La journée internationale des femmes célébrée le 08 mars sous le thème « l’égalité aujourd’hui pour un avenir durable », interpelle l’ensemble des acteurs sur l’implication de toutes les couches aux efforts nationaux et internationaux de lutte contre les changements climatiques.
En effet, les changements climatiques constituent des menaces sérieuses pour l’environnement physique et humain, de même que pour l’économie nationale, régionale et mondiale. Parmi les zones les plus affectées, figure l’Afrique de l’Ouest (IPCC, 2014), où les secteurs clés de développement, notamment l’environnement, l’agriculture, les ressources en eau, sont considérés comme vulnérables aux changements climatiques.
Les changements climatiques et les inégalités entre les sexes sont donc liés. En milieu rural, les femmes sont contraintes de faire de longues distances pour la corvée d’eau. Cela les expose aux risques de violences sexuelles et physiques surtout dans les contextes sécuritaires délétères. A ce titre, une initiative de la société civile ouest africaine avec l’appui financier du Ministère des Affaires Etrangères des Pays-Bas nommée Programme Benkadi, a été mis en place et qui a mené des études.
C’est une initiative de la société civile ouest africaine pour améliorer l'efficacité des politiques publiques en matière d'adaptation au changement climatique et d'atténuation de ses effets au Bénin, au Burkina Faso, en Côte d'Ivoire et au Mali. D’un coût global de 14.206.783.613 FCFA sur une période de 5 ans (Janvier 2021-Décembre 2025), le programme couvre 4 pays, 30 régions et 67 communes. Il reçoit l’accompagnement technique et financier de Woord En Daad (WD) et du Ministère des Affaires Etrangères (MoFA) des Pays–Bas sous le leadership du Secrétariat Permanent des ONG (SPONG).
En 2021, les résultats des études genre et inclusion conduites par ce programme ont révèle ce qui suit :
Au Burkina Faso
Les femmes, les jeunes et les personnes handicapées sont les plus vulnérables face aux effets néfastes des changements climatiques. Pour les actions comme la réalisation des cordons pierreux, les femmes et les personnes handicapées sont faiblement impliquées avec 14,29%. Par contre, pour le reboisement les femmes sont impliquées dans 92,86% des cas, preuve de leur rôle dans la vie des communautés.
Quant à l’accès aux ressources, les résultats montrent qu’il n’est pas équitable. Prenant l’exemple de l’accès à la terre, 100% des focus groupes qu’ils soient homme, mixte ou femme affirment que la propriété de la terre est exclusivement masculine.
De l’avis de madame Maimouna Déné, présidente de l’Association des femmes albinos du Burkina Faso : "Si l’on suppose qu’au Burkina il y a plus de 2.000 personnes atteintes d’albinisme, on peut dire que le changement climatique les touche directement. Les femmes par exemple trainent à la fontaine pour chercher de l’eau. Et les femmes albinos non seulement font partie de ces femmes mais sont plus exposées au soleil. C’est aussi le cas des femmes handicapées qui n’ont pas la possibilité de se tenir debout ". Au Burkina Faso, le programme est porté par le Secrétariat Permanent des Organisations Non Gouvernementales (SPONG).
Au Bénin,
Au Bénin, les femmes occupent 60% de la main d’œuvre agricole et apportent 80% de la production alimentaire, Elles sont très actives dans tous les secteurs d’activités agricoles. Elles constituent 65,5% des actifs agricoles dont 42,2% dans le primaire, 18,1% dans le secondaire et 39,7% dans le tertiaire. Toutefois, elles sont confrontées aux pesanteurs socio-culturelles découlant du système patriarcal qui limitent leur accès aux ressources productives (terre, crédits, intrants, etc.) et tendent à les confiner dans la sphère reproductive. Elles ont un très faible niveau d’éducation/formation et sont faiblement représentées dans les instances de prise de décision au sein des Organisations Socioprofessionnelles Agricoles.
Pour la Présidente du Réseau pour l’intégration des femmes des ONGs et Associations Africaines (RIFONGA)-Section du Bénin, « l’enjeu actuel est d’assurer l’implication effective des femmes dans les instances de prise de décisions à tous les niveaux du dialogue politique pour le renforcement de la participation citoyenne dans l’identification, l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi-évaluation des politiques et stratégies publiques de développement afin d’assurer la résilience des communautés vulnérables face aux changements climatiques » madame Léontine Konou IDOHOU.
Ici, c’est la Plateforme des Acteurs de la Société Civile au Bénin (PASCiB) qui porte le projet-programme.
En Côte d’ivoire
Les femmes sont présentes dans la gestion environnementale mais leur participation gagnera à être renforcée car trop souvent, elles sont confinées dans des rôles dites « secondaires ». Non seulement elles sont peu présentes dans les initiatives de sauvegarde de l’environnement, mais aussi leurs conditions de travail et de vie sont précaires avec un taux de pauvreté qui s’élève à 47,4 % des femmes, contre 45,5 % des hommes. En milieu rural, le taux de pauvreté chez les femmes s’élève à 56,8 %, contre 39 % en milieu urbain.
Il est temps que les femmes soient aussi présentes dans les lieux de décision pour s’assurer de la prise en compte de leurs besoins spécifiques et de leur avis. A cet égard, la Convention de la Société Civile Ivoirienne (CSCI) qui porte le programme, recommande aux décideurs que dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques (gestion de l’érosion côtière et de la préservation des aires protégées) plus d’« égalité de chance pour un avenir durable en Côte d’Ivoire ».
Au Mali
La faible prise en compte du genre dans les pratiques environnementales à cause de la complexité des pesanteurs sociales (croyances, normes us et coutumes, préjugés, poids de la religion) qui ne favorisent pas toujours la place à la femme, aux jeunes et aux personnes vivant avec un handicap dans la gestion de l’environnement.
Le programme se veut donc une réponse adaptée aux besoins des femmes. Pour le chargé de projet Benkadi au Mali, monsieur Mohamed CAMARA : « Nous sommes condamnés à travailler pour garantir leur droit à une égale participation à la résolution des problèmes liés principalement aux questions de changements climatiques en particulier et à leur participation politique, sociale et économique, au développement du pays en général ». A cet effet, le Secrétariat de Concertation des Organisations Non Gouvernementales (SECO-ONG), porteur du projet, travaillera avec les femmes, les hommes, les filles et garçons pour déconstruire les sources de pouvoir qui affectent négativement et significativement les femmes au niveau individuel, relationnel, structurel et promouvoir ainsi des actions et institutions plus équitables.
Des développements précédents, la prise en compte effective du genre et de l’inclusion dans nos différentes interventions en Afrique s’avère nécessaire et constitue un impératif afin que le monde se porte mieux.
Joël DALLY avec Sercom