Le 8è congrès extraordinaire du Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI) s'est tenu le vendredi 22 décembre dans la capitale Yamoussoukro qui enregistré l’élection de Tidjane Thiam de s’installer dans le fauteuil de feu Henri Konan Bédié. L'ancien patron du Crédit Suisse, a été élu sans surprise avec 96,5 % des voix contre 3,2 % pour son adversaire, Jean-Marc Yacé, maire de la commune abidjanaise de Cocody. Si Tidjane Thiam peut revendiquer une victoire en prenant la tête du parti aux forceps, force est de constater qu’il a été élu sur fond de division au pied de la Basilique. A la vérité, la direction intérimaire s’est inscrit dans un agenda dont la finalité devait aboutir à l’intronisation de Thiam à la tête du PDCI et ce qui a été fait. Quand on se réfère au contexte qui a entouré la tenue de ce 8è congrès extraordinaire qui a même été reporté après une procédure judiciaire engagée deux militants du parti qui ont dénoncé de nombreuses irrégularités dans la tenue de ce congrès. Tidjane Thiam, on le sait, ne remplit pas toutes les conditions requises pour faire acte de candidature, notamment les dix années de présence au Bureau politique. Mais la Direction intérimaire, manifestement en mission, est parvenu à imposer l’ancien patron di Crédit suisse à tous les militants.
Bien avant le congrès des figures de proue du parti comme Jean Louis Billon, Thierry Tanoh et Maurice Kakou Guikahué avaient dénoncé ces entorses aux textes du parti. Le premier cité, Jean Louis Billon, avait dit qu’organiser un congrès dans le contexte que l’on a connu déboucherait sur un « simulacre d’élection » du nouveau président et ce qui a été fait le vendredi 22 décembre à Yamoussoukro. L’un mis dans l’autre, l’on peut dire que Tidjane Thiam a piétiné les textes du PDCI RDA pour s’asseoir dans le fauteuil du président Henri Konan Bédié. Mais c’est maintenant que le plus dur commence pour lui. D’abord à l’écouter, le tout nouveau président du parti septuagénaire appelle à l’avènement d’un milieu politique policé, aseptisé voire idyllique. Il s’imagine que la pratique politique sous nos tropiques, réputée être un combat de gladiateurs, va devenir, comme par enchantement, un jeu pour enfants de chœur, un dîner de gala pour la jet society de la finance internationale. Qu’il se détrompe ! Ayant basculé dans la vie politique, Tidjane Thiam devra se préparer à faire face aux pires adversités, aux coups bas, coups tordus et autres coups fourrés inhérents au milieu politique, surtout en Côte d’Ivoire.
Rien ne lui sera donné sans péril, comme cela a été le cas pour le fauteuil de président du Pdci-Rda, qui lui a été offert sur un plateau d’or, en dégageant de son chemin tous les obstacles, quitte à tordre le cou aux textes fondateurs de ce parti. En effet, il pourrait se heurter d’ici là sinon à l’hostilité ouverte, du moins aux intrigues larvées de certains barons de son parti, qui ont été coiffés au poteau par des manœuvres peu orthodoxes quand il s’est agi de trouver un successeur à feu Henri Konan Bédié. Pas sûr, en effet, que durant les deux prochaines années, ces frustrés ne jouent ouvertement ou malicieusement contre ce président parachuté à la tête du plus vieux parti de Côte d’Ivoire. Il n’est pas exclu qu’il y ait des velléités de candidature indépendante parmi ces « victimes » de la mafia qui a intronisé Thiam au forceps. Le neveu de Félix Houphouët-Boigny devra donc se préparer à affronter ces adversaires internes.
Gérer les contradiction internes et gagner la bataille de chef de file de l’opposition
Il devra également se préparer à gérer l’appétence du pouvoir de tous les autres leaders de l’opposition, qui lui contestent déjà son statut de leader de l’opposition. Des voix s’élèvent, en effet, dans l’opposition pour dire qu’il est un bleu dans le milieu politique national et donc ne saurait prétendre être le chef de file de l’opposition. C’est dire que Thiam aurait tort de penser que Laurent Gbagbo et ses partisans vont accepter de servir de perche pour le propulser dans le fauteuil présidentiel. Autrement dit, il va lui falloir manœuvrer pour décoder les « rouages » de la vie politique nationale, qui n’ont aucun secret pour le leader du Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI). D’autant que, à en croire ses partisans, l’ancien chef de l’Etat n’a pas renoncé à l’idée d’être candidat à l’élection présidentielle de 2025.
Last but not least : Le candidat du Pdci-Rda à ce scrutin devra se faire à l’idée qu’il lui faudra « guerroyer » pour arriver à ses fins. Il va devoir faire face à l’adversité inhérente à toute bataille pour la conquête du pouvoir. Des peaux de banane, des coups de gueule, des critiques quelquefois acerbes pourraient parsemer le chemin qui conduit au fauteuil présidentiel. Tout comme il devra savoir gérer l’influence des vieux briscards de son parti qui voudront lui faire bénéficier de leur connaissance des « rouages » du milieu politique national. Avec le risque de l’initier (au sens initiatique du terme) aux mauvaises pratiques de l’ancien monde dont il aspire à tourner la page. Au total, après avoir été élu aux forceps, le plus dur commence pour Tidjane Thiam, dont l’élection à la tête du Pdci-Rda suscite beaucoup d’espoir au sein des militants de son parti. Désormais au pied du mur, ses chances de transformer l’essai seront appréciées à l’épreuve de la dure réalité du terrain.
Assane NIADA
