faut que la place soit vide, donc que l'on me dégage. Mais moi, je me considère comme celui qui a gagné l'élection présidentielle de 2010 . C'est évident  », at-il lâché, relançant le débat sur le vainqueur de la présidentielle de 2010. En rouvrant ce dossier, Gbagbo tend à renverser la table. Et partant, est loin de s'inscrire dans une logique de réconciliation. En cela, il donne raison aux victimes qui l'invite à se soumettre au verdict rendu par la justice nationale du temps où il était à l'extérieur du pays.

Assane NIADA

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