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Dossier Culture/Après des décennies d’agonie Le théâtre ivoirien sur le chemin de la renaissance

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Très prisé et médiatisé dans les années 90, le théâtre ivoirien a perdu depuis des années ses repères et de sa vitalité. Entre doute, scepticisme, optimisme et espoir, les acteurs s’activent à le faire renaitre de ses cendres. Et les recettes et propositions pour voir éclore de nouveau le théâtre sont nombreuses. Des acteurs clés de ce secteur livrent dans ce dossier leurs visions de la relance du théâtre.

Les initiatives de relance du théâtre ivoirien sont nombreuses. Pourtant, cet art majeur qui aura contribué à la formation de plusieurs élites culturelles du pays reste toujours plongé dans une léthargie, « dans un état plus ou moins difficile » selon le docteur Elie Kouaho Liazéré, auteur, Inspecteur général de théâtre, professeur d’études théâtrales et cinématographiques par ailleurs Directeur général du Centre national des arts et de la culture (Cnac). Comment donc le théâtre ivoirien a pu connaître un essor et une vitalité dans les années 90 révélant des grands noms à l’image de Bitty Moro, Bienvenue Neba, professeur Zadi Zaourour, Sijiri Bakaba, Thérèse Taba, Wêrê-Wêrê Liking et Marie-Josée Houranthier, Dieudonné Niangoran Porquet, Adjé Daniel, Diallo Ticouaï Vincent. 

Ce qui a fait la vitalité du théâtre ivoirien

Plusieurs acteurs et observateurs de la vie culturelle du pays sont unanimes sur la vitalité et l’essor du théâtre depuis l’indépendance jusqu’aux années 90. Cette vitalité était liée à plusieurs facteurs qui ont positionné le théâtre comme un art majeur au point que tous depuis l’école primaire devaient le côtoyer ou le pratiquer. Tout cela a eu pour avantage de voir une floraison de troupes privées dont les talents rivalisaient. « De 1960 à 1990, il y a eu une effervescence au niveau des troupes privées, le théâtre dit de recherche avec le Didiga, le théâtre rituel de Wêrê-Wêrê Liking et Marie-Josée Houranthier, la griotique de Dieudonné Niangoran Porquet, le théâtre populaire avec Adjé Daniel, les Djibois de Divo avec Diallo Ticouaï Vincent…. Il y avait donc tout ce vivier important qui alimentait la vie théâtrale nationale », reconnaît l’ingénieur culturel Alain Tailly par ailleurs ex-DG du Centre national des arts et de la culture. « Lieu de l’élévation de l’esprit » selon Elie Kouaho Liazéré ou encore « l’ancêtre du cinéma » à en croire la comédienne Clémentine Papouet, élève du professeur Zadi Zaourour, le théâtre avait connu un essor grâce à certains facteurs. Notamment, l’apprentissage à l’école débouchant sur le festival national de théâtre scolaire et universitaire qui a aussi contribué à la fois à la formation du public et aussi des comédiens. Si plusieurs troupes ont pu se former c’est aussi grâce à la grande médiatisation du théâtre avec l’émission ’Théâtre ce soir’’. On pouvait également compter avec les nombreux lieux de diffusion dont les centres culturels construits un peu partout. Pour la formation des comédiens, l’Institut national supérieur des arts et de l'action culturelle (Insaac) a joué un rôle important.

« La vitalité du théâtre ivoirien était liée à plusieurs facteurs. D’abord l’école comme pépinière du théâtre avec le festival national de théâtre scolaire et universitaire qui dès l’enfance jusqu’à l’université a préparé un public et des comédiens, des metteurs en scène, des dramaturges, ce qui était un creuset important. Une fois que l’école a joué son rôle, il y a après les médias et il y avait la télé avec ‘’Théâtre ce soir’’ qui était aussi une lucarne de promotion et qui a promu toutes les grandes troupes que le pays a connu. Ensuite, il y a les lieux de diffusion. À l’époque, il y avait des lieux cultes dédiés au théâtre comme le Théâtre de la cité, le centre culturel de Treichville, et le Centre culturel français sans oublier le centre culturel Jacques Aka de Bouaké. C’était quatre foyers importants des diffuseurs de théâtre. Également, l’Insaac a joué un rôle important dans la professionnalisation des comédiens avec tous les grands maitres que nous connaissons avec les Bitty Moro, Bienvenue Neba, Sijiri Bakaba, Thérèse Taba, ce qui permettait la vitalité », a rappelé Alain Tailly. 

Toute cette vitalité du théâtre a donc permis d’avoir des troupes et comédiens célèbres qui ont constitué un vivier important ayant permis la transmission et l’amour du théâtre aux plus jeunes. Malheureusement, alors que cette dynamique devait continuer et rendre incontournable le théâtre, on va plutôt observer et assister à une baisse drastique de cette effervescence vers 1996 avec le démantèlement par le ministère de la Culture du théâtre scolaire qui est passé au niveau de l’Éducation nationale. Et depuis, les politiques de relance tardent à prendre ou même échouent.

Les difficultés, c’est que ceux qui ambitionnent de faire renaitre le théâtre n’agrègent pas l’ensemble de tout ça.

De 1960 à 1990, il y a eu une effervescence au niveau des troupes privées, le théâtre dit de recherche avec le Didiga, le théâtre rituel de Wêrê-Wêrê Liking et Marie-Josée Houranthier, la griotique de Dieudonné Niangoran Porquet, le théâtre populaire avec Adjé Daniel, les Djibois de Divo avec Diallo Ticouai Vincent, Seydou Bakoum qui faisait des pièces aussi. Il y avait donc tout ce vivier important qui alimentait la vie théâtrale nationale. C’est l’ensemble de ces facteurs qui peut faire que le théâtre va renaitre

Malheureusement en 1996, le ministère de la Culture a démantelé le théâtre scolaire qui est passé maintenant au niveau de l’Éducation nationale mais qui n’est plus la même effervescence, le même attrait.

Philip Kla

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