Économie

Financement climatique / Jacques Assahoré (Ministre) aux experts : « les fruits n'ont pas tenu la promesse des fleurs »

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La douzième conférence sur le changement climatique et le développement en Afrique s’est ouvert ce vendredi 30 août 2024 à Abidjan.

En marge de la 10e session extraordinaire de la Conférence ministérielle africaine sur l'environnement, les experts climatiques se sont donné rendez-vous au bord de la lagune Ebrié pour plancher sur les grandes orientations de l’avenir de l’Afrique.

La lutte contre les changements climatiques constitue donc, au regard de l’ampleur du phénomène, le défi majeur auquel l’humanité n’a eu à faire face au cours de ce dernier siècle. Face à cette situation, la prise de conscience de plus en plus grandissante a amené la communauté climatique internationale, lors de l’accord de Paris, à adopter des recommandations contraignantes visant à maintenir le réchauffement de la planète en dessous de 2 degrés Celsius d’ici la fin du siècle. L'Afrique émet moins de 4% des émissions totales de gaz à effet de serre au niveau mondial. La question de l'adaptation aux effets néfastes est donc une préoccupation majeure et la question du financement est un souci de premier plan.

 

Harmoniser les priorités africaines

« Financer l’adaptation au climat et la résilience en Afrique », c’est le thème de cette rencontre de haut niveau à laquelle a pris part Jacques Assahoré Konan, ministre de l’Environnement, du développement durable et de la transition écologique. Les objectifs spécifiques de cette réunion sont d'harmoniser les priorités africaines et ses implications et produire des contributions solides conformément aux résultats du premier bilan mondial. Il s'agit également de faire le bilan et d'analyser les résultats de la mise en œuvre des différentes contributions déterminées au niveau national en vue de mobiliser et de faciliter l'engagement et les partenariats multipartites pour des réponses adaptées aux conséquences du changement climatique.

Ouvrant cette 12è Conférence sur le changement climatique et le développement en Afrique, le ministre ivoirien a rappelé que « les pays riches et polluants ont également fait la promesse d'octroyer aux pays du Sud 100 milliards de dollars annuellement pour financer la lutte contre le changement climatique dans les pays pauvres (…) les fruits n'ont pas tenu la promesse des fleurs et le soutien réel des pays développés est demeuré bien inférieur à ce que les chiffres officiels l’avaient pensés. Abîmant ainsi la confiance internationale et les chances de succès des négociations climatiques et compromettant par la même occasion la mise en œuvre des engagements climatiques contenus dans nos CDM ». 

 

Tirer parti de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf)

 

Hanan Morsy, Secrétaire exécutive adjointe de la CEA et économiste en chef, a souligné le déficit critique du financement climatique. « Malgré l'engagement de 2009 de 100 milliards de dollars par an, seule une fraction des 1,3 billions de dollars estimés nécessaires pour soutenir la résilience climatique mondiale a été mobilisée. Le déclin du financement climatique mondial pour l'adaptation, plutôt que le doublement attendu d'ici 2025, constitue une menace sérieuse pour les objectifs de développement durable (ODD) et les investissements existants en matière de résilience », a-t-elle noté. C’est pourquoi, elle souhaite le développement de solides partenariats public-privé avec l’implication des parties prenantes à tous les niveaux pour intensifier les investissements en matière d’adaptation. Pour des solutions de financement innovantes qui n’aggravent pas le fardeau de la dette de l’Afrique, Morsy exhorte à tirer parti de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) pour canaliser les investissements vers les efforts d’adaptation. 

