Kalilou Coulibaly-0

Opinion

Le chant tragique d’un nom biffé de la liste électorale

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que ceux qui pleurent la non-inscription de Laurent Gbagbo cessent leurs lamentations. (ph:dr)
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Il était une fois un pays qui voulait avancer, un pays qui voulait tourner la page d’un livre où s’étaient inscrits les cris, les larmes et le sang. Ce pays s’appelait la Côte d’Ivoire, et il avait un rêve : celui de la réconciliation.

Mais voilà qu’à l’ombre des discours apaisants et des accolades de façade, surgissait un refrain connu, une litanie qui avait pour seul but de faire croire à une chose pourtant absurde : que la présence d’un seul homme sur une liste électorale était le sésame absolu de la paix.

Quand la loi devient un détail

Laurent Gbagbo n’est pas sur la liste électorale, quel sacrilège ! quel blasphème démocratique ! L’aréopage de ses partisans, soudainement convertis en chantres du droit et de la justice, hurle à l’injustice.

Mais au fond, que leur reproche-t-on, sinon d’avoir la mémoire courte et la mauvaise foi tenace ? 
Ils voudraient faire croire à une nation entière que la loi n’existe que lorsque cela les arrange. Or, si la démocratie n’est pas un buffet où chacun se sert à sa convenance, elle est un ensemble de règles immuables, une structure rigide qui ne se plie ni aux humeurs, ni aux nostalgies.

Laurent Gbagbo a été condamné par la justice ivoirienne. Pas par  caprice, ni par une manœuvre obscure, mais par une décision de droit. Cette condamnation entraîne une conséquence juridique inévitable : son nom est biffé de la liste électorale. 
Ce n’est ni un complot, ni un assassinat politique, mais la stricte application des règles du jeu démocratique.

L’Homme qui voulait devenir un principe

Mais le plus pathétique, c’est cette mise en scène où Laurent Gbagbo serait l’incarnation même de la réconciliation nationale. Comme si, à lui seul, il était la boussole morale du pays, le juge suprême du pardon et de la paix.

On nous dit : « Sans lui sur la liste électorale, point d’élection » . Quelle étrange conception du de la République comme si le pays tout entier, les victimes d’hier, les familles endeuillées, ne comptaient pour rien. Comme si la démocratie était un simple exercice de favoritisme, un jeu où l’on décide qui mérite de tourner la page et qui doit rester enfermé dans le passé.

Mais non, Laurent Gbagbo n’est pas le critère de la paix. Il n’est pas non plus l’alpha et l’oméga de la Côte d’Ivoire. 
Son absence d’une liste électorale ne signe ni l’apocalypse, ni l’implosion du pays. Le réduire à cette seule équation, c’est insulter la mémoire de ceux qui ont souffert et faire de la nation une simple scène de théâtre où se joue éternellement la même tragédie.

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La démocratie, ce carcan qui fait mal aux nostalgiques

Cette démocratie que certains invoquent tout en la méprisant ! Lorsqu’ils sont au pouvoir, ils en brandissent les principes comme un bouclier. Mais lorsqu’ils en sont exclus, ils la dénoncent comme une prison injuste.

Or, la démocratie a des règles. Nul n’en est au-dessus. Ni les héros déchus, ni les chefs déchus, ni les rois sans couronne. 
Gbagbo a été condamné, il ne peut donc pas voter. Pourquoi devrait-on tordre les principes pour lui accorder un privilège que personne d’autre n’aurait ?

Les institutions ivoiriennes ne sont pas des machines à exceptions. Elles sont bâties pour garantir un fonctionnement équitable du système. Et que cela plaise ou non, la règle s’applique à tous. La Côte d’Ivoire ne doit pas être un royaume où la loi s’efface devant les désirs d’un seul homme.

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Une comédie qui a trop duré

Alors que reste-t-il ? Un théâtre aux acteurs fatigués, des discours prévisibles, des indignations calculées. Comme un vieux disque rayé, certains voudraient encore nous faire croire que sans leur idole, le pays ne peut avancer.

Mais le temps des idoles est révolu. La Côte d’Ivoire se construit avec ses lois, ses institutions et ses citoyens. Elle ne doit pas être l’otage d’un nom, ni d’un passé révolu.

Alors, que ceux qui pleurent la non-inscription de Laurent Gbagbo cessent leurs lamentations. Car derrière leurs cris, il n’y a qu’une mauvaise foi grossièrement maquillée, un refus d’accepter que l’histoire avance, avec ou sans eux.

Kalilou Coulibaly, Doctorant EDBA, Ingénieur.