Accidents de la route, professionnalisation du secteur… Dans cette interview, le président de l’Union Nationale des Auto-Ecoles de Côte d’Ivoire (UNAECI), Guillaume Koko invite l’État à prendre en compte les résolutions sorties de leurs différents séminaires.
Le ministre des transports a récemment suspendu les inspecteurs à l’examen du permis de conduire. Quel commentaire ?
On ne va pas avoir la langue de bois. On n’a pas été associé. On savait pertinemment qu’il y avait des remue-ménage au sein de notre ministère, mais c’est par la presse que nous avons appris une telle décision de la part du ministre. Rapidement, on essaie de rentrer en contact avec la tutelle et par la suite, on a été convoqué à son cabinet pour une réunion d’informations et d’explications.
Comment avez-vous accueilli cette décision ?
Pour nous, c’est un peu un recul, parce qu’il y a plus de 30 ans en arrière, les gendarmes étaient commis au poste d’évaluateur, on pensait qu’il y avait une certaine évolution dans notre métier. C’est justement pour ça qu’on a convoqué une Assemblée Générale Extraordinaire ce 6 mai 2021, pour qu’ensemble on puisse prendre des décisions et faire des analyses de cette situation. L’auto-école a véritablement changé. Nous sommes désormais de petites entreprises, nous sommes des employeurs. Nous souhaiterions être informés, quand il y a des décisions qui concernent notre secteur d’activités.
Quelles conséquences sur votre secteur d’activités ?
C’est trop important. On a subi la pandémie de Covid19 au cours de laquelle les auto-écoles ont été fermées par un arrêté de notre ministre. Aucune auto-école n’a reçu une indemnisation et cette décision nouvelle vient de tomber. Nos activités sont encore à l’arrêt. Nous voulons comprendre les raisons d’une telle décision, dans la mesure où c’est Quipux qui évalue. Est-ce que ces nouveaux examinateurs sont formés ? Si c’est le cas, sur quoi nos candidats vont être évalués ? Est-ce que la méthode d’évaluation va changer ? Est-ce qu’il y aura des nouveaux questionnaires ? On ne sait rien de tout ça.
De plus en plus, on assiste à de nombreux accidents sur nos routes. Malheureusement, les auto-écoles sont parfois pointées du doigt. Qu’en pensez-vous ?
Il n’en est rien. Les gens sont dans l’émotion. De vous à moi, un car qui roule à 120, voire 130 Km/h, quand il rentre dans des buissons, ça concerne l’auto-école ? Vous avez des camions qui sont en surcharge. Tout cela remet en cause la question de la formation. Ce qu’on doit comprendre à la conduite, il y a la formation de base et après, il y a la formation post-permis. Ton employeur doit tenir compte de la formation continue pour renforcer tes capacités.
Mais la formation de base vous incombe…
L’auto-école n’a jamais évalué un candidat. L’auto-école forme et elle présente le candidat à un évaluateur qui est formé et assermenté par l’État de Côte d’Ivoire pour faire ce travail. C’est lui qui juge. Très souvent, on dit que les auto-écoles vendent les permis. C’est une aberration. Nous sommes des formateurs, l’État nous donne des agréments pour former. D’ailleurs, c’est une bonne décision de nettoyer le secteur en interne. Nous avons contribué à la mise en place d’un programme de formation. On a fait plusieurs ateliers, on demande juste au ministre de signer l’arrêté. Il a expliqué à la réunion qu’il ne veut pas l’arrêté, mais plutôt un décret. On est d’accord. Le décret a encore plus de poids.
Combien coûte le permis de conduire aujourd’hui ?
On s’est mis d’accord après plusieurs séminaires sur la fixation des prix du permis de conduire, en ayant l’objectif d’unifier les tarifs. On avait demandé également la séparation des permis. Il avait été décidé de faire le permis B tronc commun et le permis moto, avant d’être candidat aux permis professionnels qui sont le C et le D. On veut mettre fin au désordre dans le milieu. Et on a travaillé sur l’arrêté. Il avait été validé au cours d’un séminaire où les résolutions ont été soumises à notre ministre. Il devrait donc sortir un arrêté pour l’unification des tarifs et la séparation des permis. Ce qui allait nous permettre de travailler correctement. Tout ne dépend pas de nous. Nous voulons travailler en collaboration avec notre ministre en lui faisant des propositions. Que les gens arrêtent de faire de l’intox en disant que les accidents se produisent à cause des auto-écoles qui vendent les permis de conduire. C’est archi-faux. Il y a 05 ou 10 ans en arrière, les politiciens ont commencé à faire des bons de permis pour leurs campagnes électorales. Ce sont les conséquences que nous subissons aujourd’hui. C’est désastreux. On va à Abobo, on nous fait des bons de permis à 35 000F, à Anyama, c’est à 40 000F. Qu’on arrête d’indexer les auto-écoles toutes les fois où il y a un accident de la circulation routière. La sécurité routière est une affaire de tous. Il faudrait que chacun s’implique.
Quel est donc le montant qui avait été arrêté quand vous avez élaboré le document d’unification des tarifs ?
Le permis A est estimé à 100 000 F, le B à 140 000F, le C et le D à 160 000 F chacun. On a même dit que les auto-écoles qui n’appliquent pas ces tarifs sont frappées par une suspension.
Quelles solutions pour réduire au maximum le nombre d’accidents sur nos routes ?
Le problème majeur, c’est la formation. Il ne faudrait pas faire l’amalgame. L’automobile évolue. Cela veut dire que le conducteur de l’auto doit savoir s’adapter et se former. Il y a ce qu’on appelle le Cacr qui va être mis en pratique. Cela permettra de professionnaliser davantage le secteur. Il faut donc le réorganiser et prendre la décision d’accorder le droit aux structures qui doivent faire la formation post-permis, en indiquant précisément la période impartie. Il va falloir rapidement qu’on prenne ces décisions. C’est une situation collective et il faut situer la chaine de responsabilité.
Réalisée par Fatou Sylla