Pour sa part, Josefa Correia Sacko, commissaire chargée de l'agriculture, du développement rural, de l'économie bleue et de l'environnement durable (ARBE) à la Commission de l'Union africaine, a souligné les immenses besoins financiers pour les engagements climatiques de l'Afrique, déclarant : « Les pays africains auront besoin d'environ 3 000 milliards de dollars pour mettre pleinement en œuvre leurs contributions déterminées au niveau national (CDN) d'ici 2030. Toutefois, garantir un financement adéquat pour l'action climatique reste un défi important. C'est pourquoi nous sommes réunis ici aujourd'hui : pour délibérer sur les actions et stratégies clés et pour consolider la position de l'Afrique alors que nous évaluons la situation des résultats de la COP 28 et tracer la voie à suivre pour la COP 29 en novembre de cette année à Bakou, en Azerbaïdjan ». 

 

Adapter l’investissement au climat selon la BAD

 

Elle a exhorté tous les acteurs à parler d'une seule voix alors que nous nous préparons pour la COP 29. Nous devons nous concentrer sur la mobilisation du financement climatique à grande échelle pour l'Afrique, en mettant clairement l'accent sur l'obtention de subventions plutôt que de prêts ou de dettes. Nous devons donner la priorité au financement de projets à fort impact et veiller à ce que les marchés du carbone jouent en notre faveur ».

Le Conférence sur le changement climatique et le développement en Afrique (CCDA) est convoqué chaque année avant la Conférence mondiale annuelle des Parties (COP) par une coalition de partenariats connue sous le nom de ClimDev-Afrique. La Banque africaine de développement membre de cette coalition a salué les efforts africains. Son directeur du changement climatique et de la croissance verte, Antony Nyong, l’a souligné en rappelant la nécessité d'une reconnaissance et d'une compensation pour les contributions significatives de l'Afrique aux efforts mondiaux d'atténuation. « Notre priorité doit être de favoriser un développement résilient au changement climatique tout en équilibrant l'adaptation avec des investissements tenant compte du climat. Cependant, cela ne peut être réalisé qu'avec un financement adéquat, un transfert de technologie et un renforcement des capacités, conformément au principe de responsabilités communes mais différenciées", a-t-il déclaré

 

La Côte d’Ivoire veut mobiliser 11 000 milliards FCFA

 

La CCDA-XII devrait catalyser des actions et des engagements audacieux qui non seulement répondront aux défis climatiques immédiats de l’Afrique, mais garantiront également un avenir prospère et durable pour les générations à venir.

Il s’agit donc au cours de cette session non seulement d'identifier et d'explorer les besoins et les options de financement en relation avec l'adaptation en Afrique, alignée sur les résultats du bilan mondial. Mais également d'examiner l'approche et les moyens pour renforcer la capacité des avocats africains. Enfin, il s’agit d'exprimer les besoins et les opportunités d'une action renforcée sur le lien entre le climat et la biodiversité à travers des plans d'action de l'Union africaine sur la résilience climatique et l'utilisation et la gestion durable de la biodiversité.

La Côte d’Ivoire a développé son plan national. « Nos stratégies s'élèvent à 22 milliards de dollars. Ça fait environ 11 000 milliards de francs. Et vous savez que ce montant, notre budget ne peut pas le supporter. C'est pour cela que nous appelons les pays développés à nous accompagner. A travers des projets que nous avons élaborés, nous avons un portefeuille de 315 projets, dont 53 sont finançables, sont bancables. Nous attendons que les pays développés, qui ont fait la promesse de nous accompagner, tiennent leurs engagements pour que nous puissions financer ces 22 milliards de dollars » a indiqué le ministre ivoirien.

Ainsi, la rencontre des experts permettra de jeter des bases de la 10ème session extraordinaire de la Conférence ministérielle africaine sur l’Environnement et les Consultations régionales de la Convention des Nations Unies sur la Lutte contre la désertification. Ce conclave placé sous le thème « Renforcer les ambitions de l’Afrique pour réduire la dégradation des terres, la désertification et la sécheresse »se propose de permettre un engagement renouvelé des Etats membres, des partenaires et des parties prenantes pour augmenter les ambitions de l'Afrique. 

 

Joël DALLY

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