Après les audits lancés dans l’administration, la vague d’assainissement de la vie publique a gagné l’Assemblée nationale. Une quinzaine de députés ont dû se résoudre à céder leurs fauteuils, pour incompatibilité, sous la pression du président du Parlement. Au nom de la bonne gouvernance dont Alassane Ouattara a fait son cheval de bataille.
Ce qui se passe à l’Assemblée nationale semble être la résultante d’un effet de contagion. Tout porte, en effet, à croire que c’est la dynamique de moralisation de la vie publique, impulsée par le chef de l’État qui a gagné le parvis de l’hémicycle. Depuis quelque temps, plusieurs députés qui cumulaient des fonctions incompatibles aux termes de la loi, étaient mis sous pression par le président de l’Assemblée nationale, Amadou Soumahoro, puis son intérimaire, Adama Bictogo. Poussés à se conformer à la loi, ces députés rattrapés par les dispositions sur les incompatibilités, ont fini par rendre le tablier, au profit de leurs suppléants. C’est assurément-là, un bon point à mettre à l’actif du pouvoir qui montre ainsi, sa détermination à faire de la bonne gouvernance, une réalité dans ce pays.
C’est que les députés épinglés sont tous issus du parti au pouvoir, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP). Il s’agit de Touré Alpha Yaya, député de Gbon ; Lassina Ouattara dit Lass Pr, député de Korhogo ; Maizan Koffi, député d’Appiamandoum-Bondoukou ; Patricia Yao ; l’avocat Abdoulaye Méité, député de Kani ; Méïté Abdoulaye, député de Kamalo Sifié ; Salimata Fofana Méité, député de Mankono ; Sidiki Aboubacar, député de Djibrosso ; Marcelin Zinsou, député d’Aboisso ; Kouaman Kra Kouamé, député de Bondo ; Lacina Cheick, député de Kongasso-Kounahiri ; Nadine Mélanie Gnéba, député de Lauzoua et Yokoboué ; Aboulaye Kouyaté, député de Lakota ; Aboubacar Cissé, député d’Aboisso ; Adama Coulibaly, député de Satama-Sokoro ; Kader Ouattara, député de Koumassi ; Aboubacari Cissé, député d’Aboisso.
Ces parlementaires sont, soit nommés à de hautes fonctions dans l’administration publique, soit exercent dans des structures privées qui bénéficient de financement public via des marchés publics, par exemple.
Sommés de choisir entre leurs sièges de député et ces autres fonctions, ils ont adressé au président de l’Assemblée nationale, un courrier d’empêchement à l’exercice du mandat de député. Même ceux d’entre eux qui estimaient ne pas être frappés par la loi au sens strict, ont dû rendre le tablier, le débat étant devenu un enjeu politique pour les adversaires du pouvoir.
En fait, tout est parti d’un communiqué rendu public par le président de l’Assemblée nationale, Amadou Soumahoro, le 5 octobre 2021, dans lequel celui-ci indiquait avoir noté que des députés occupaient des fonctions jugées incompatibles avec leur mandat, aux termes des articles 87, 88, 90, 91, 92 du code électoral (voir encadré ci-dessous). Il a alors invité les concernés à lui adresser une déclaration d’empêchement à l’exercice de leur mandat. Des mois plus tard, soit fin janvier, l’affaire a refait surface. Cette fois, c’est son intérimaire, le vice-président Adama Bictogo qui a remis le dossier sur la table, à l’occasion de la session parlementaire du 31 janvier 2022. « À partir du 1er février 2022, les députés à 2 postes ne pourront plus siéger. Le bureau de l’Assemblée nationale s’est réuni. La décision vient d’être actée », avait tonné, l’intérimaire d’Amadou Soumahoro.
Et de faire remarquer que les députés concernés tombent, en effet, non seulement sur les dispositions du code électoral en ses articles 88 à 96, mais aussi sous le coup de la loi organique n°2020-558 du 07 juillet 2020 portant statut des parlementaires, qui détermine le régime des incompatibilités, en son chapitre 5, Article 9 à 18. Depuis, l’affaire semble être pliée. Le renoncement de ces députés à leurs sièges au profit de leurs suppléants s’inscrit dans la dynamique du renforcement de la bonne gouvernance sous le signe duquel le chef de l’État a placé son mandat-ci.
Assane Niada