Société

Enquête/Interdiction de la circulation des motos dans Abidjan : Dur, dur pour les conducteurs de tricycles

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À l’issue du conseil des ministres, le mercredi 08 septembre 2021, le gouvernement a décidé d’interdire la circulation des motos-tricycles au centre-ville d’Abidjan. Une mesure qui porte un coup dur aux jeunes exerçant dans le secteur du transport des marchandises. 
Vendredi 17 septembre 2021. Port-Bouët quartier Gonzagueville, dans le Sud d’Abidjan, précisément au carrefour Terre Rouge. Plus d’une demi-dizaine de « taxis bagages » sont stationnés le long du boulevard menant à Grand-Bassam. Disposés sans un ordre apparent, les conducteurs de ces motos attendent tranquillement l’arrivée d’un potentiel client. Ces derniers, devenus presqu’incontournables dans le paysage du transport de marchandises d’une localité à l’autre dans le district d’Abidjan, sont réduits à circuler dans les ruelles des quartiers de leur commune. 

Recette journalière en forte baisse

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Cette situation n’est pas sans conséquence pour Goré Bi N’guessan Joël, conducteur travaillant comme contractuel. « On a des clients qui nous sollicitaient pour transporter leurs bagages jusqu’au Port autonome dans la zone de Vridi. Étant donné le coût élevé de la location des véhicules de transport de marchandises (communément appelés les Bâchées), nous les dépannions sans souci. Avec la nouvelle mesure du gouvernement, on est obligé d’attendre jusque tard dans la nuit pour transporter leurs bagages. Il n’y a plus de clients. On part souvent en brousse déplacer les produits vivriers vers le quartier où on se limite. Avec le renforcement des surveillances des forces de sécurité, nous ne pouvons plus aller vers le centre-ville. Les femmes mêmes se plaignent qu’on ne puisse plus convoyer leurs marchandises dans les grands marchés. C’est devenu difficile pour nous d’avoir nos recettes. Avant la mesure, on pouvait verser les 6000 Fcfa exigés par nos propriétaires.  Soit 36 000 Fcfa par semaine. Aujourd’hui, c’est devenu impossible d’atteindre ce montant. Tantôt, c’est 3500 Fcfa, tantôt 4500 Fcfa par jour. Soit 25 000 Fcfa par semaine. Il arrive des jours où on ne gagne même pas 15000 Fcfa. Si on n’arrive plus à faire de bonnes recettes, comment on va nourrir nos enfants ?», déplore-t-il. 

Des commerçants inquiets

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Au marché du vivrier, connu sous l’appellation de marché Gouro d’Adjamé, tout comme à Abobo rond-point d’Anador, le constat est parlant : les motos-tricycles sont aux arrêts. Certains, pour défaut de pièces complètes et d’autres pour baisse de la recette suite à des tracasseries policières. Karim G., chargeur de marchandises au marché Gouro, dénonce le dérapage de certains agents de la Police Nationale. « Avec la mesure, les jeunes sont obligés de passer par exemple, par la route du Zoo pour rejoindre Abobo. Là encore, ils les bloquent sous le prétexte que ces voies sont également interdites à la circulation de tricycles. Après renseignements, nous avons appris que cette voie n’est pas sur la liste des passages interdits. En réalité, ils passent tout le temps à racketter les conducteurs sous menace de mettre leurs motos en fourrière », dénonce-t-il. Venue acheter des bananes plantains, une jeune commerçante du nom de Khady, fustige la décision d’interdiction des tricycles dans le centre-ville d’Abidjan. Comment ces jeunes pourront-ils travailler si on leur interdit de circuler par exemple, entre Adjamé et Treichville ? Elle s’en inquiète d’autant plus que, pour elle, le coût du transport de ses marchandises est moins onéreux en recourant au service des tricycles. Elle en déduit que cette mesure aura obligatoirement un impact sur le coût des denrées alimentaires. 

Le plaidoyer de la faîtière

Réunis au sein de la Coopérative de mutualisation des motos-tricycles et marchandises de Côte d’Ivoire (CMTMCI), les acteurs du secteur entendent se plier à la décision du gouvernement au regard du nombre de plus en plus croissant des accidents de la route dans lesquels les motos et tricycles sont impliqués. Berthé Moussa, secrétaire général de la CMTMCI qui compte plus de 1000 adhérents, dit avoir entrepris de sensibiliser ses membres à établir toutes les pièces requises pour la conduite des motos et tricycles. Tout en saluant l’initiative du gouvernement, le leader de la CMTMCI plaide pour l’ouverture de couloirs de circulation pour les tricycles sur les 2x2 voies, les 2x3 voies, ainsi que sur tous les grands boulevards urbains et les ponts. « C’est vraiment un plaidoyer. À l’image de certains pays de la sous-région ou européens où il y a des couloirs réservés à la circulation des motos et des tricycles, notre pays peut exploiter cette solution qui pourra nous soulager », explique Berthé. 

Olivier YEO

 

 

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